Evitons la caricature à propos de l'Irlande

Par Gary Fallon, directeur à Paris d'Enterprise Ireland, agence de développement irlandaise.
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De nombreux commentateurs français ont accusé l'Irlande de "dumping fiscal" pour son impôt sur les sociétés. Or ce taux d'imposition fait partie d'un large éventail de mesures qui ont permis à l'Irlande de devenir un lieu attractif pour les investissements étrangers : une main-d'oeuvre jeune et talentueuse, un environnement favorable aux affaires, un secteur dynamique pour la recherche et développement (R & D) et l'innovation ainsi que le fort soutien du gouvernement à la coopération entre l'industrie et les universités. Bien que l'Irlande ne dispose pas du plus bas taux d'imposition sur les sociétés en Europe (la Chypre et la Bulgarie ont un taux nominal plus bas), elle bénéficie peut-être du système le plus simple et le plus transparent, une caractéristique très appréciée des investisseurs.

Il est impératif de souligner la différence entre les taux nominaux de l'impôt sur les sociétés et les taux effectifs appliqués. Des recherches récentes menées par la Banque mondiale et PwC ont montré que si le taux nominal de l'impôt en Irlande est certes de 12,5%, nous avons supprimé presque tous les abattements, ce qui ramène le taux effectif à plus de 11%. A titre de comparaison, le taux nominal français de 33% bénéficie d'une myriade d'exemptions et de crédits d'impôts pour les entreprises. Le taux effectif en France est ainsi ramené, selon cette étude, à 8,2%. Le débat sur cette question doit donc être plus honnête et éviter la caricature et la démagogie. Dans l'Hexagone, les Irlandais sont notamment connus pour leur "fighting spirit". Nous avons agi avec détermination pour régler les problèmes qui nous ont conduits à la récente récession.

Après une croissance saine et soutenue à la fin des années 1990 et 2000, l'Irlande a en effet connu un très fort déclin économique en 2008 et 2009. La crise qui a frappé le pays a débuté de façon assez classique par une bulle immobilière devenue incontrôlable suite à la vaste offre de crédit du secteur bancaire trop peu régulé, alimenté à son tour par des banques européennes et internationales.

Le Plan national de relance, conjugué au programme de l'Union européenne et du Fonds monétaire international (FMI), est mis en oeuvre par un gouvernement de coalition, récemment élu, rassemblant les deux plus grands partis et disposant ainsi d'un mandat fort. Ce plan fournit une feuille de route claire permettant un assainissement des finances publiques, la recapitalisation des banques et des réformes structurelles, essentielles pour un retour à une croissance économique durable.

Depuis 2008, des mesures fiscales ont été prises pour dégager des recettes annuelles d'environ 8,25 milliards d'euros (environ 5% du PIB). Cela représente en moyenne un alourdissement de 4.500 euros par an du poids de l'impôt pour chaque salarié irlandais. La pression fiscale continuera à croître dans les prochaines années. En outre, des réductions de salaire de 15% en moyenne ont été acceptées à tous les niveaux du secteur public.

L'économie irlandaise s'est maintenant stabilisée et presque tous les analystes s'attendent à un retour de la croissance en 2011. Pour notre économie ouverte, le succès de nos exportations est fondamental pour la reprise économique. Un fort rebond de ces exportations, depuis la récession de 2009, est déjà manifeste. Ce n'est pas seulement dû aux multinationales installées dans le pays : les entreprises irlandaises connaissent une croissance continue à l'exportation depuis vingt mois consécutifs. Leur export s'est élevé à 13,7 milliards pour 2010. A la fin de 2011, nous prévoyons que les exportations dépasseront leur niveau antérieur à la récession. Une grande partie de ce succès peut être attribuée à une meilleure compétitivité grâce à des coûts de production et une productivité ramenés à leur niveau de 2002.

Le paysage industriel diversifié que nous avons mis plusieurs années à bâtir est intact. De plus en plus d'entreprises irlandaises investissent comme jamais en R&D. Même en 2009, la pire année de récession de notre histoire, ces investissements R&D ont augmenté de 2%. L'innovation irlandaise est présente jusqu'au bout du monde : Ainsi, quand vous prenez le métro à Paris, les informations qui s'affichent en temps réel sur le réseau sont fournies par la filiale française de la société irlandaise Data Display. Un nombre très élevé d'entreprises voit le jour chaque année en Irlande, le pays bénéficiant d'une forte culture entrepreneuriale. Les structures mises en place pour aider les créations d'entreprises sont parmi les plus performantes au monde. Le gouvernement irlandais, à travers son organisme Enterprise Ireland, est maintenant le plus grand capital-risqueur en Europe en nombre d'investissements réalisés.

Les ingrédients de notre formidable croissance économique d'avant la crise restent intacts. Nous sommes persuadés que, dans quelques années, les médias français parleront "du retour en force de l'économie irlandaise ou de comment l'Irlande prend sa revanche".

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