Place à "l'intrapreneur innovant" !

Par Vincent Prolongeau, directeur général de PepsiCo France et président d'Entreprise et Progrès.
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Force est de constater que les entreprises françaises sont pour la plupart encore organisées autour d'un modèle issu des Trente Glorieuses : hiérarchique, directif, en un mot monolithique. Au nom des sacro-saintes règles d'économies d'échelle et de spécialisation sur le coeur de métier, tout est normé, formaté. Dans un monde qui a totalement changé depuis cinquante ans, notre survie, face à la concurrence des pays émergents et nouvellement émergés, dépend cependant de tout autre chose. Elle se résume à notre capacité d'innover. Mais comment faire pour innover plus et mieux ? La crise pourrait au moins avoir cette vertu de mettre en lumière un défaut d'imagination, une certaine sclérose dans un management qui se veut moderne et actuel.

Ainsi, cette imagination nécessaire à l'entreprise passe impérativement par la promotion de la pluralité. Pluralité à tous les étages : diversité des hommes et des femmes bien sûr, mais aussi variété des modes opératoires, pluralité des modes de valorisation des entreprises.

Avec l'explosion des technologies de l'information, les individus ont aujourd'hui un fort désir de liberté, d'engagement et de participation. Les nouveaux réseaux sociaux sont des modes de relations humaines que l'entreprise ne peut plus ignorer. Le management "pyramidal" est court-circuité par "le réseau". L'autonomie dans l'entreprise est encore sous surveillance et la liberté fait encore peur. Pourtant la créativité et l'innovation naîtront de la pluralité des idées, des formations, des modes de penser, des loisirs et des valeurs. Il faut en finir avec la pensée clanique dans l'entreprise et les comités exécutifs clonés. Cela implique une diversité dans les recrutements, dans les critères d'évaluation, dans les parcours de vie et les cursus professionnels.

Pluralité dans les modes opératoires en privilégiant et organisant la subsidiarité. Laissons aux robots la répétitivité des gestes et redonnons à chacun l'intelligence de l'anticipation. Il y a cent manières d'atteindre un seul et même but. Peu importe par où passe le mail, il suffit qu'il arrive à son destinataire en quelques secondes. Laissons à chacun le talent de mettre en oeuvre ses qualités personnelles et de s'organiser, seul, en groupe ou en réseau pour atteindre l'objectif. Le manager qui domine doit aujourd'hui faire place à "l'intrapreneur innovant". De l'autorité formelle on doit passer à l'autorité de compétence et de facilitateur.

Pour que l'entreprise puisse être une machine à innover, l'évaluation de son action et donc l'évaluation de ses actifs et de ses indices de performance doivent aussi être plurielles. L'entreprise n'est plus uniquement jugée sur ce qu'elle produit mais aussi sur son empreinte sociétale et environnementale. La direction est écartelée aujourd'hui entre les exigences du marché financier, celles de ses clients et celles de tous les intervenants, les salariés en premier. Or les critères d'évaluation ne sont aujourd'hui que financiers. Changeons cela, en distinguant par exemple, la valeur endogène de l'entreprise de sa valeur exogène. Diversifions les modes de gestion du capital en favorisant les investisseurs à long terme et en développant la notion d'engagement. L'attitude de certains spéculateurs est digne d'un délit d'abus de biens financiers. Afin de mettre un terme à cela, la gestion de la maison entreprise ne doit plus être uniquement entre les mains des actionnaires mais gérée dans un esprit de copropriété. Cela implique une pluralité de critères pour évaluer la performance de la direction et de l'encadrement et un partage des résultats en développant notamment l'actionnariat salarié.

L'ensemble de ces propositions ne pourront être mises en oeuvre qu'à deux conditions : une volonté politique, pour encourager l'actionnariat à long terme, et une volonté entrepreneuriale. Entreprise et Progrès appelle dès aujourd'hui tous les chefs d'entreprise à prendre l'initiative pour faire oeuvre d'innovation en repensant l'entreprise du XXIe siècle, compétitivité internationale oblige !

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Commentaire 1
à écrit le 03/12/2010 à 8:28
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Bien vu! C'est exactement le style de management que je pratique depuis longtemps, issu, du simple bon sens. Certains de mes patrons ne l'ont jamais compris, et souvent critiqué, mais devant les résultats obtenus...

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