Comment fait la Suisse pour s'enrichir autant

La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, comment fait la Suisse pour s'enrichir autant
Alexandre Mirlicourtois, directeur de la conjoncture et de la prévision de Xerfi./ DR

« Si vous voyez un banquier suisse sauter par la fenêtre, suivez-le, il y a certainement de l'argent à se faire. » aurait dit Voltaire.

C'est dire que certaines idées reçues ont la vie dure. Et dans notre cas, celle d'une Suisse qui s'en tire en siphonnant l'épargne du monde entier, principalement celle des riches Européens, grâce à une fiscalité attractive et au secret bancaire.

Sauf que cela ne cadre pas totalement avec une donnée macro-économique majeure : la balance commerciale. Elle est excédentaire alors que le pays n'a ni ressources naturelles, ni accès à la mer et doit composer avec une monnaie forte et un coût du travail élevé.

Les excédents extérieurs sont pourtant bien là

Ils n'ont cessé d'augmenter depuis le début des années 2000, pour représenter quasiment 5% du PIB. Bien sûr, la Suisse profite, elle aussi, de la baisse du prix du pétrole. Mais ses excédents s'expliquent d'abord par les performances exceptionnelles de quelques secteurs phares.

En disant cela, je pense notamment à l'industrie pharmaceutique (emmenée par Novartis ou Roche) dont les ventes à l'étranger ont plus que triplé entre 2000 et 2014 pour atteindre 71 milliards de francs. Je pense aussi aux positions fortes de la Suisse dans l'industrie des machines et de l'électronique, dans l'horlogerie, dans les instruments de précision, la métallurgie, la bijouterie-joaillerie et les IAA avec le géant Nestlé.

De surcroît, au-delà de ses grands groupes emblématiques, la Suisse, dispose surtout d'un tissu très dense de PME tournées vers l'extérieur : 12,3% d'entre elles exportent contre 4,6% en France. C'est quasiment 3 fois plus.

Avec ce souci permanent : développer des produits de niche, haut de gamme, permettant de pratiquer des prix élevés. C'est une absolue nécessité lorsque l'on sait que le coût du travail est de près de 50 euros de l'heure dans l'industrie manufacturière : soit environ 40% de plus qu'en France ou en Allemagne et plus du double qu'au Royaume-Uni ou en Espagne.

La Suisse ultra-compétitive

Selon le World Economic Forum, elle serait même la plus compétitive au monde depuis 7 ans, devançant Singapour et les Etats-Unis. Et de citer parmi ses principaux atouts : la transparence des institutions, la capacité d'innovation et de recherche, l'excellence de la coopération entre le privé et le public, l'efficacité du marché du travail, le système éducatif, les infrastructures. J'y ajouterai pour ma part la fiscalité des entreprises et le développement des marchés financiers. Car s'il faut tordre le cou aux idées reçues, ne soyons pas naïf. La Suisse s'en tire aussi grâce à la force de son système bancaire.

Le secteur financier contribue directement à la création de plus de 10% du PIB et emploie 6% environ de la population active. C'est deux fois plus qu'en France.

Et encore ces chiffres ne mesurent pas les effets d'entrainement sur les autres secteurs. Sans oublier qu'il ne s'agit que de la partie émergée de l'iceberg. Le total des avoirs sous gestion dans les banques suisses était de 6.150 milliards de dollars en 2012, soit le tiers du PIB des Etats-Unis !

Une belle enveloppe pour moitié entre les mains d'investisseurs résidant à l'étranger, qui font de la Suisse le leader dans le domaine de la gestion de fortune transfrontalière dite offshore. Bref, ce n'est pas un mythe, les riches Européens font bien aussi la richesse de la Suisse.

Selon l'Association des Banques Privées Suisses, la place financière apporterait entre 14 et 18 milliards de francs d'impôts directs et indirects. En jeu : 12 à 15% des rentrées fiscales. Des recettes qui permettent de financer les infrastructures, le système éducatif, la recherche, etc.

Loin de s'opposer, la place financière et l'industrie sont complémentaires et se renforcent mutuellement. C'est ainsi que la Suisse s'en tire et continuera de prospérer, malgré la levée prochaine du secret bancaire (prévue en 2018) et le franc fort.

En un mot, la Suisse, c'est l'histoire d'une rente financière, peut-être indue, mais parfaitement utilisée pour bâtir de véritables avantages compétitifs.

 >> Plus de vidéos sur le site Xerfi Canal, le médiateur du monde économique

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Commentaires 19
à écrit le 27/10/2015 à 18:53
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La suis marché parceque ces gens là marchent pas sur la tete! Y a pas 1,5 millions de fonctionnaires en trop ! Des députés et sénateurs qui dotent rien !et une législation du travail de lutte des classes !👹🇨🇭

à écrit le 27/10/2015 à 17:45
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juste pour vous donner un exemple de l'intentivité des nos amis hèvetes. J'ai une montre pour ne la pas nommeer RMO11 Flyback Chronograph Black Phantom avec de la céramique TZP qui résiste aux rayures comme aux chocs et le carbon NTPT (North Thin Ply...

le 27/10/2015 à 22:59
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Et elle fait quoi, en plus, ta montre, à part te montrer l'heure ? La mienne à pas cher, elle fait pareil. Et elle a pas de platine, de titane ou d'autres truc exotique pour lesquels des types mal payés ont ravagé des collines à l'autre bout du monde...

à écrit le 27/10/2015 à 16:19
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Etre en sécurité derrière des frontières, être souveraine et avoir sa propre monnaie donne plus d'assurance, dans son économie et relation avec autrui!

à écrit le 27/10/2015 à 15:56
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Petit bémol toutefois, concernant le système éducatif. La suisse comporte quelques écoles et instituts très prestigieux (ETH, EPFL, etc...) mais le pays s'appuie surtout sur d'autres pays, jusqu'au bout du monde, pour faire venir des spécialistes qui...

le 27/10/2015 à 17:11
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LOL ahhhh parce que vous pensez que la France ne fait pas venir des médecins africains et des ingénieurs de roumanie etc etc ? Non mais c'est toujours les autres quoi...et parlons-en du système éducatif français, c'est une vraie catastrophe, à tel po...

le 27/10/2015 à 18:06
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Peut-être du ignore qu'à l'EPFL il y a plus d'élève français qu'à l'école polytechnique à Paris. C'est la Suisse qui paye leur formation. Il est vrai qu'un certain nombre reste en Suisse car simplement il est plus facile à trouver un travail et certa...

le 28/10/2015 à 0:45
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@ @Alfred Votre commentaire est un peu "bas de front" pour être poli, vous dites que le système scolaire français est catastrophique: comment alors se fait-il que les entreprises suisses recrutent autant de français, résidents comme frontaliers ? Pa...

le 28/10/2015 à 10:28
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"comment alors se fait-il que les entreprises suisses recrutent autant de français, résidents comme frontaliers ?" : car ils sont proches et sont moins chers que les Suisses. Mais les Suisses n'employent pas que des Français, mais aussi des Italiens,...

le 30/10/2015 à 11:32
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Le succès économique de la Suisse engendre une pénurie de main-d'oeuvre dans certains secteurs. Cela ne signifie pas que la Suisse ne forme pas dans ces domaines. La Suisse est victime de son succès. Elle est contrainte d'attirer des spécialistes en ...

à écrit le 27/10/2015 à 15:39
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Les Suisses réussissent brillamment. Pourquoi ? Parce qu'ils osent et ne sont pas politiquement corrects comme en France. En France, tu oses parler d'un problème, direct on dit tu es d'extrême droite...Mais justement avec la politique de l'autruche, ...

à écrit le 27/10/2015 à 15:25
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Excellent reportage qui contraste avec la méconnaissance des 99 % des français qui ne connaissent seulement les banques et le chocolat. Malheureusement le gouvernement français est dans la même ignorance, le faible échange commerciale en est une preu...

à écrit le 27/10/2015 à 14:28
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La Suisse se porte a merveille car cela arrange ou arrangeait tout le monde. Qd a leur success cessons d'etre naïf il vient des riches europeens qui evitent l'impot dans leur pays. Ensuite, et seulement ensuite, il y a aussi un vcrai dynamique econom...

à écrit le 27/10/2015 à 14:18
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Souhaitons alors bonne chance à nos amis et voisins Suisses. Pourtant, depuis l'abandon du taux plancher, j'ai entendu parler de nombreuses difficultés, y compris dans le secteur bancaire : par ex, la banque Hottinger &Cie (faillite?), le Credit Suis...

à écrit le 27/10/2015 à 14:13
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La Suisse n'est pas anti-finance, ni moraliste, ni égalitariste, ni jalouse. Elle n'est pas socialiste non plus.... Elle est un modèle pour l'Europe. La France est un contre-modèle: pays historiquement et géographiquement avantagé mais qui détruit se...

à écrit le 27/10/2015 à 13:34
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les Suisses travaillent ( qd je dis travaillent ils travaillent effectivement pas autour des machines à café ou L'Equipe etc)et 4 semaines de vacances par an pas plus. Et surtout les allocs pour les ayant droit sont versées aux employeurs ddirectemen...

à écrit le 27/10/2015 à 13:02
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Enfin, un article honnête sur la Suisse ! Bravo, ça nous change des éternelles critiques des bobos-gauchos qui ne comprennent rien.

le 27/10/2015 à 13:53
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On comprend que la Suisse est devenue prospère parce qu'étant un paradis fiscal depuis longtemps, étant peu regardante sur la source ou la nature de ses rentrées fiscales. On sait aussi que la Suisse a prospéré durant la seconde de mondiale, c'est ...

le 31/10/2015 à 16:14
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@bobos-gauchos Certes la Suisse n'a pas été blanche durant la seconde guerre mondiale, mais qui êtes-vous pour juger ce pays??? Qu'auriez-vous fait, si vous aviez été à la tête de la Suisse à cette époque Monsieur "je donne des leçons de morale...

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