Les JO seront un potentiel facteur d'abstention lors des élections européennes

OPINION. Le 9 juin 2024 se tiendra le tour unique de l'élection européenne en France. À peine sept semaines plus tard, le vendredi 26 juillet, aura lieu à Paris la tant attendue cérémonie d'ouverture des Jeux Olympiques et Paralympiques. Hasard de calendrier jusqu'alors peu considéré, notamment dans les études d'opinion, cette superposition des deux évènements laisse entrevoir une prévisible hausse de l'abstention, pour un scrutin déjà réputé pour être peu plébiscité des électeurs. Par Arthur Nowicki, conseiller en communication et enseignant à l'ISCOM
(Crédits : DR)

Au cours des dernières décennies, il apparaît que les Jeux et les élections n'ont jamais fait bon ménage. L'Histoire donne à ce titre des illustrations emblématiques de l'impact que les Jeux peuvent avoir sur les pays hôtes lorsque ces derniers tiennent des scrutins, qu'ils soient locaux, nationaux ou européens, dans les mois suivant ou précédant les épreuves.

Lors des Jeux de 2012, la participation électorale avait chuté de 7% à l'élection municipale dans la ville de Londres, scrutin qui s'était tenu quelques semaines avant la cérémonie d'ouverture dans la capitale. En 2004, la Grèce subit une baisse similaire de la participation de l'ordre de moins 7% aux élections européennes, qui s'étaient tenues deux mois avant la cérémonie d'ouverture dans le pays (rappelons que la Grèce fait pourtant partie des pays au sein desquels le vote est rendu obligatoire par la Loi). Un phénomène identique en 1996, avec une chute de la participation de 6% à l'élection présidentielle américaine, ayant eu lieu quelques mois après la clôture des Jeux d'Atlanta.

Alors, comment expliquer ce lien de corrélation entre les Jeux et la participation électorale ?

Sur un plan logistique d'abord, la circulation, les mobilités ou encore l'affichage public dans les villes accueillant des épreuves sont bien souvent sujets à de nombreuses perturbations. Il en va de même concernant l'organisation de meetings, la location de salles et la tenue d'opérations militantes diverses, notamment pour des considérations de sécurité publique. Parallèlement, les habitants des villes hôtes profitent régulièrement de la tenue de ces grands évènements sportifs pour quitter leur domicile, tantôt pour le louer à des touristes visiteurs, tantôt pour éviter l'afflux des supporters.

Un phénomène d'exode devenu récurrent, qui pourrait théoriquement susciter une hausse du recours aux procurations en France, mais qui risque de se solder par une abstention renforcée, compte tenu du manque d'attractivité du scrutin. Plus encore, ces perturbations pourraient aller jusqu'à remettre en cause la bonne tenue de certains bureaux de vote, en alimentant la pénurie d'assesseurs et de scrutateurs.

Au-delà des contraintes logistiques, les électeurs français peinent aujourd'hui à trouver une réelle raison d'aller voter lors de ce scrutin. En effet, 49% des Français affirmaient ne pas être intéressés par la campagne des élections européennes au mois de janvier dernier, la cannibalisation de l'attention par l'ouverture des Jeux ne risquant pas d'inverser la tendance.

Tout laisse ainsi à penser que ces élections européennes se dérouleront à bas bruit, limitant la possibilité d'un engouement sur le fond des programmes et des sujets abordés ; le poids du corps institutionnel et l'attention médiatique faisant d'ores et déjà la part belle aux Jeux.

Alors, quelles conséquences pour la France ?

En un mot, il s'agit là d'un profond changement de nature du scrutin. En effet, si la participation électorale devait passer sous le seuil limite des 40%, le résultat des prochaines élections européennes en France ne se fixerait dès lors plus que sur la capacité des candidats à sécuriser la participation de leur propre socle électoral, plus ou moins perturbé par les Jeux, et non sur la possibilité de convaincre le plus grand nombre d'électeurs.

Une situation périlleuse pour tous les partis, et plus grand encore pour les candidats dont l'électorat type se compose des électeurs CSP+ habitant dans les principales villes qui accueilleront les épreuves, comme celui de Renaissance ou de Reconquête, car ce sont ces publics qui verront prioritairement leurs habitudes de vie réellement perturbées par les Jeux. Indéniablement, ce calendrier transforme la nature du scrutin, d'un exercice de conviction du plus grand nombre à un exercice de mobilisation de ses propres sympathisants déjà acquis. Et à cette épreuve, tout laisse à penser que le Rassemblement national et la gauche partent aujourd'hui favoris.

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Commentaires 4
à écrit le 10/04/2024 à 5:34
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faut il croire encore à cette Europe ?

à écrit le 02/03/2024 à 9:43
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A quand l'inscription du "vote blanc", qui annule toute élection non désiré par la population, dans la Constitution ? ;-)

le 02/03/2024 à 12:18
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Oui mais comment imaginer que les élus mal élu seraient assez fou pour renoncer au royaume de la politique La France malgré le discours de l'ensemble de la classe politique au premier rang le Président nous bassinent avec le mot démocratie alors que...

à écrit le 02/03/2024 à 9:17
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Bonjour, Personnellement je crois que le gouvernement souhaitent une abstention importantors des élections européennes... Car ils est forte probable que les partis politiques traditionnelles ( droite gauche) soient balayée de l'hémicycle... Ils fa...

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