Marion Moreau, la passionaria de la Sigfox Foundation

La Sigfox Fondation vise à mettre l'Internet des objets au service de l'humanitaire. Pionnière du Web, sa directrice dispose d'un beau carnet d'adresses et d'une énergie contagieuse.
Marion Moreau, Sigfox Foundation.

Marion Moreau souhaite : voyager, rencontrer des gens, protéger les animaux, lutter contre les maladies infantiles, aider les ados des quartiers défavorisés, faire une découverte scientifique majeure, et rendre heureuse sa famille. Le tout bien sûr en restant humble, « car la gloire dénature les humains ».

À 40 ans, l'ancienne rédactrice en chef de FrenchWeb ne rêve pas, elle réalise.

« Quand on me dit que ce n'est pas possible, c'est comme si on me disait "cap ou pas cap ?" J'aime les challenges. »

Son goût pour le changement et son appétit de rencontres l'ont propulsée l'année dernière à la direction de la toute nouvelle Sigfox Foundation. Pas un hasard, « mais beaucoup de chance », assure la jeune femme. Et aussi, probablement, le talent : celui de sentir l'air du temps, de flairer la prochaine révolution, d'être, tout simplement, en avance.

Quand le web était encore "1.0"

En 1997, Marion Moreau a 20 ans, et pour financer ses études (elle prépare alors le concours du CFJ, une école de journalisme parisienne), elle est chargée de la hotline à Club Internet. Au bout du fil, elle explique aux abonnés comment se connecter au Web : c'est le frémissement d'Internet, l'entreprise est une petite startup.

« Nous étions à peine une dizaine et nous étions au début de quelque chose, nous étions pionniers, ce n'est pas un gros mot. Je voyais très bien où on allait, on a tout de suite compris qu'on vivait une révolution et que tout allait changer : nos modes de consommation et notre manière d'interagir entre individus. C'était extraordinaire et passionnant. »

Elle rencontre à ce moment-là un ami et mentor qui ne la quittera plus : Richard Menneveux, qui fondera plus tard FrenchWeb.

« Elle a le goût du travail et la passion des gens. Rien n'est impossible pour elle », dit-il.

C'est un événement tragique qui la pousse à quitter la société, trois ans plus tard : son père, médecin, meurt renversé par une voiture sur un boulevard parisien, à 51 ans. Un énorme choc pour la jeune femme qui veut alors « réinventer sa vie, et voir autre chose ».

TV5, BFM, Capital.fr... la journaliste travaille alors durant plusieurs années comme indépendante avant de rejoindre son ami Richard Menneveux, à FrenchWeb. Elle y consolide son carnet d'adresses, et confirme son penchant pour les entrepreneurs du numérique.

« L'entrepreneuriat est un vrai sacerdoce. Je suis assez en colère contre la pensée unique selon laquelle tout le monde peut devenir entrepreneur. La vérité, c'est que l'entrepreneuriat, c'est aussi manger des pâtes pendant des années, c'est beaucoup de sacrifices. On compte pas mal de séparations et de divorces. C'est comme aux parents auxquels on dit "C'est ton premier bébé ? Tu vas voir, ça va être formidable, tu vas vivre quelque chose d'extraordinaire." La vérité, c'est que tu vas aussi passer des nuits blanches, verser des larmes, vivre des moments de solitude et de doute... et ce n'est pas mauvais de le dire. »

Autre sujet qui irrite la spécialiste du digital : la sacro-sainte French Tech.

« La French Tech a réussi à être un label. Sur le volet "construisons une marque", c'est une réussite. Mais qui incarne les écosystèmes ? Il y a aujourd'hui des mentors qui se permettent de conseiller des centaines de jeunes et qui prennent des points de capital dans les startups, alors qu'eux-mêmes sont loin d'être "clean". Certains ont planté des entreprises et sont partis avec la caisse. C'est grave, car cela porte tort à tous ceux qui ont une démarche honnête. Il faudrait faire un ménage très sérieux dans la French Tech. La startup, ça fait plaisir, c'est à la mode. Mais on parle d'une entreprise, de gens qui vont être embauchés, de gens qui vont prendre des risques, de gens qui ont eux-mêmes des familles. On ne s'improvise pas mentor de startup comme ça ».

Ni de gauche, ni de droite

« De nos jours et parmi la communauté du numérique, la couleur politique ne dit rien », assume-t-elle, tout en avouant son faible pour Emmanuel Macron : « C'est un homme adulé par les patrons du Web, il le sait, il est très proche de la communauté des entrepreneurs du digital. Il sait qu'ils représentent le prochain Medef en termes de puissance de lobbyisme et de force économique et sociétale. Je le trouve intéressant car ouvert au changement. »

C'est lors d'une interview réalisée à l'occasion du Mobile World Congress, il y a deux ans, que le Toulousain Ludovic Le Moan, patron de Sigfox, propose à Marion Moreau de prendre la direction de la Sigfox Foundation.

« J'étais alignée avec Ludovic sur le fait d'être ambitieux avec la fondation, comme on l'est sur Sigfox. On ne fait pas de petit projet, on ne sauve pas un arbre, mais toute la forêt. »

Deux premiers projets se sont concrétisés à la fin de 2015 : une opération en Antarctique pour sécuriser une mission de 45 scientifiques grâce aux capteurs Sigfox, et plus récemment, une mission de sauvegarde des Rhinocéros au Zimbabwe, grâce à la géolocalisation. Aux manettes, Marion Moreau gère, dirige, convainc, mais elle n'a pas l'intention de laisser de côté son métier de journaliste :

« Je vais lancer un média radio itinérant, en podcast dans un premier temps, sur nos projets et missions. Je vais éditorialiser et réunir autour d'un micro des passionnés et des experts, des entrepreneurs et des technophiles, relayer des exploits, des performances que nous allons expérimenter grâce à l'Internet des objets ! »

La première émission portera sur un défi inédit lancé par Christophe Fourtet, le cofondateur de Sigfox : envoyer un signal qui va refléter la Lune et retomber sur la Terre, avec le concours d'un réseau de radio amateurs. « Incroyable, non ? »

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MODE D'EMPLOI

Où la rencontrer ? Entre Paris (les bureaux de la fondation) et Toulouse (le siège de Sigfox). « Je me rends au moins une fois par an à San Francisco. Cet été, je serai le 14 juillet aux Vieilles Charrues, où je coorganise le West Web Festival, et un concert des Enfoirés du web. »

Comment l'aborder ? Sur Twitter (@marion_moreau), ou à [email protected]) pour partager en plus de 140 caractères !

À éviter ! Des courriels très longs, et pas clairs...

TIME LINE

  • 1976 Naissance à Nantes, en août.
  • 1997 Job d'étudiante à Club Internet. Elle y restera trois ans.
  • 2011 Devient rédactrice en chef de FrenchWeb.
  • 2014 Coréalise le documentaire We Love Entrepreneurs (500.000 vues).
  • 2016 Va sauver le monde avec la Sigfox Foundation.

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Commentaires 3
à écrit le 14/04/2016 à 13:39
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"Ni de gauche, ni de droite" Généralement ceux qui clament cela sont de droite , c'est un peu comme les maires sans étiquettes.

à écrit le 14/04/2016 à 13:36
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"La vérité, c'est que l'entrepreneuriat, c'est aussi manger des pâtes pendant des années, c'est beaucoup de sacrifices". Même avec un père médecin ?

le 15/04/2016 à 0:17
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Vous doutez de rien. Le respect des gens, ça vous parle?

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