L'ESS va-t-il pâtir de la finance verte ?

Depuis son apparition dans les années 1980, la finance solidaire agit pour un développement durable et inclusif, en France et à l'international, en mobilisant des ressources financières engagées prioritairement dans le but d'obtenir un impact social et/ou environnemental positif pour la société. Elle finance de plus en plus d'initiatives environnementales d'origine citoyenne (réutilisation et recyclage des déchets ; énergies renouvelables ; agriculture biologique...). Par Amandine Albizzati, Présidente du Conseil d'Administration d'Enercoop et Frédéric Tiberghien, Président de Finansol
Amandine Albizzati, Présidente du Conseil d'Administration d'Enercoop  et Frédéric Tiberghien, Président de Finansol
Amandine Albizzati, Présidente du Conseil d'Administration d'Enercoop et Frédéric Tiberghien, Président de Finansol (Crédits : DR)

Les projets ne manquent pas : en témoigne le lancement voici quelques jours, aux Assises de la transition énergétique, du fonds EnerCiT. Impulsé par Energie Partagée, le labo de l'ESS et l'ADEME, ce nouvel outil de financement, doté de 10 millions d'euros par la Caisse des Dépôts, le Crédit Coopératif et l'Ircantec, agira pour le développement de projets de production portés par des citoyens.

Dans ce contexte, Finansol ne peut donc que se réjouir de la montée en puissance des initiatives financières rendues publiques fin 2017 par Bruno Le Maire et qui vont dans la même direction : la promotion de la finance verte autour de Finance for Tomorrow, du Climate Finance Day et du One Planet Summit, avec pour ambition de voir davantage d'épargne privée contribuer à la transition écologique et énergétique.

Le ministre de l'économie a ainsi annoncé en décembre 2017, en accord avec la Fédération Française des Assurances (FFA), que les assureurs offriraient à la souscription d'ici fin 2018 au moins un support en unité de compte « labellisé climat » dans leurs contrats d'assurance-vie et que le livret de développement durable solidaire (LDDS) serait mis à contribution dès 2018 pour financer la transition énergétique.

Faut-il s'en réjouir ou s'en inquiéter ?

Sur le premier point, Finansol demande depuis plusieurs années que toute offre de contrat d'assurance-vie en unités de compte (UC) comporte au moins une unité de compte solidaire. Les assureurs, à quelques exceptions près, s'étant jusqu'ici montrés réticents à cette idée, Finansol se réjouit de leur ralliement, même tardif, au financement de la transition énergétique. Pour éviter que l'unité de compte solidaire soit totalement évacuée au profit d'une UC qui serait simplement « verte » ou « ISR », il conviendrait que les unités de compte intégrées dans les contrats d'assurance vie soient investies à 90% dans les titres de la croissance verte et à 10% dans des entreprises solidaires.
Sur le second point, l'article 80 de la loi Sapin II du 9 décembre 2016 a, en écho à une proposition ancienne de Finansol, transformé le LDD en LDDS. Mais le gouvernement précédent a refusé de prendre, avant mai 2017, le décret d'application nécessaire à la mise en place de ce LDDS.

Fléché par le législateur vers le « financement des travaux d'économie d'énergie dans les bâtiments anciens » et vers « le financement des personnes morales relevant de... l'économie sociale et solidaire (ESS). », il serait peu raisonnable et difficile de modifier ce fléchage pour lui faire financer uniquement la rénovation énergétique des bâtiments anciens et la transition énergétique. Ceci requerrait sans doute une modification de la loi et surtout un dialogue approfondi avec les acteurs de l'ESS : cette dernière a également besoin d'être financée et son champ d'action ne se réduit pas, loin de là, à l'écologie et à l'environnement. Et les acteurs de la finance solidaire regroupés au sein de Finansol seraient profondément frustrés si le LDD, transformé fin 2016 sur le papier en LDDS, redevenait un simple LDD, en oblitérant totalement son aspect solidaire.

Une opposition préjudiciable

Derrière ces deux propositions gouvernementales se profile la question des rapports à établir entre finance responsable, finance verte et finance solidaire : la promotion de l'une doit-elle se faire au détriment des autres comme semblent l'impliquer les deux annonces gouvernementales ? Il faudra bien y répondre car il serait profondément choquant que deux propositions anciennes de la finance solidaire soient aujourd'hui reprises mais au bénéfice des seules finances verte et responsable. Pour Finansol, il serait préjudiciable de les opposer car elle les considère comme complémentaires et comme contribuant à des objectifs convergents.

La préparation d'un nouveau projet de loi sur l'ESS par le ministre de la transition écologique et solidaire - qui a fort opportunément la charge de ces deux secteurs et donc de promouvoir à la fois les finances responsable, verte et solidaire- fournit l'occasion de rouvrir le sujet avec les acteurs concernés et quelques garde-fous : ne pas trop différer l'entrée en vigueur du LDDS ; mettre en œuvre au même titre que l'assurance-vie verte ou responsable l'assurance-vie solidaire promise par le candidat Emmanuel Macron ; veiller à ce que l'épargne privée finance en même temps l'économie sociale et solidaire et la transition écologique et énergétique. C'est possible et souhaitable. Il faut maintenant passer aux actes en promouvant dans un même mouvement finance responsable, finance verte et finance solidaire au service de la transition écologique et solidaire.

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Commentaire 1
à écrit le 27/02/2018 à 16:53
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le finencement de ces entreprises aide verte et t elle vraiment surveillez, le scandale des granulle de pneus sous les pelousses des STADE DE FOOT SYMTHETIQUE se mutiplie alors que des gens ont fait des etudes sur leurs nocivites et deja denonce de ...

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