Nyse Euronext-Deutsche Börse : plus d'Europe !

Par Christian Poyau, PDG de Micropole et président de la Fondation Croissance responsable.
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Tout un symbole ! Il y a quelques semaines, l'annonce surprise d'un rapprochement possible entre Nyse Euronext et Deutsche Börse soulevait de multiples réactions dont certaines particulièrement hostiles. Que dire aujourd'hui du projet de contre-offre de Nasdaq-ICE ?

Rappelons que ces mêmes milieux, opposés à la prise de participation majoritaire de Deutsche Börse, étaient restés de marbre au moment de l'OPA de la Bourse de New York sur Euronext. Les responsables de la place de marché française avaient alors préféré se jeter dans les bras du Nyse. Superbe réussite : toutes les places régionales ont fermé rapidement, et les courriers d'Euronext sont écrits dans la langue de Shakespeare !

On peut certes avec le recul déplorer l'absence historique d'un soutien franc et massif des banques françaises à la société chargée de gérer la Bourse française. N'ont-elles pas déserté le capital d'Euronext dès qu'elles l'ont pu ? Il est trop tard pour refaire l'histoire. Seul le résultat s'impose. Quels que soient les appels à la vigilance de certains, notre place financière hexagonale est devenue une place de deuxième niveau.

Avec quatre ans de recul, il est légitime de se poser la question des bénéfices acquis par la place de Paris dont l'influence déclinante depuis les vingt dernières années ne cesse d'inquiéter ses acteurs. Si tant de banques, françaises ou étrangères et de fonds d'investissement sont partis s'installer à Londres, c'est parce que les autorités britanniques, notamment par des mesures sociales et fiscales attractives, ont donné de véritables atouts compétitifs à la City, la confortant au rang de première place financière internationale.

A l'heure de la globalisation des marchés et de l'émergence de places financières puissantes aux quatre coins du monde, il serait temps de s'en inspirer pour Paris. L'annonce de cette prise de participation majoritaire par Deutsche Börse dans Nyse Euronext offre donc une chance à la place de Paris de récupérer un peu d'influence sur l'échiquier mondial des marchés. Ne rêvons cependant pas : nos partenaires allemands ne vont pas nous ouvrir spontanément les portes. On peut toutefois espérer une convergence globale des intérêts plus forte entre Européens, surtout dans la logique actuelle de convergence des politiques économiques, qu'avec nos amis américains. À nous de nous mobiliser pour faire valoir notre point de vue et pour rendre la place de Paris réellement attractive.

Sans doute, appartenir à un ensemble plus vaste, plus international et plus puissant est une chance à ne pas négliger. Toutes les raisons sont bonnes pour justifier ce nouveau rapprochement. La dématérialisation des échanges, les progrès informatiques, la déréglementation et la concurrence exacerbée de nouvelles Bourses privées ne donnent pas d'autre choix aux Bourses historiques que celui de se rapprocher. C'est la condition pour rester compétitives et pour élargir leurs activités à de nouveaux segments de marché. Le dynamisme d'une place financière est primordial pour le développement de l'économie en général. Moins de flux financiers, moins d'investisseurs, moins de transactions, c'est le risque de voir les entreprises se poser la question de savoir où coter leurs actions et derrière elle où localiser leur siège, leur état-major, leur matière grise, leur recherche-développement... et aussi où payer son impôt ! Moins d'introductions en Bourse, c'est la limitation de la sortie par le haut des fonds d'investissement et des « business angels » qui tirent le développement des sociétés de croissance innovantes !

A l'heure du grand basculement du centre de gravité de l'économie mondiale vers l'Asie, l'enjeu de la compétitivité française, et plus largement européenne, est une priorité absolue. Enjeu stratégique, industriel, de connaissance et de savoir. Cela passe aussi par la capacité de former des étudiants pour occuper chez nous des emplois à forte valeur ajoutée. Par la nécessité de rendre le pays plus attractif pour les investisseurs. Par la capacité donnée à nos industriels d'être plus compétitifs pour produire sur place et vendre aux nouveaux consommateurs des pays émergents. Cela passe aussi par notre volonté de demeurer une place de marché reconnue et sophistiquée capable d'alimenter en carburant financier nos entreprises en développement. Et enfin, par une plus grande ouverture des mentalités au monde qui nous entoure.

L'offre de Deutsche Börse sur Nyse Euronext permet de replacer le barycentre des décisions à nouveau en Europe et nous donne une chance de redynamiser la place de Paris ! Ne laissons pas, entreprises, banques, investisseurs et responsables politiques, passer cette chance d'un projet commun avec nos amis allemands.

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