Luther, 500 ans après

Sur la modernité de ce précurseur, notamment de la communication de masse. Par Pierre-Yves Cossé, ancien commissaire au Plan

Les Français connaissent peu Luther, à l'exception de nos luthériens d'Alsace. Ils en ont une représentation floue et peu séduisante, celle de nos livres d'histoire : le visage bouffi au double menton d'un grand consommateur de bière, qui fait penser à Rabelais. Un prophète peut-être mais surtout un moine du moyen-âge, fréquentant le diable et les anges, colérique, intolérant, injuriant l'adversaire et enfermé dans sa Saxe natale.

 Cinq-cents ans après l'affichage sur le portail de l'église de Wittenberg des 95 thèses du moine augustin, qui marque le début de ce que les Allemands appellent la « Réformation », il est temps que les Français corrigent cette image superficielle et inexacte. Il suffit de se rendre en Allemagne, particulièrement dans la région où il a vécu, et de parcourir quelques uns de ses innombrables écrits pour prendre conscience de sa modernité.

 La modernité de Luther

Alors que l'Etat allemand n'existe pas et que l'Allemagne est divisée en plusieurs centaines de principautés, Luther se définit comme allemand et entend le rester. Le réformateur veut protéger la « nation allemande » contre les « loups ravisseurs » c'est à dire Rome et les Italiens. Les « bénéfices du pouvoir tyrannique romain doivent être réintégrés dans la nation allemande ».  Il dénonce le « trou » par où l'or et l'argent s'écoule hors d'Allemagne. La dénonciation par cet allemand, bourreau de travail, qui a écrit et prêché jusqu'à ses derniers jours, de ces Romains oisifs gaspillant de l'argent non gagné dans le luxe et le stupre n'a-t-elle pas une résonance actuelle ?

Une foi axée sur la liberté du croyant et sa libération par rapport aux appareils institutionnels ne correspond- elle pas à la sensibilité moderne ? Dans son plus beau texte « De la liberté du chrétien » il énonce que « le chrétien est un libre seigneur sur toutes choses et qu'il n'est soumis à personne ».  Certes, il s'agit de l'homme spirituel intérieur et non de l'homme corporel qui est esclave, ce que ne comprirent pas les paysans allemands en révolte contre leurs seigneurs.

Approche individualiste du croyant qui, à partir d'une lecture personnelle de la bible, s'adresse directement à son dieu et n'a à répondre devant aucune hiérarchie. Nous sommes tous « prêtres, ce qui est bien davantage que d'être rois, car le sacerdoce nous rend dignes de nous présenter devant Dieu et de prier pour les autres ». Conséquence de cette affirmation : une forte réduction du nombre des ecclésiastiques, dont les moines et les bonnes sœurs, d'autant qu'il est opposé aux vœux perpétuels.

Les musulmans vivant en terre non musulmane, qui ne peuvent s'appuyer sur une hiérarchie et fondent également leur foi sur le livre de la révélation sont intéressés par cette façon de vivre sa religion.

Son esprit de réforme s'étend aux études supérieures et à l'université, où il veut développer l'enseignement du grec. L'université de Wittenberg, où il était professeur, était réputée et attirait des étudiants de toute l'Europe.

Enfin, il a été un précurseur dans la communication de masse et le recours aux techniques les plus modernes. Il a traduit avec son équipe le Nouveau et l'Ancien Testament, à partir du grec et de l'hébreu (c'est une première) dans un allemand qui s'est imposé par rapport aux autres dialectes. Il a utilisé les possibilités nouvelles offertes par l'imprimerie de Gutenberg, avec l'aide de Cranach l'ancien qui fut non seulement un grand peintre mais aussi un homme d'affaires possesseur d'une imprimerie. Son enseignement fut ainsi diffusé en quelques semaines à travers toute l'Allemagne.

Le grand homme de l'Allemagne

En 2017, de nombreuses cérémonies sont prévues, de nouveaux livres sur Luther paraissent chaque semaine et des flots de touristes et pèlerins sont annoncés sur les lieux où le réformateur a vécu et prêché. Ce n'est pas seulement affaire de mode et de publicité, les liens des Allemands avec Luther étant étroits et multiples. Il est au cœur de l'identité allemande.

D'abord, Luther est le héros de l'histoire allemande, un grand patriote. A un moment où l'État allemand n'existait pas, il défend les intérêts allemands contre l'étranger. Avec Napoléon, le nationalisme allemand prend un essor nouveau et ne cesse de croître dans la Prusse des Hohenzollern, devenue l'empire allemand, qui prône l'alliance « du trône et de l'autel. Le culte du héro grandit parallèlement. De nombreuses statues sont érigées sur les places publiques, des musées sont ouverts.

Hitler récupère Luther en valorisant les propos extrémistes tenus contre les juifs (mettre le feu aux maisons, écoles et synagogues...) par le réformateur, dont les efforts de conversion ont échoué. L'auteur de « la solution finale » reçoit l'appui d'une partie minoritaire de l'Eglise évangélique. Il ne semble pas que la République démocratique allemande se soit attaquée directement à Luther, mais elle laisse se dégrader églises et autre lieux historiques. Depuis 1990, un énorme effort de remise en état a été accompli dans ces petites villes du centre de l'Allemagne. Même si elles ont relativement peu souffert des bombardements, les travaux ont coûté très cher (les habitants se plaignent plutôt plus des dégâts commis par les troupes napoléoniennes que des bombardements aériens) Certes, l'Eglise Evangélique allemande est très riche, mais d'autres contributions ont été nécessaires : villes, land, Bund, Europe, la séparation entre l'Eglise et l'Etat n'étant pas aussi stricte qu'en France. Et les pasteurs tiennent une place importante dans la société : le père de la chancelière était pasteur, de même que le président de la république sortant.

Les Allemands ne célèbrent pas seulement le patriote mais aussi le musicien. Luther estimait que la musique est « un cadeau de Dieu, qu'elle chasse le diable et qu'elle donne de la joie innocente » Il jouait de la flûte traversière et du luth. Il a écrit des cantiques tirés des Ecritures et a même composé une douzaine de mélodies. Un siècle plus tard, Jean Sébastien Bach, luthérien intransigeant, donnait une dimension nouvelle à cette musique avec ses cantates reprenant parfois les textes de Luther. Et ce sont toujours ces cantiques qui sont chantés chaque dimanche dans les églises réformées, en Allemagne et ailleurs.

On peut aussi considérer que Luther est le père de la langue allemande moderne. C'est « son » allemand, celui de la traduction de l'Ancien et du Nouveau Testament, qui s'est progressivement imposé grâce à l'imprimerie.

 Luther sur les lieux où il a vécu

 Depuis 2010, l'ex-RDA s'est transformée. Beaucoup d'équipements sont neufs, comme les autoroutes, et les bouchons sont rares. Dans les villes, les rénovations et restaurations sont presque achevées. Les maisons baroques ont été repeintes et les teintes pastel flattent le regard. Sauf à Erfurt, la circulation dans les centres historiques est modérée. Est- ce l'effet des fermetures d'usines jugées obsolètes dans un système capitaliste et du départ de jeunes vers l'ouest à la recherche d'un emploi ?

De nombreux musées ont été rénovés ou crées. Beaucoup de musées anciens ont été agrandis et la combinaison, souvent audacieuse entre l'ancien et le moderne, est presque toujours une réussite. Ils ont parfois été déplacés par rapport aux lieux historiques d'origine, lorsqu'ils ont été transformés. Pas de pastiche mais des matériaux et des formes modernes. Plus d'audace qu'en France. Les collections sont inégales, des tableaux d'époque côtoient des copies anciennes et modernes, des photographies et autres documents. La muséographie peut être comparée à celle des grands musées, les explications sont claires et traduites en anglais, ce qui n'est pas le cas des églises. Le touriste étranger est encore une espèce rare. Les guides sont généralement de bonne qualité et la nourriture s'est occidentalisée.

Les églises, souvent baroques, sont très nombreuses, en majorité luthériennes. Leur contenu a été généralement conservé. Mais la déchristianisation serait très avancée : 75% ?

Début Avril, la campagne est verte et les arbustes, dont beaucoup de magnolias aux fleurs roses épanouies roses.

 EISLEBEN/ Saxe Anhalt/ 2500 habitants

  Tout a commencé (1484) et s'est terminé dans cette petite ville pentue et traversée par des ruisseaux. Une statue imposante du Réformateur vous accueille sur la Markplatz, à côté de l'église Saint Pierre et Saint Paul où il fut baptisé le lendemain se sa naissance. prêcha pour la dernière fois, quelques jours avant sa mort, en 1546. C'est un exemple de juxtaposition d'ancien et de moderne : tryptique renaissance, orgues arts déco, sol moderne, fonds baptismaux à même le sol de forme circulaire chauffables, où l'on peut pratiquer le baptême par immersion. L'intérêt pratique n'est pas évident, les luthériens étant des adversaires des anabaptistes.

Au Moyen-âge, la ville tirait sa richesse de l'exploitation de mines de cuivre, ce qui explique la présence du père de Martin, Hans Luder, non pas un pauvre mineur-contrairement à la légende- mais un petit fondeur qui gagnait honorablement sa vie.

Dans la Geburthaus, est présentée l'histoire économique de la ville, des mines et de la famille est présentée avec clarté et une maison familiale reconstituée. Dans la Sterbehaus (ce n'est pas la vraie maison) les derniers jours de Martin - qui revenait d'une mission de conciliation-nous sont contés. On a droit à tous les détails, agonie, confession, communion, obsèques, cercueil mais aussi et heureusement sont placardés de beaux extraits de lettres de Luther, à côté de quelques tableaux Renaissance. Je ne suis pas sûr que Luther ait apprécié cette présentation très...catholique, qui fait penser à un culte de reliques.

Mansfeld/ Saxe Anhalt/ A 10 km d'Eisleben/ 10 000 habitants

Ce fut la ville de résidence du Comte de Mansfeld, que Luther reconnaissait comme son seigneur. Le château a été reconstruit et abrite un centre d'éducation protestant.

Le père de Luther s'y est installé un an après la naissance de Martin, qui y vécut treize ans. L'école primaire, où il n'avait pas le droit de parler allemand, a disparu. En face, l'église Saint Georges (14è siècle) était fermée pour travaux.  Un musée moderne a été créé à côté de la maison familiale. Là aussi l'architecture moderne se marie heureusement avec l'ancien. La découverte en 2003 d'un gisement d'objets de la vie quotidienne constitue le fonds de la collection du musée, à côté de documents sur les mines et l'histoire des Comtes de Mansfeld. La vaisselle, les bijoux, les habits montrent que la famille Luther était aisée. Une guide avignonnaise, attirée par l'amour dans cette ville à priori sans attraits, séduit le touriste français par son accent ensoleillé et sa bonne volonté.

 ERFURT/Thuringe/200 000 habitants

 Hans, ambitieux pour son fils Martin, l'envoya dans une grande ville commerçante (20 000 h) Erfurt, pour faire ses études de droit à l'université (1501/1505) Sa déception fut grande, lorsqu'à la suite d'un orage en forêt et de visions, Luther renonça au droit et prit la tonsure au couvent des Augustins et après un noviciat rapide est ordonné prêtre (1507) L'année suivante, son supérieur et protecteur l'envoie à l'université de Wittenberg renommé par son esprit d'ouverture aux réformes poursuivre des études de théologie.

Si les Augustins ont disparu avec la Réforme, tout nouveau recrutement étant interdit, le couvent est toujours actif sous la responsabilité de l'église évangélique et se visite. A côté du cloitre et de l'église restaurée (vitraux) un bel édifice moderne a été construit. Des bibles anciennes sont exposées et la vie austère de ces moines qui faisaient vœu de pauvreté est décrite (cellules reconstituées) et des portraits de Luther exposés.

Parmi les dix sept églises, plusieurs gardent les souvenir des prêches de Luther, dont la grande cathédrale gothique, Notre Dame (vitraux, stalles, peinture baroque)

Erfurt devrait être familier aux Français. En 1806, la ville fut transformée en principauté rattachée directement à l'Empereur. Il était donc logique que Napoléon invite l'empereur de toutes les Russies pour des entretiens dans sa principauté (Septembre-Octobre 1808). A côté de réceptions fastueuses, des tragédies (Cinna) jouées par des acteurs célèbres, dont Talma, convoqués par Napoléon, furent donnés dans le Kaiser halle, qui existe toujours. Les entretiens, sabotés par Talleyrand, ne permirent pas un resserrement de l'alliance échouèrent et il y a longtemps que les jeunes Français n'apprennent plus cette page d'histoire.

La ville, occupée quelques mois par les troupes de Patton, a peu souffert des bombardements et a résisté aux tentatives de détruire les quartiers historiques du temps de la RDA. Rénovations et restaurations sont très avancées, la ville et les propriétaires ayant combiné leurs efforts.

Déambuler dans la ville, découvrir les maisons baroques et les petits jardins le long de la Gera est source de plaisir.

Wittenberg /Saxe-Anhalt/ 50 000 habitants

La Reformation est née à Wittenberg le 31 octobre1517, jour où les 95 thèses furent affichées. Luther a écrit, enseigné, prêché dans la ville résidentielle du prince, Frédéric le Sage, protecteur efficace et discret. Elle a été le centre d'un réseau, dont il était le chef, qui a irrigué l'Europe, appuyé par une équipe et des amis proches

La Schloss Kirche, où il a prêché douze fois, est une sorte de Panthéon de la Réforme. La tombe modeste en pierre, recouverte d'une plaque de bronze, est intacte. Charles Quint, après sa victoire de Müehlberg sur les princes réformés, résistant aux pressions de ses conseillers, a laissé reposer en paix l'hérétique. De nombreuses statues de ses compagnons ont été érigées à l'intérieur de l'Eglise au 19è siècle.

Pour aller à la Luterhaus, il suffit de suivre la rue principale, parallèle à l'Elbe, et de longer la Markplatz sans oublier de jeter un coup d'œil sur le beau Rathaus, que Cranach l'Ancien occupa à trois reprises et plus brièvement les troupes napoléoniennes. A l'origine, ce fut le couvent des Augustins, puis la maison de Luther où il vécut pendant trente cinq ans, y élevant avec son épouse Khatarina (Cathie) ses six enfants. Actuellement, c'est le musée du luthéranisme dans le monde (tableaux, manuscrits, maquettes, documents historiques) avec une partie ancienne et une partie moderne. Dans le jardin, la statue de Katarina, l'épouse chérie, était entourée de frangipaniers aux fleurs roses.

                   Si l'imprimerie a contribué au succès de Luther, la famille de Cranach, adepte du luthéranisme, y a autant contribué. Les portraits sensibles de Lucas, l'Ancien, ont fait connaître le pape de Wittenberg, sa famille et ses amis. Ses retables et autres tableaux religieux, parfois difficiles à interpréter pour un non-luthérien, ont facilité la compréhension de la doctrine. Son appui financier a été décisif. Cranach était non seulement un peintre recevant de nombreuses commandes, dont celles du Prince, mais un homme d'affaires engagé dans la promotion immobilière, la pharmacie, l'imprimerie et même un homme politique. De nombreux lieux témoignent dans la ville de cette activité multiforme (ateliers restaurés ou reconstitués), dont l'église Sainte Marie où sont accrochées d'intéressants Cranach (Luther dans le vignoble, Luther prêchant)

La maison de l'ami proche et de l'intellectuel de la bande, le fluet Melanchthon, se visite également (manuscrits, lettres, bibles) ; méconnu des Français, ce théologien polyglotte, qui connaissait le grec et l'hébreu mieux que Luther fut l'ambassadeur de la Réforme, entretenant des   relations avec les plus grands esprits de l'époque, dont Erasme, même après la brouille avec Luther.

Wartburg et Eisenach/Thuringe/ 40 000 habitants

En dépit du sauf-conduit qu'avait obtenu son protecteur Frédéric le Sage, la vie de Luther était menacée suite à son refus de se rétracter devant Charles le Quint. Au retour de Worms. Frédéric le fit enlever pour le cacher (1521/22) dans un château, juché au haut d'une colline et surplombant la ville. Impressionnant de loin et considéré « comme un monument exceptionnel de la période féodale en Europe Centrale » quoiqu'il il ne reste plus grand-chose de la période romane. Remanié à plusieurs reprises, il fait penser aux décors moyenâgeux des opéras wagnériens : fresques 19 ème, scènes de chasse. Le lieu le plus émouvant est la cellule où Luther aurait travaillé d'arrache pied, écrivant des ouvrages de première importance et traduisant en quelques semaines le Nouveau Testament, qu'il avait appris par cœur.

Le Château est néanmoins très populaire, car il évoque plusieurs moments de l'histoire allemande, dont une manifestation nationaliste dans la Festsaal de la corporation des étudiants d'Iéna en 1819.

Eisenach retient l'attention du touriste par sa belle église baroque, Saint Georges, où Bach fut baptisé et où Luther prêcha. Son intérieur est très riche : pierres tombales des landgraves de Thuringe, chaire et peintures baroques.

La maison où Jean- Sébastien Bach passa ses quinze premières années (1685/95) a été transformée en musée et complétée par une partie moderne. Lors de la visite, un jeune homme joue de différents instruments de musique anciens, dont le musée a une riche collection. Et à l'étage, l'on peut entendre de longs extraits de la musique de Bach, dont des cantates reprises de textes écrits par Luther. C'est un moment de grâce pour le visiteur.

Weimar/ Thuringe/ 63 000 habitants

 Le passé historique de Weimar est particulièrement riche. La plupart des grands hommes de l'Allemagne du 19e, de Goethe (sa maison se visite) à Nietzsche ou Wagner. C'est le lieu de grands évènements, qui ont marqué l'histoire de l'Allemagne : République, Bauhaus ...et camp de Buchenwald.

Luther est présent dan l'église Saint Pierre et Saint Paul par un très beau tryptique de Cranach illustrant une de ses prédications (le manteau rouge du ressuscité qui semble s'envoler est une merveille) et par les prêches qu'il y a donnés

Le musée, installé dans le château baroque, transformé dans le style néoclassique suivant les préconisations de Goethe, présente des collections d'inégal intérêt : quelques portraits de Cranach, un cabinet de curiosités, des salons de réception meublés et même quelques tableaux français (Manguin, Monnet)

Magdebourg/capitale de la Saxe Anhalt/ 230 000 habitants

Cette belle et grande ville a, elle, été partiellement détruite par les bombardements. La reconstruction, quasiment achevée, a laissé libre de grands espaces, qui ont permis d'aménager un musée de sculptures modernes dans un jardin et de mettre en valeur les églises anciennes, dont Saint Maurice et Sainte Catherine, la première cathédrale gothique d'Allemagne mais aussi la plus vaste et la plus haute, avec ses deux tours. Elle est extrêmement riche en œuvres d'art : jubé, chaire de Saint Paul, stalles en bois, statues, tableaux, tombeaux aux plaques de bronze.

Des immeubles modernes, à l'architecture audacieuse, inspirés par le Bauhaus, côtoient les églises gothiques.

Martin venu de Wittenberg (1524) a prêché dans Saint Maurice, ralliant à la Réforme bourgeois et peuple.

Frankenhausen

Il existe bien d'autres étapes sur ce que les Allemands appellent le «  Luther Weg »-plus de 2000km- comme celles de Leipzig ou de Mayence. Mais n'apparait nulle part le nom de Frankenhausen, où s'est déroulé une bataille sanglante en 1525 (6000 morts) qui marqua la fin de la guerre des paysans (plusieurs dizaines de milliers de morts) Son chef, Thomas Münzer, qui voulait instaurer l'état de Dieu sue terre, fut fait prisonnier et pendu quelques jours plus tard. A son sujet, Luther écrivit : « J'ai tué Müntzer, j'ai sa mort sur le dos. Mais je l'ai fait parce qu'il voulait tuer mon Christ »

Frankenhausen est le seul lieu de l'histoire de la Reformation qui porte la marque de la RDA. Visible de loin, au haut d'une butte, a été construit dans les années 50 le Panorama Museum, un bâtiment cylindrique en béton, une sorte de « chapelle Sixtine » dit le guide. A la demande des autorités de la RDA, Werner Tûbke, un peintre officiel, a travaillé pendant dix ans avec toute une équipe à la réalisation d'une immense fresque circulaire de 123 mètres et 14 mètres de haut sur le thème de la guerre des paysans. En fait, le thème est plus universel et couvre la condition humaine, sous la forme d'une ronde de 3000 personnages. Les références à la peinture germanique sont évidentes : Grünewald, Bosch. Il faut du temps pour appréhender l'ensemble et vous ressortez au bout de quarante-cinq minutes, impressionné par de nombreuses scènes, sans avoir saisi tous les motifs.

A l'étage en dessous, Markus Krüger expose des paysages allemands à la fois calmes et inquiétants : un arbre qui brûle, une ombre immense, un porche qui ne débouche sur rien. Ce réalisme magique est reposant après le tourbillon de Tübke.

Pierre-Yves Cossé

Avril 2017

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Commentaire 1
à écrit le 14/04/2017 à 20:36
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Les Français connaissent peu Luther !? Ah, bon ! Il est vrai que je suis un Français un peu spécial, avec un grand-père Anglais anglican et son épouse Ecossaise Presbytérienne, un autre grand-père Lorrain et son épouse Catalane, tous deux Catholiques...

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