Santé centralisée par les GAFA ou décentralisée avec la blockchain ?

Contre la monopolisation des données de santé par les GAFA, visible notamment au Royaume Uni, le modèle communautaire peut compter sur la blockchain. Par Jean-Christophe Despres, Président de Sunny Lake, plateforme communautaire de santé.

On connaît Deep Mind pour ses victoires contre les meilleurs joueurs de Go de la planète, on va apprendre à connaître le Docteur Deep Mind, médecin non malgré lui mais à l'insu du patient. La filiale de Google semble donc bien partie pour faire franchir à la médecine des étapes considérables. Pragmatique comme à son habitude, le gouvernement britannique lui a donc donné les clés de l'ambulance, en l'occurrence trois hôpitaux londoniens ayant mis en place un suivi des patients atteints de dysfonctionnements rénaux.

Malgré quelques garanties d'effacement des données, le processus semble d'ores et déjà hors de contrôle. Premier obstacle allègrement contourné, celui du recueil du consentement du patient et son corollaire, la démarche d'information du participant à l'étude, l'explication des finalités, en réalité tout ce qui participe du recueil d'un consentement éclairé.

 Google, le meta service public par excellence ?

En second lieu, comment utilise-t-on ces données ? S'il est vrai que l'intelligence artificielle peut conduire à trouver des réponses aux questions qu'on ne s'est pas posées, impossible dans ce cadre de fixer un périmètre bien défini à l'étude. Doit-on d'ailleurs continuer à parler d'études puisque ce projet inaugure l'ère d'observatoires permanents, avec des panels fluctuants et des méthodologies totalement redéfinies quant au traitement statistique des données recueillies.

Pour le National Health Service Britannique, on ne peut pas ralentir l'avancée de la science avec de telles lourdeurs. Raisonnement assez sensé d'une certaine manière tant la protection de la vie privée peut servir de cache sexe à tous les immobilismes. Pour autant, est-il bien sérieux de laisser Google devenir le meta service public par excellence ? Certes il proclame "Don't be evil!" mais une devise n'est pas un lien de confiance.

 Une réponse technologique à cette impasse, la Blockchain

En réalité, il existe peut-être une réponse technologique à cette impasse, elle s'appelle la Blockchain. A l'instar de ce qui s'opère pour les monnaies cryptographiques, une Blockchain peut abriter non les données de santé elle-même mais les preuves de leur existence. Imaginons que l'investigateur d'une étude clinique se connecte à une plateforme sécurisée pour recruter tous les patients pressentis pour participer à la dite étude. Les patients recevront un formulaire de consentement, assorti des documents d'information nécessaires via une interface sécurisée accessible grâce à une clé cryptographique ou un petit périphérique. Le patient n'aura qu'à donner son accord pour participer à l'étude, dans les conditions mentionnées.

La preuve de sa signature sera ensuite stockée de manière anonyme sur un nombre indéterminé, qui permettra de rendre le consentement infalsifiable. Si les termes de l'étude changent ou que le patient veut se retirer, même processus, tout sera archivé et consultable par tous. Dans tous les cas, la possession des données demeure entre les mains du patient, de nous tous. Libre à chacun de choisir avec qui les partager. Dans l'avenir ces données seront hébergées dans des clouds publics ou universitaires, aptes à garantir l'entière traçabilité de leur utilisation. Différentes solutions émergent tel le protocole open source développé au MIT, Enigma. Celui-ci permet le partage de données sensibles, protégées par la Blockchain et donc une meilleure protection des données de santé notamment celles recueillies grâce à l'internet des objets.

 Réorienter le partage de l'information

Imaginons donc maintenant que la santé s'inspire des organisations autonomes décentralisées ou laboratoires, organismes publics de recherche, médecins de ville, patients collaborent en toute confiance pour parachever le projet de Google, cette fois au service de tous. Grâce à l'utilisation de « smart contracts », ces protocoles informatiques permettant l'exécution automatique de transferts d'information selon des conditions préalablement définies, la confiance du nouvel écosystème de santé ne sera plus appuyée sur sa lourdeur. Des entreprises comme WeKeep projettent d'appliquer cette logique à l'assurance, nul doute qu'elle s'étendra à l'ensemble du système de santé. Ce rêve est à portée de mains, nos données n'appartiennent à personne d'autre que nous si ce n'est à tout le monde...Le partage de l'information est fondamental, ne le freinons pas, réorientons le.

 @jcdsopi

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.