La Grèce et au-delà

Par Sophie Gherardi, directrice adjointe de la rédaction de La Tribune.

Les Grecs ont un mot pour désigner la source de tous leurs ennuis. La dette?? Almunia. La récession?? Almunia. La crise sociale?? Almunia. Jusqu'en février 2010, le nom du commissaire européen aux Affaires économiques et monétaires, Joaquin Almunia, pourra continuer à servir de repoussoir dans toutes les conversations. Après, il deviendra commissaire à la Concurrence et les Grecs devront apprendre à maudire son successeur, le finlandais Olli Rehn.

Mais à chaque jour suffit sa peine. Aujourd'hui, les Grecs apprennent à détester un autre nom, Fitch. C'est celui de l'agence de rating qui a décidé mardi de rétrograder la note sur le crédit à long terme de leur pays de A? à BBB+, avec perspective négative. Désormais, la question d'un défaut de paiement de la Grèce est ouvertement posée. Embarras de l'Union européenne, qui voit un de ses membres stigmatisé. Gros embarras de la BCE, qui veille sur l'euro?: Jean-Claude Trichet a eu beau affirmer lundi avec gravité qu'il faisait confiance au nouveau gouvernement grec pour "prendre des mesures très difficiles, très courageuses mais absolument nécessaires", son inquiétude était palpable.

Depuis la quasi-défaillance de Dubaï fin novembre, les marchés sont soupçonneux. Des rumeurs alarmistes courent, des pays sont désignés comme d'éventuels mauvais payeurs. On leur a même trouvé un acronyme, les "Pigs" (comme cochons, vous avez bien lu)?: Portugal, Italie, Grèce, et Espagne (Spain). Les spéculateurs jouent sur du velours?: tous membres de la zone euro, ces pays ne présentent aucun risque réel, mais en laissant entendre que c'est le cas, on peut espérer obtenir de meilleurs taux d'intérêt quand on leur prête de l'argent.

Comment a-t-on pu en arriver là?? La Grèce porte une lourde responsabilité. Son système-pays est profondément dégradé. Le népotisme règne dans la classe politique nationale où trois familles, les Mitsotakis, les Caramanlis et les Papandréou, se succèdent au pouvoir depuis des décennies. L'administration, jamais réformée, est lourde, voire corrompue. Le chômage des jeunes, massif, nourrit la radicalisation politique. Les grèves à répétition ajoutent à l'instabilité. Les Grecs sont surendettés - même le Pasok, le Parti socialiste au pouvoir, a sorti une carte de crédit "affinitaire". Les statistiques nationales ne sont pas sincères.

Comble de l'injustice, c'est en avouant que son déficit n'était pas de 6% du PIB, comme le disait le gouvernement précédent, mais de 12,7%, que la Grèce a été ostracisée. Et qu'elle est devenue un abcès de fixation.

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