Plans de sauvetage  : rembourser les dettes par des crédits d’externalités

OPINION. Si le sauvetage de nos fleurons français justifie un effort de la nation, il ne peut pour autant s’effectuer à n’importe quel coût et sans enclencher la transition bas carbone. Nous proposons un dispositif de remboursement des aides par des Crédits d’Externalités Climat. Par Romain Ferrari, industriel, président Fondation 2019,
(Crédits : Ralph Orlowski)

Le Gouvernement a décidé d'allouer aux compagnies aériennes et à d'autres grandes entreprises un ensemble de mesures de soutien qui pourrait atteindre 20 milliards d'euros, et ce sans contreparties environnementales tangibles, contrairement à l'Allemagne ou à l'Autriche. Un simple calcul montre que les externalités -climat- attachées au seul trafic aérien représentent un montant similaire.

Il est lié aux émissions directes de la combustion du kérosène, auquel il faut ajouter d'autres émissions, diffuses, provenant de l'ensemble de la chaîne logistique et entrainant un « forçage radiatif » global équivalent à 2,2 fois ces émissions directes de CO2, valeur retenue dans la Base Carbone de l'Ademe.

L'empreinte climat des compagnies françaises représente ainsi l'équivalent de 50 millions de tonnes équivalent CO2, soit une externalité de 20 milliards d'euros sur 10 ans, sur la base d'une valeur sociale du carbone de 40 €/T EquCO2. Si le sauvetage de nos fleurons français justifie un effort de la nation, il ne peut pour autant s'effectuer à n'importe quel coût et sans enclencher, la transition bas carbone, condition à leur survie et à la nôtre. Pour les conduire à cette transition, nous proposons ici un dispositif qui permet de concilier ces deux objectifs au-delà de simples engagements « RSE » peu contraignants.

 Rembourser les dettes par des Crédits d'Externalités.


Le remboursement de ces prêts, qu'on ne saurait oublier, pourrait se faire en partie par un mécanisme d'intermédiation financière, gagée sur la réduction des externalités climat. Pour chaque tonne de CO2Eq évitée pour un même service rendu - exprimé en Équivalent Passager- Km -, les compagnies pourraient se voir remettre par les pouvoirs publics des crédits d'externalités carbone. Ces crédits seraient ensuite commercialisables auprès des intermédiaires financiers et éligibles au remboursement des prêts de soutien.

Afin de sécuriser ce dispositif d'intermédiation financière gagée sur le carbone, l'État fixerait la valeur tutélaire de l'externalité, garantirait ces actifs à hauteur de leur valeur sociale, sélectionnerait ex ante les secteurs éligibles et vérifiait ex post l'intégrité des calculs. Ainsi, ces titres privés dont l'impact bas carbone avéré serait garanti par la puissance publique pourraient être éligibles à la politique de rachat d'actifs par la BCE. Aucun crédit ne pourrait être obtenu par un mécanisme de compensation. Ce processus entraînerait ainsi les entreprises dans une dynamique de réduction de leurs émissions.

Les compagnies connaissent bien, en effet, les leviers de réduction de leur empreinte carbone. Par un double effort portant à la fois sur les meilleures technologies et sur la refonte, si ce n'est la suppression, de l'offre commerciale de trajets courts, les compagnies pourraient dégager un potentiel d'allocation de ces crédits non négligeable. Elles y seraient fortement incitées. Les trajets domestiques de courte distance ont en effet un impact climat ramené au passager-km d'un facteur 2 par rapport à un Paris-New York. Ces émissions représentent 500 g de CO2Eq pour les premiers, contre 250 g de CO2Eq par passager-km pour le second.

Réduction de l'impact

Rappelons que le Paris-Marseille est réalisable en TGV pour seulement 4 g de CO2Eq. Sur les 300 milliards de Passagers-Km transportés par an, les compagnies aériennes ont largement le potentiel de réduire à la fois leurs impacts et de rembourser les aides financières consenties. Le lecteur l'aura compris, un tel dispositif serait beaucoup plus ambitieux que de simples promesses de RSE qui ne convainquent que ceux qui les écoutent.

L'intérêt de notre proposition, en outre, est qu'elle est généralisable. D'autres secteurs comme ceux de l'agriculture, de l'industrie du recyclage, de la réparation, etc., pourraient bénéficier de ce même mécanisme étendu aux externalités ressources, eau, air, sol, etc.

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Commentaires 3
à écrit le 16/05/2020 à 11:17
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Retrouver les détails sur ce dispositif sur le site de Fondation 2019 : http://www.fondation-2019.fr/2020/05/plans-de-sauvetage-de-leconomie-rembourser-les-dettes-par-des-credits-dexternalites/ Qu’est-ce qu’une Externalité ? La Valeur Sociale ...

à écrit le 10/05/2020 à 9:36
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Oui voilà une énième usine à gaz quoi, à savoir ce que trainent les citoyens européens leur coutant de plus en plus cher. Vous ne savez vraiment plus du tout penser efficacité en fait c'est ça non ?

à écrit le 08/05/2020 à 8:45
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Qui décide ce qui est ou non "a sauver"? Tout dépend de l'intérêt d'une minorité... et non d'une décision en faveur d'un peuple! Le fait de vouloir "sauvegarder" prouve bien que la démolition a bien commencer!

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