Le patronat dessine une entreprise plus consensuelle

L'Institut de l'entreprise, un cercle de réflexion qui regroupe de nombreux grands patrons, vient de publier ses recommandations pour construire l'entreprise "de l'après-crise". Quatre grandes thématiques ont été abordées : la relation avec l'Etat, la cohésion sociale, le rôle de l'encadrement intermédiaire et la meilleure prise en compte du long terme. Principes et propositions concrètes pour adapter l'entreprise aux enjeux de 2020.

Crise oblige, l'entreprise change. La performance, boursière ou individuelle, qui a dominé ces vingt dernières années la culture de l'entreprise, s'efface, du moins dans le discours, au profit de valeurs plus traditionnelles, comme celle des compétences, de l'action collective, d'une vision à long terme ou le respect des parties prenantes dans le projet d'entreprise. L'Institut de l'entreprise, un "think tank" patronal présidé par Michel Pébereau, a ainsi tenté de tracer les contours de l'entreprise "new look" au terme d'une réflexion entamée en juin 2008 et dont les principales conclusions ont été présentées hier autour de quatre thématiques. La première, sans doute celle qui a fait couler le plus d'encre, aborde le "grand retour" de l'État dans les affaires économiques. Un retour qui doit être "nuancé", rappelle Philippe Carli, président de Siemens France, en l'absence de réelle doctrine interventionniste ou de marges budgétaires.

Mais la crise a révélé la nécessité pour les deux parties de partager une "vision commune" sur des enjeux de long terme, ce qui suppose un respect mutuel. À l'État de sécuriser l'environnement de l'entreprise et à l'entreprise de s'engager dans les débats publics du type "Grenelle" ou "états généraux". Le social est évidemment au coeur des préoccupations. Pour Jean-Paul Bailly, PDG de La Poste, si l'entreprise est "un lieu naturel de cohésion sociale", les relations de travail se sont pourtant dégradées à l'aune d'une promesse de sécurité qui a désormais disparu. "Il faut gérer la discontinuité de l'emploi par la continuité du parcours professionnel", souligne ainsi ce dirigeant d'un établissement public. C'est l'axe de la formation professionnelle, talon d'Achille de notre pays, avec un souhait désormais clairement exprimé par les entreprises de se réapproprier ce volet des ressources humaines, longtemps délégué à des officines externes.

Autre souci manifesté par l'Institut de l'entreprise : la nécessité de réhabiliter l'encadrement intermédiaire. La fonction est dévalorisée, noyée dans les nouvelles organisations matricielles, alors même, note Pierre Mongin, président de la RATP, qu'on leur demande d'être des meneurs charismatiques, performants et pointus. Il serait donc grand temps que les directions et surtout les DRH se penchent sur une population au mieux ignorée, mais qui pourtant constitue un rouage essentiel, notamment pour les remontées d'informations du terrain au sommet.

La place, le rôle, l'importance du salarié sont autant de sujets remis au goût du jour, avec une floraison de propositions ? un vrai programme pour DRH ? sur les formations diplômantes, la quête de sens, le dialogue social élargi aux ONG ou à des enjeux de moyen terme.

Corollaire de toutes ces réflexions, la nécessité de rééquilibrer les logiques financières de court terme au profit de logiques d'entreprise de long terme. Avec des propositions qui peuvent surprendre, comme la réhabilitation du droit de vote double ? gage d'une plus grande stabilité de l'actionnariat, selon Serge Weinberg, et la limitation à trois mandats d'administrateurs pour les dirigeants exécutifs. L'Institut de l'entreprise ne plaide pas pour la rupture, mais bien pour une révolution tranquille au sein même des entreprises.

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