La crise européenne n'est pas finie

Le parlement européen va être composé d'une forte proportion d'élus ouvertement opposés à la construction actuelle de l'Union. La prochaine commission devra entendre ce scepticisme, effet de la crise plus que d'un rejet de l'Union.
Robert Jules

Quels enseignements tirer de ces élections européennes ? D'abord que la vague eurosceptique annoncée a bien eu lieu : en France - le FN arrive largement en tête -, au Danemark, au Royaume Uni, en Italie, en Autriche, en Hongrie, en Finlande et en Grèce. Même si des différences importantes existent entre eux, ces partis vont peser au sein du parlement. Pour autant, les partis traditionnels ne s'écroulent pas. Les conservateurs vont continuer à dominer la nouvelle assemblée et pouvoir imposer leur agenda.

Est-ce la fin de l'Union européenne ? Loin s'en faut car il faut rappeler qu'il s'agit des premières élections de la crise que traverse le continent depuis 2010. La meilleure illustration nous est donnée par l'électorat jadis europhile - Grèce, Portugal, Espagne, Irlande - qui a découvert un nouveau visage de l'UE, celui de la troïka et de l'austérité, en lieu et place des aides structurelles qui avaient tant fait pour moderniser ces pays là et manifester une réelle solidarité entre membres de l'Union. Dans ces pays, l'europhilie recule, mais pas partout avec la même force, ni avec la même cohérence.

Au nord aussi, on a rejeté une certaine Europe, celle de la redistribution. Mais si les euro-critiques progressent, les électeurs allemands savent que leur pays a beaucoup plus gagné avec l'Europe qu'il n'a perdu. Si le contribuable allemand rechigne à payer pour les cigales des autres pays, le citoyen qu'il est aussi ne veut pas casser un système qui bon an mal an lui sert bien.

Alors beaucoup de bruit pour rien ? Non, les dirigeants des pays membres de l'Europe qui ces dernières années ont surtout évalué l'Union européenne en terme de coûts et bénéfices sont en partie responsables de ce scepticisme dans leurs hésitations et maladresses à gérer la crise née en 2010.

Le citoyen européen s'est aperçu que cette unité de l'UE tant vantée s'était lézardée dès les premières difficultés d'un pays qui ne représentait pourtant que 3% du PIB de l'Europe. Surtout, ce citoyen européen a constaté que Bruxelles ne fournissait par rapidement de réponse claire et concrète à la hauteur de la situation. Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso - montrons-nous indulgents avec le président du conseil européen, Herman Van Rompuy, et la patronne de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, qui essuyaient les plâtres -, n'aura pas fait preuve d'une grande audace durant son deuxième mandat.

Alors qu'il a des pouvoirs étendus que lui confère la constitution, il s'est contenté de suivre la lettre et l'esprit de la politique décidée à Berlin. Les Européens ont en effet compris depuis longtemps que le pouvoir d'agir ou de bloquer se trouve à la Commission et non au parlement.

Aussi, Bruxelles qui n'a eu de cesse de recommander aux gouvernements et à leurs peuples de faire « des réformes structurelles » serait bien inspirée, face à ce nouveau parlement à la configuration inédite, d'appliquer à sa technostructure cette même recommandation. Cela permettra de réorienter la dérive bureaucratique dont la panne d'inspiration s'est fait durement ressentir durant cette crise. C'est cela le message des Européens que devra entendre la prochaine équipe de commissaires.

>> Retrouvez tous les résultats des élections européennes, pays par pays

Robert Jules

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Commentaires 14
à écrit le 03/06/2014 à 20:17
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l’Europe n'est faite ni pour les peuples ni par les peuples

à écrit le 03/06/2014 à 10:09
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Les constats dressés par Robert Jules sont connus: technocratie omnipotente et dérive bureaucratique, certes... a cela on peut ajouter une couche de "dirigeants symboliques" placés là pour amuser la galerie, comme le président de l'union (!) Von Romp...

à écrit le 28/05/2014 à 17:45
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La classe politique française a fait un bras d'honneur au peuple en 2005 en ne tenant pas compte des 55%de NON . ATTENTION LA FRANCE VA SE REVEILLER

à écrit le 26/05/2014 à 14:43
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Ils ne vont rien entendre, ça va continuer comme avant, tout simplement parceque conservateurs et sociaux démocrates sont majoritaires et auront intérêt à s'entendre pour pratiquer la même politique

à écrit le 26/05/2014 à 14:03
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Entre autres. Mais le problème fondamental, c'est le déni de démocratie des technocrates de Bruxelles, qui pensent qu'ils sont les seuls à détenir la vérité, et nient aux peuples que nous sommes la capacité de nous administrer. Le résultat de ces éle...

à écrit le 26/05/2014 à 10:40
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En résumé, ce n'est pas à nous d'entamer les réformes structurelles en premier, mais à l'Europe ! Ensuite, on verra si on peut voter européen...

le 26/05/2014 à 13:29
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que les américains fassent les leurs déjà au plan du fonctionnement de leur démocratie, que les chinois le fassent également et qu'ils polluent moins, qu'ils préservent l'environnement et la biodiversité, qu'ils spéculent moins et qu'ils exploitent m...

à écrit le 26/05/2014 à 9:54
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L'Europe est fabriquée pour ceux qui considèrent que les pays sont des hôtels avec le "petit peuple" pour les servir .

à écrit le 26/05/2014 à 9:47
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le probleme c'est que l'Europe oublie l'essentiel pour exister: fixer une bonne fois pour toute des frontières et un monnaie unique mais pour tous !

à écrit le 26/05/2014 à 8:59
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Après trente ans de bidouillage l’Europe non seulement ne fonctionne pas, mais et devenu un handicape pour la majorité des européens. L’Europe telle qu’elle a évoluée n’est pas faite pour le citoyen moyen. Faut donc s’en débarrasser et passer à autre...

à écrit le 26/05/2014 à 8:05
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en fait l'Europe paie là ou elle est faible , socialement en grece ou l'on plonge dans l'archi pauvreté le peuple entier meme déjà les plus pauvres et on laisse fuir en suisse les plus riches , ailleurs on voit le made in lointain devenir partout et ...

à écrit le 26/05/2014 à 7:38
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Que l'Europe est loin et lointaine aux yeux de la France. Dérive des continents!Cette usine à gaz qu'on appelle l'Europe, construction bureaucratique et antidémocratique, préoccupée par le souci des performances financières se heurte aujourd'hui au v...

à écrit le 26/05/2014 à 2:27
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"Effet de la crise plus que d'un rejet de l'Union" En êtes vous sûr ? Cette construction technocratique, antidémocratique à fédéralisme larvé et non assumé est au moins autant dénoncé dans les urnes. Probablement plus même.

le 26/05/2014 à 3:48
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Je suis bien de votre avis, mais même devant l'évidence, nier semble la stratégie !

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