L'explosion de la classe moyenne du Brésil transforme les affaires

Il y a encore quelques années, personne ne se serait préoccupé de convaincre Daniella Mendes, d'ouvrir un compte en banque. Aujourd'hui, la jeune femme, qui est manucure dans un salon de coiffure est assaillie par les propositions. Elle vient d'opter pour la banque Bradesco : l'agence lui proposait de lui rembourser le montant du tarif bancaire mensuel en crédit pour son téléphone portable. « Au début, je me suis méfiée, mais, ça marche vraiment ! », confie-t-elle, ravie d'avoir sauté le pas. Avec un revenu mensuel de 1.300 reis (575 euros), Daniella fait partie de ce que les économistes appellent la « Classe C ». Cette classe moyenne, qui réunit les personnes dont le revenu est compris entre 520 et 2.000 euros par mois, était ignoré par le marché de la consommation, car trop pauvre, et trop fragile. On leur préférait les classes A et B, qui, bien que peu nombreux, concentraient la grande majorité du revenu. Tout a changé depuis l'élection de Luiz Inacio Lula da Silva. Stabilisée, grâce à la fin de l'hyperinflation, en 1994, la classe moyenne explose littéralement depuis 2003. En moins de huit ans, 31 millions de Brésiliens ont grossi ses rangs, en s'extirpant de la pauvreté. « Rendez-vous compte, c'est la moitié d'une France, qui d'un coup, découvre la consommation », insiste Marcelo Neri, économiste à la Fondation Getulio Vargas. Grâce à ces nouveaux arrivants, la classe C constitue aujourd'hui un bataillon de 90 millions de personnes, et concentre 46 % du revenu national, plus que les classes A et B réunies (44 %). Ascension socialeLes entreprises sont prêtes à tout pour séduire ces nouveaux consommateurs, qui ont le bon goût d'être encore peu équipés en électroménager, voiture, informatique... La Bradesco, qui a séduit Daniella, est une des premières banques à investir sur ce marché. « Nous avons perçu qu'avec le cocktail de hausse de l'emploi et les politiques sociales, les revenus des plus pauvres augmentaient très vite. Il nous fallait capter cette ascension sociale », explique Odair Ribelato, directeur exécutif de l'institution. Bradesco a commencé à proposer d'ouvrir un compte dans les bureaux de poste ou les supermarchés, « parce que c'est un public qui ne se sent pas encore digne d'entrer dans une banque », précise-t-il, ainsi que de proposer des produits financiers peu coûteux. « Quand on leur donne une carte de crédit, c'est comme un titre de citoyen, du coup, ils sont reconnaissants et fidèles », poursuit Ribelato. Conscientes que l'argent est en train de changer de mains, les grandes enseignes créent des secondes marques. Ainsi le chocolatier huppé Kopenhagen a inauguré en janvier 2009 une nouvelle enseigne, «? Brasil Cacau?», plus accessible. Quelque 180 boutiques devraient être ouvertes d'ici la fin de l'année. Partout, on assiste à un mouvement de concentration des entreprises, avec l'objectif d'atteindre ce nouveau public. Le groupe de distribution Pao de Açucar (dont le Français Casino est actionnaire) vient de racheter les magasins d'équipements populaires Casas Bahia pour récupérer leurs clients. Les universités privées ouvrent leurs portes à ces étudiants moins riches, mais nombreux, alors que les mutuelles de santé leur proposent de les assurer à bas prix. Selon la Fondation Getulio Vargas, la classe moyenne devrait compter d'ici 2014 36 millions de personnes en plus.(lire aussi page 26).
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