La guerre du dollar n'aura pas lieu

Souvent évoqué pour remplacer le billet vert, le droit de tirage spécial (DTS) du FMI ne présente aucun des attributs indispensables pour devenir une véritable monnaie internationale. Et à ce jour, aucun prétendant sérieux ne peut se substituer au dollar. Les actions entreprises pour limiter son empire ne peuvent donner que des résultats modestes.

Préoccupée par l'ampleur croissante de ses actifs en dollars, la Chine a manifesté le désir de remettre en cause le rôle international du dollar et de voir celui-ci remplacé par un autre instrument monétaire tel que le droit de tirage spécial (DTS) du Fonds monétaire international (FMI). Le souhait de ravir aux Etats-Unis les avantages d'émettre la monnaie internationale a donné naissance à ce que la presse a baptisé la "guerre du dollar".

Quelles sont les caractéristiques que devrait posséder l'instrument monétaire de remplacement pour remplir son rôle ? La fonction première d'une monnaie internationale est de permettre le règlement des échanges transfrontières, ce qui implique qu'elle soit universellement acceptée. Par ailleurs, un autre usage est d'être utilisée pour les facturations et un troisième d'entrer dans les réserves des banques centrales. Parmi ces fonctions, la primauté revient naturellement à la fonction de règlement car la tendance naturelle est d'utiliser la monnaie de paiement pour faire les facturations et constituer les réserves. C'est donc le fait d'être acceptée sur l'ensemble de la planète par les agents économiques qui caractérise le mieux une véritable monnaie internationale.

Ceci requiert une confiance universelle qui se constate mais ne se décrète pas. Elle exige des conditions de stabilité et de permanence exprimant la solidité de l'émetteur : une sécurité interne et externe garantie par un régime politique stable et une armée puissante ; un long "track record" de maintien satisfaisant du pouvoir d'achat ; un système financier offrant de larges possibilités de placement ; un rayonnement sur les cinq continents ; enfin et par-dessus tout, l'assurance absolue que l'existence même de cette monnaie ne peut être remise en question.

Enumérer ces conditions montre clairement que non seulement aucune autre des grandes monnaies nationales ne peut offrir ces caractéristiques maintenant, ou dans un avenir prévisible, mais aussi qu'il en est de même pour les DTS que l'on prétend parfois hisser au niveau de monnaie mondiale. D'une façon générale, les paniers de monnaies n'ont guère eu de succès dans le passé, à l'image de l'Ecu qui a été un échec. Une moyenne de cours est une abstraction sans personnalité propre peu apte à attirer les suffrages dans les échanges privés car elle ne peut se recommander d'aucun passé et son avenir n'offre pas de garantie absolue.

Faute de pouvoir mettre sérieusement en cause le rôle de monnaie internationale du dollar, des efforts seront surtout tentés pour limiter quelque peu à la marge l'empire du dollar. En effet, si d'autres monnaies et notamment les DTS ne peuvent prétendre à la qualité de monnaie internationale, il leur est possible d'exercer dans un cadre limité l'une ou l'autre des fonctions d'une monnaie universelle, notamment dans le cadre d'accords de swaps comme ceux conclus entre la Chine et le Brésil ou sur un marché fortement concentré comme celui du pétrole.

C'est sans doute sur la fonction de réserve qu'ont le plus insisté les partisans de la diversification comme les autorités chinoises. Sur ce point, la marge de man?uvre est très limitée. Des arbitrages peuvent faire varier la composition des réserves de devises pour un pays donné, mais pas pour l'ensemble du système mondial qui n'est affecté que par la variation des cours. Ainsi de 2002 à 2008, la part du dollar dans les réserves est revenue de 71% à 62% mais, à change constant, elle est montée à 73% ! Quant au rôle éventuel de l'or, il est nécessairement très faible pour une simple question d'ordre de grandeur : le stock total n'atteint que 10% des réserves actuelles et la production annuelle ne dépasse guère 0,5 % de ces réserves.

On voit donc que les actions entreprises pour limiter l'empire du dollar ne peuvent donner que des résultats modestes. En revanche, il est une voie réaliste et efficace qui ne manquerait pas de réduire significativement l'usage du dollar dans les échanges internationaux, c'est la constitution de zones monétaires régionales, par exemple autour de la Chine et du Brésil. Les relations monétaires internationales, toujours assurées par la monnaie des monnaies qu'est le dollar, se limiteraient alors pour la plupart aux rapports entre quelques grands blocs. Le dollar continuerait de régner mais son domaine couvrirait un moins grand nombre d'opérations.

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Commentaire 1
à écrit le 18/01/2010 à 9:43
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" la guerre du dollar n'aura pas lieu " si ce n'est pas la révolution c'est une évolution intéressante qui gêne, reconnaissez-le, sensiblement les Américains. Notre ami Obama, a fait de longs voyages en Asie -tous azimuts- c'est bien pour limiter l...

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