Vice d'Etat

Par Jean-Baptiste Jacquin, rédacteur en chef à La Tribune.

Bousculée par Bruxelles qui peste depuis des années contre les monopoles de la Française des Jeux et du PMU, interpellée par l'engouement de ses citoyens pour la pratique des paris et des jeux en ligne, même illégaux, la France s'est décidée à ouvrir le marché des jeux d'argent sur Internet. Mieux, par un subtil dosage des ponctions fiscales concoctées par le projet de loi dévoilé hier par Eric Woerth, le ministre du Budget, l'Etat tente de créer les conditions pour que ce nouveau marché s'épanouisse, se développe et prospère.

Pourquoi ce qui était condamné hier deviendrait-il légal le 1er janvier 2010 ? Notre société devient-elle plus permissive et est-elle en train de desserrer un étau moral étouffant ? Pas le moins du monde. Le débat n'est pas là. Se demander si les jeux d'argent seraient moraux ou non n'a manifestement pas d'intérêt. La fin de cette "prohibition" correspond à une opportunité de marché.

Selon le ministre du Budget, plus de 8.000 sites francophones illégaux récupèrent actuellement des mises dépassant les 2 milliards d'euros. 5% des Français joueraient déjà sur Internet ! Et, selon le ministre, "le marché illégal sur Internet présente des taux de croissance à deux chiffres". Eric Woerth l'a donc martelé hier, l'ouverture de ce marché doit permettre "d'assurer un rendement constant des recettes fiscales et sociales du jeu, actuellement de 5 milliards d'euros".

Et si, contrairement à l'Italie qui, par une fiscalité trop lourde, a bridé le marché du jeu en ligne, la légalisation à la française des jeux d'argent en ligne était un succès commercial, ce serait tout bénef'. La loi est parée d'autres vertus par Bercy, qui explique sans rire que légaliser le jeu en ligne permettra de mieux lutter contre le risque de santé publique avéré lié à l'addiction.

De fait, une petite partie des taxes devrait "financer la lutte contre la dépendance". En réalité, c'est sur le même principe que la sécurité sociale est financièrement intéressée au développement des ventes de cigarettes et d'alcool. Nous ne sommes pas à un paradoxe près.

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Commentaire 1
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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une belle illustration de la logique historique du marché, avis à ts les spécialistes des lois naturelles , ce n'est pas le capitalisme qui fait le marché mais l'Etat qui lui donne les moyens d'éxister, un marché est une construction sociale

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