Le dollar rechute sous le seuil de 1,50 pour 1 euro

C'est chose faite : après moult séances d'atermoiements, le seuil de 1,50 dollar pour 1 euro a fini par être enfoncé hier en milieu d'après-midi sur le marché des changes, dans un contexte très particulier où le retour du goût pour le risque donne des ailes aux marchés boursiers au détriment du billet vert. Ce n'est pas un hasard si la barre des 1,50 a été cassée au moment où la Bourse américaine retrouvait des couleurs dans la foulée des résultats meilleurs que prévu de la banque d'affaires Morgan Stanley. Le dollar se retrouve ainsi à son plus bas niveau depuis août 2008 et les Cassandre se demandent déjà si le franchissement de ce cap, plus psychologique que technique, est le signe avant-coureur d'une crise du dollar. Il est prudent pour l'instant de garder la tête froide. D'abord, le dollar reste encore éloigné du plancher historique face à la monnaie unique franchi le 15 juillet 2008 à 1,6038. Ensuite, ses mouvements récents restent extrêmement ordonnés. La monnaie américaine baisse certes, mais par petites touches, ne laissant pas présager de retour à la volatilité excessive des taux de change tant redoutée par le président de la Banque centrale européenne, Jean-Claude Trichet. Enfin, si le dollar affiche une dépréciation de 16,5 % depuis son point haut de l'année, touché fin février, elle fait suite à une période faste qui l'avait vu regagner 28 % de sa valeur en sept mois.On peut même se poser la question de savoir comment le dollar a pu résister aux assauts dont il a fait l'objet sans dériver davantage. Il y a d'abord la cabale menée par la Chine contre l'hégémonie du dollar sur le système monétaire international depuis fin mars, qui a fait école auprès des principaux pays émergents et récemment donné des idées de rébellion aux pétromonarchies du Golfe. Il y a ensuite le colossal déficit budgétaire américain, qui a atteint 1.400 milliards de dollars au cours de l'exercice fiscal achevé le 30 septembre, soit 9,9 % du PIB des États-Unis. Il y a enfin une calamité : le niveau lilliputien des taux offerts sur le dollar l'a transformé en monnaie de portage favorite des spéculateurs de tous bords. Il est devenu le véhicule de choix du « carry trade », la stratégie qui consiste à jouer sur les écarts de rendements, ravissant la place peu enviable longtemps tenue par le yen et le franc suisse.retrait de liquiditésMais s'il est vrai que la faiblesse du billet vert tient à sa trop grande abondance, résultant des injections massives de liquidités, essentiellement en dollars, réalisées par les banques centrales pour tenter d'enrayer la crise des marchés du crédit, il existe une force de rappel qui pourrait intervenir plus tôt qu'on ne le pense généralement. Dès lors que la Réserve fédérale américaine et ses homologues lèveront le voile sur leurs stratégies de sortie de crise qui, avant le relèvement des taux, passera par un retrait progressif de liquidités, le dollar va passer de denrée pléthorique à denrée rare. Et la rareté a toujours fait monter les cours de quelque actif que ce soit.
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