L'industrie ferroviaire devrait être au cœur de la réindustrialisation verte

OPINION. L'Europe et plus particulièrement la France possèdent une industrie ferroviaire forte, une des premières au monde. Par Alain Picard, DG de CAF France.
(Crédits : DR)

C'est une force dans la transition vers la décarbonation des transports et de l'économie et la réindustrialisation verte. Sa croissance actuelle et future sont un levier incontournable pour la décarbonation des transports, ces derniers constituant, en France comme en Europe, le premier poste d'émission de gaz à effet de serre. C'est une industrie génératrice de richesses, qui exporte et attire des investissements directs étrangers : plusieurs grands groupes internationaux possèdent des sites de production en France et contribuent à stimuler le développement économique régional.

Par ailleurs, sa croissance ne génère pas d'artificialisation supplémentaire, puisqu'il s'agit le plus souvent de continuer à produire dans des bâtiments industriels existants. Enfin il s'agit d'un secteur qui génère de l'activité industrielle et de l'emploi loin des métropoles, dans des petites villes avec une tradition industrielle, voire même dans des territoires désindustrialisés. Son développement a un impact positif sur le dynamisme de toute une filière, qui compte des milliers d'entreprises et contribue à la vivacité du tissu industriel national alors qu'apparaissent les premières inquiétudes sur la réindustrialisation.

Malgré ce potentiel, l'industrie ferroviaire reste largement méconnue, voire négligée. Pour le dire simplement : en France comme en Europe, elle est la grande oubliée des dispositifs de soutien au développement de l'industrie verte. Pour l'Union européenne, l'industrie ferroviaire, qui est au sens littéral une industrie stratégique net zéro, n'est pas incluse dans le Net Zero Industry Act en cours d'adoption et plus largement dans la politique industrielle européenne. En France, le plan France 2030, en se concentrant sur les gigafactories, les sites polluants et les premières implantations d'usines, ne permet pas d'accompagner et de stimuler les investissements de l'industrie ferroviaire sur des sites déjà existants.

On est cœur d'un grand paradoxe : l'industrie ferroviaire, industrie verte par excellence, qui remplit tous les critères vertueux, ne coche visiblement pas les bonnes cases administratives pour un soutien financier, malgré les retombées positives évidentes sur l'emploi et l'économie nationale et locale.

Or, en ce qui concerne la France, le coût élevé du travail par rapport à la plupart des pays dans et hors d'Europe nécessite, pour le contrebalancer, l'accès à une main-d'œuvre qualifiée et d'importants investissements pour améliorer la productivité des sites français.

Le seul levier activable est le soutien à l'investissement industriel

À cet égard, la disponibilité des compétences est aujourd'hui le premier enjeu pour la filière industrielle ferroviaire, car elle connaît de manière simultanée une forte croissance de ses besoins, liée à son carnet de commandes et une pénurie structurelle de personnel qualifié. Cependant, relever le défi des compétences est un travail au long cours, car indépendamment de la volonté et des moyens mis en œuvre, il faut au moins une décennie pour en venir à bout, en particulier dans les zones où les bassins d'emplois sont peu dynamiques. Par conséquent, le seul levier activable à court terme avec effet immédiat sur la compétitivité et l'attractivité est le soutien à l'investissement industriel, pour aider l'industrie ferroviaire à se moderniser, à changer d'échelle et à innover.

Le cas de l'entreprise Valdunes démontre que l'industrie ferroviaire n'est jamais un acquis, et qu'à défaut d'investissement suffisant dans la modernisation de l'appareil productif, le déclin, voire la disparition menacent. Ce faisant, ce ne sont pas seulement l'activité et l'emploi qui disparaissent, mais aussi un patrimoine, une part de l'identité des territoires.

L'industrie ferroviaire est une industrie qui permet de réconcilier l'économique, le social et l'environnemental. Comme au début de l'ère industrielle, le train est un moteur de la nouvelle révolution. Les besoins en solutions décarbonées dédiées au transport de passager et au fret n'ont jamais été aussi importants. Faisons en sorte que l'industrie européenne soit au rendez-vous.

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Commentaire 1
à écrit le 12/03/2024 à 19:46
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Ah ! Enfin quelqu'un qui aime le train, merci !

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