Stimulons l'entrepreneuriat pour relancer la France !

François Hollande veut faciliter le développement des entreprises, notamment dans les quartiers difficiles Pourquoi ne pas déplafonner le chiffre d'affaires de l'auto-entreprise? par Pierre Bentata, chercheur en économie à l'Université Panthéon Assas

Lors de sa conférence de presse du 5 février, François Hollande a annoncé la création d'une Agence Nationale pour le Développement Économique fondée sur trois objectifs : peuplement, accompagnement, développement. Cette annonce peut surprendre - un mois après le déclassement de la France au 6ème rang des économies mondiales - tant les moyens semblent déconnectés de la réalité économique du pays et de son décrochage face aux poids lourds européens que sont l'Allemagne et le Royaume-Uni.

Effondrement des investissements directs étrangers

Déjà fin 2013, une première alerte était passée relativement inaperçue. Sur une année, les Investissements directs étrangers (IDE) s'étaient effondrés de plus de 77% alors que dans le même temps ils doublaient en Allemagne et ne baissaient que de 20% au Royaume-Uni (OCDE, FDI in figures, avril 2014). Face à ces deux économies, la France perdait donc déjà en attractivité. Or, ce déclin se traduit inévitablement par une baisse des implantations d'entreprises étrangères et in fine par moins de créations d'emplois. Ainsi en 2014, la France n'a attiré que 514 nouvelles implantations ou extensions d'entreprises étrangères contre plus de 700 en Allemagne et près de 800 au Royaume-Uni, soit une création de 14 000 emplois en France contre 27 000 au Royaume-Uni (Baromètre EY 2014).

La fuite des entrepreneurs


Mais il y a pire. A bien y regarder, la France semble aussi moins attractive pour les entrepreneurs français. Ils sont de plus en plus nombreux à quitter le pays pour entreprendre. Selon le CES, ils étaient au moins 100 000 en 2014 à partir pour créer une PME, et employaient en moyenne 12 salariés, soit plus du double de la moyenne des PME sur le territoire. Il faut dire que la situation entrepreneuriale en France est délicate. Certes, le nombre de créations d'entreprises est en constante hausse, mais derrière cette observation optimiste se cache une vérité complexe.

Des entreprises sans salariés

Plus de 50% des entreprises créées en 2014 étaient des auto-entreprises, et la proportion des entreprises employeuses demeure nettement inférieure à celle de l'Allemagne et du Royaume-Uni. En 2011, seules 28 000 nouvelles entreprises ont embauché en France contre 86 000 en Allemagne et 225 000 au Royaume-Uni, créant 83 000 emplois en France, 163 000 en Allemagne et 580 000 au Royaume-Uni. Ainsi, le désir d'entreprendre des Français est davantage un palliatif au chômage qu'un désir de créer une structure destinée à s'agrandir et embaucher.

Une situation dégradée

Alors d'où vient ce manque d'attractivité ? Principalement de la situation dégradée des entreprises françaises. Le taux de marge de nos entreprises est au plus bas depuis 25 ans, bien loin des taux affichés par les entreprises allemandes (10 points d'écart) et anglaises (4 points d'écart). Cela s'explique notamment par la hausse relative du coût du travail qui, combinée à la faible inflation, réduit la productivité réelle des entreprises. Aussi, les faibles taux de marges réduisent leurs capacités d'investissements à long terme et menacent leur pérennité à court terme, particulièrement dans un contexte de contraction des crédits par les établissements bancaires. A cet égard, il n'est donc pas étonnant que le nombre de faillites soient si élevé en France (63 000 en 2012, 26 000 en Allemagne et 30 000 au Royaume-Uni).

De faibles perspectives de profit

Les risques sont donc plus grands pour un entrepreneur français et les perspectives de profit restent faibles, surtout depuis que les dividendes sont imposés sur le barème progressif de l'impôt sur le revenu. Et sauf à croire que la croissance et l'activité économique n'ont rien à voir avec l'entrepreneuriat, il paraît évident que cette situation constitue un problème fondamental, particulièrement si l'on désire rester dans le peloton de tête des économies européennes. Que peut-on faire pour améliorer la situation des entrepreneurs et inciter les créateurs d'entreprises à viser plus haut, c'est-à-dire à prévoir de s'agrandir et d'embaucher ? Le cas des auto-entrepreneurs offre une piste intéressante.

Faciliter la transition de l'entreprise individuelle vers l'entreprise employeuse

Si tant de Français sont prêts à créer leur entreprise individuelle, c'est par souci d'indépendance mais aussi parce que ce régime permet de faire sauter la barrière qui existe entre salariat et entrepreneuriat. En cela, les Français sont clairement dans l'air du temps ! Pourtant, ils hésitent à transformer l'essai face aux complexités réglementaires et fiscales qu'imposent l'entrée dans le régime général des SAS, SARL et autres SA. De fait, ils mènent leur activité jusqu'à atteindre le plafond légal autorisé par ce statut, ne permettant à aucun chercheur d'emploi de les accompagner dans une aventure qui pourrait s'avérer rentable pour un grand nombre. Pourquoi alors ne pas faciliter, aussi bien au niveau administratif que fiscal, la transition de l'entreprise individuelle vers l'entreprise employeuse ? Encore mieux, pourquoi ne pas déplafonner le chiffre d'affaire des auto-entreprises ? Les Français veulent déjà entreprendre et devenir milliardaires, encore faut-il que l'entrepreneuriat à la française le leur permette !

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Commentaires 2
à écrit le 06/02/2015 à 10:59
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vous avez effectivement bien note que la france met dehors des entreprises viables puis constatant les degats sur l'emploi, propose de faire pousser des entreprises depuis rien........ toute personne ayant monte un business sait qu'il est bcp plus f...

le 07/02/2015 à 12:01
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@churchill... Vous avez bien raison... et je resume la situation en disant "la France est foutue". Plus de 200ans de lavage de cerveaux dans l´ecole publique a produit des "genes" dans l´esprit des francais: dedetester ceux qui sorent du lot, travai...

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