La télémédecine doit permettre de repenser le processus de l'acte de soin

OPINION. L'amélioration de la qualité globale des soins est possible à condition de repenser en totalité le parcours du patient, explique Olivier Bouchard, spécialiste en transformation digitale et Data Science des industries de la santé de SAS Institute France.
(Crédits : DR)

Diverses avancées technologiques ont favorisé le développement de la télémédecine en France. Généralisation de l'Internet et du très Haut Débit, multiplication des micro-ordinateurs multimédia et baisse du coût de stockage de données en sont des vecteurs importants. Cette évolution a permis d'installer des ponts entre les diverses étapes de l'acte de soin sans pour autant remettre en cause une pratique éprouvée.

En télémédecine comme en présence physique, le patient rencontre son médecin aujourd'hui comme ses arrière-grands-parents le faisaient dans les années cinquante, au siècle dernier. Il y a certainement mieux à faire.

La télémédecine s'est installée durablement dans le quotidien des Français

Quelle description peut-on faire de la situation actuelle ? Si la loi du 21 juillet 2009 a établi les bases de la télémédecine en France, il a fallu attendre la pandémie pour que l'une de ses formes, la téléconsultation, entre définitivement dans les mœurs. Au plus fort de la crise sanitaire, on comptait 4 millions de téléconsultations par mois. Aujourd'hui, postpandémie, le chiffre oscille entre 1 million et 1,2 million par mois et reste stable. Certains médecins peuvent consacrer jusqu'à 20% de leur temps de travail à la téléconsultation .

Véritable cœur du réacteur de la santé en France, le dossier médical partagé, « mon espace santé », a été développé par l'assurance-maladie. Il sera renforcé par la généralisation, à partir du 31 décembre 2024, de la dématérialisation du circuit de la prescription entre médecins et professionnels de santé prescrits.

La donnée patiente, sensible et personnelle, est donc au cœur de la problématique, et sera un point central de la bonne adhésion des patients à la Télémédecine, tant au sujet de la sécurisation des données que de l'éthique de leurs utilisations.

Technologie, axe patient, IA et rôle des grandes firmes pharmaceutiques

Afin de cerner un futur proactif de la télémédecine et d'améliorer tout ce qui doit et peut l'être, quatre points sont à considérer. En premier lieu vient la technologie, qui, bien utilisée, peut renforcer la qualité globale des soins tout en proposant quelques gains de productivité. On pense notamment au travail administratif des médecins, certains documents pouvant être « préremplis », ou des rappels d'examens importants pouvant être envoyés sous forme de notification...

Deuxième point, l'axe patient. On le sait, les urgences sont surchargées, surtout en fin de week-end. Il faut mettre en place un moyen efficace de gérer la « bobologie » pour libérer le personnel de santé vers des tâches vraiment urgentes. L'utilisation d'une intelligence artificielle à distance peut rassurer le patient et traiter rapidement et au mieux la « bobologie ». Cette intelligence artificielle pourra faciliter le « triage » si chronophage pour les Urgences, le SAMU...

Dans le même ordre d'idée, la télémédecine permet de récolter des mesures biologiques ou biométriques en continu : poids, taille, équilibre, rythme cardiaque, tension, aspect de la peau, etc.

Là aussi, et c'est le troisième point clef, on peut imaginer l'utilisation d'algorithmes basés sur des outils d'intelligence artificielle pour avertir le patient et son médecin de situations anormales. Une telle méthode procure un avantage quasi immédiat et certainement quantifiable au patient (éviter par exemple une crise cardiaque à temps). Elle renforce la confiance dans la relation médicale à condition de garantir la sécurisation de la donnée et de son traitement qui permet de réaliser un diagnostic.

Cette approche peut transformer nos systèmes de soins vers une médecine préventive, de précision, focalisée sur le patient et ses spécificités. Si divers modules technologiques existent pour y parvenir, ils ne sont pas encore interconnectés. On n'a pas encore pensé la chaîne de bout en bout, car l'existant et l'héritage des années passées semblent l'interdire.

Quatrième point, le rôle des grandes sociétés pharmaceutiques peut servir d'accélérateur. Ces sociétés ont dû faire face pendant la pandémie à la limitation, voire l'impossibilité des patients inclus dans des essais cliniques de suivre correctement les visites sur site/hôpital. Face au COVID, elles ont intégré des outils digitaux au plus tôt dans ces procédures. Or, un patient habitué à utiliser de tels outils va en parler favorablement autour de lui. C'est un petit pas, mais c'est comme amorcer la pompe d'un puits. Après un petit filet d'eau, le débit est plus important. Avec des dossiers patients plus enrichis, la télémédecine peut stimuler un protocole de soins personnalisés, donc de qualité. Et on a tous envie d'être bien soignés.

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Commentaires 6
à écrit le 02/03/2024 à 12:15
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Il est évident que le système de santé qui a existé jusqu'à la fin des années 90 ne reviendra pas il reste donc à imaginer et mettre en place ce que j'appelle une colonne vertébrale pour les décennies à venir en prenant en compte les aspirations de c...

à écrit le 02/03/2024 à 9:49
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L'humain a l'art de chercher des excuses pour en faire le moins possible !

le 02/03/2024 à 12:22
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Pas" le moins possible " mais le mieux possible , à temps égal passé avec un patient un médecin avec toutes les technologies mises à sa disposition peut aujourd'hui poser un diagnostique précis et mettre en place un traitement adapté au mieux .C'est ...

à écrit le 02/03/2024 à 9:40
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Par.manque de.medecins et.non.parce que les gens l'aiment. Encore un truc d'abord et avant tout imposé donc.

le 02/03/2024 à 12:25
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La médecine n'attire plus et la médecine générale encore moins et si les technologies peuvent résoudre en partie la crise des vocations pourquoi ne pas saisir cette opportunité ?

le 02/03/2024 à 16:34
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6 mois dans le 24 pour obtenir un rendez-vous chez le dentiste ou l'ophtalmo quand, de plus en plus rarement, ils prennent des nouveaux patients, 3 jours à Bordeaux.

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