Entreprise engagée, "oui"... Entreprise providence "non" !

L'État providence ne pouvant plus assurer seul l'efficacité de notre système de protection sociale, la mauvaise idée serait de vouloir lui substituer l'entreprise providence...
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Depuis bientôt vingt ans que l'on glose sur la crise de l'État providence, le constat est largement partagé : l'État ne serait plus en mesure d'assurer seul l'efficacité de notre système de protection sociale. Cette « crise » de l'État providence ne porte pas seulement sur son financement mais aussi sur son efficacité puisque, malgré le haut degré de protection sociale, nombre de citoyens se retrouvent exposés à la précarité.
La capacité pour chaque individu de générer des droits à la protection sociale est aujourd'hui largement assise sur le travail. On comprend alors aisément que, avec trois millions de chômeurs, il y ait quelques ressorts à retendre. Les entreprises ont été progressivement amenées à prendre un rôle croissant dans notre modèle social : accords sur l'emploi des seniors, sur l'égalité, sur l'emploi des personnes handicapées, etc. Nombre d'entre elles, grandes ou petites, endossent aujourd'hui une « responsabilité sociale ». Elles le font d'autant plus facilement qu'elles ont compris que la performance sociale constitue un puissant levier de la performance économique. Bref, il n'est guère étonnant que les représentants de l'entreprise s'interrogent aujourd'hui sur des engagements qui dépassent largement ses frontières et concernent l'ensemble de la société. Et que l'on réfléchisse sur le passage « de l'entreprise engagée à l'entreprise providence », comme l'ont fait les Entretiens de la cohésion sociale.* L'État étant de plus en plus questionné sur sa capacité à agir en terme de protection sociale et certaines entreprises institutionnalisant leur façon d'accorder leur modèle économique à leur modèle social et réciproquement, faut-il pour autant qu'une « entreprise providence » se substitue à l'État providence?

Les entreprises n'ont pas d'autre mission que de produire et de réaliser du profit

Il est certes pertinent et bénéfique que les entreprises se préoccupent des conséquences collectives de leurs choix en termes de contrat social interne et qu'elles manifestent une volonté de dialogue sur la refonte de leur modèle social. Mais il faut raison garder. Les entreprises n'ont pas d'autres missions que de produire et de réaliser du profit. Elles sont en droit de se questionner sur leur engagement social. Mais, il faut être prudent quant à leur légitimité à agir en tant qu'entreprise providence. Une telle transformation de leur rôle impliquerait qu'elles soient en mesure d'agir en lieu et place de la puissance publique en termes de santé, de retraite, de formation et d'emploi. Disons le tout net : ce n'est pas de leur ressort. Elles n'en ont ni les moyens ni la légitimité. Même si l'État était amené à abandonner plusieurs de ses prérogatives en la matière, les entreprises ne pourraient d'aucune manière être à même de s'y substituer. Elles peuvent certes réinvestir une partie de leurs profits en faveur de leur propre modèle social, mais quel autre acteur que l'État peut-il être garant du respect de l'intérêt général? Si la négociation sur la redistribution des responsabilités des acteurs semble s'ouvrir, celle-ci ne doit pas pour autant conduire à une redéfinition hasardeuse des rôles de chacun. L'entreprise peut certes veiller à la mise en place d'un pacte social redéfini au service de la rentabilité économique et réciproquement, mais gare au mélange des genres. Méfions-nous des discours incantatoires sur le bien-fondé illusoire de l'entreprise providence, car, après tout, au nom de quel principe une « entreprise-léviathan » pourrait-elle incarner le monopole, qui appartient à l'État, de la contrainte légitime? Si l'on prétendait substituer les entreprises à l'État, le seul moyen de garantir une protection sociale au service de l'intérêt général prise en charge par une véritable entreprise providence, serait en définitive de collectiviser leurs capacités productives, la définition de leur emploi et leur fin... Est-ce vraiment ce que l'on veut?

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* Les premiers Entretiens de la cohésion sociale, organisés par Entreprise&Personnel, August&Debouzy avocats et l'Institut Montaigne se sont tenus le 7 septembre 2012 à la Maison de la Chimie, à Paris, sur le thème : « Entreprises et pacte social : quelle nouvelle donne ?»
 

Jean-Luc Placet est président directeur général d'IDRH et président de la Fédération Syntec

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Commentaires 6
à écrit le 25/10/2012 à 13:08
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L'Etat providence a échoué en France. L'entreprise providence a échoué aux USA (faillite de GM). C'est le principe même de la providence qui échoue partout, parce qu'il est fondé sur une pseudo-solidarité contrainte. Il est indispensable substituer l...

le 26/10/2012 à 12:34
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l epargne de tres long terme echouera aussi Suppososn que vous mettez de cote X ?. vous n allez pas ls mettre dans votre matelas mais les investir dans quelque chose. Admettons que vous investissez dans des obligations d etat (le plus sur jusqu a peu...

le 28/10/2012 à 12:09
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Voilà un excellent exercice de logique économique à la portée de chacun ! Il y a 7 erreurs fondamentales dans le raisonnement de cdg. Saurez-vous les trouver toutes ?

à écrit le 25/10/2012 à 10:16
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Non mais c'est quoi cet article teinté de communisme??? l'etat providence ne marche pas et ne marchera jamais, c'est dirigé par des politique virouette qui change d'agis a la 1ere manif ou a chaque election. l'entreprise, elle, a une vision plus stab...

à écrit le 25/10/2012 à 10:16
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Non mais c'est quoi cet article teinté de communisme??? l'etat providence ne marche pas et ne marchera jamais, c'est dirigé par des politique virouette qui change d'agis a la 1ere manif ou a chaque election. l'entreprise, elle, a une vision plus stab...

à écrit le 25/10/2012 à 10:16
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Non mais c'est quoi cet article teinté de communisme??? l'etat providence ne marche pas et ne marchera jamais, c'est dirigé par des politique virouette qui change d'agis a la 1ere manif ou a chaque election. l'entreprise, elle, a une vision plus stab...

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