Les supply chains ont besoin des véhicules électriques pour être plus durables

OPINION. L'Union européenne vient d'entériner un accord important pour développer les infrastructures de recharge sur les axes autoroutiers des pays membres. De quoi donner un coup d'accélérateur salutaire pour l'adoption des camions électriques et la décarbonation du transport de marchandises. Les supply chains vont-elles pour autant devenir plus durables ? Par Sébastien Lefebure, Directeur général Europe du Sud de Manhattan Associates
(Crédits : DR)

De manière quasi simultanée, deux décisions clés viennent d'être validées par l'UE en faveur de la mobilité électrique : la fin des voitures neuves thermiques en 2035 et l'installation de bornes de recharge électrique tous les 60 km sur les axes autoroutiers des pays membres, d'ici à 2025.

Ce second point est décisif, tant il représente une condition indispensable pour accélérer la transition énergétique des véhicules, et plus particulièrement celle des camions. D'un point de vue opérationnel, il est en effet évident qu'aucun transporteur ne peut envisager d'investir dans un camion électrique s'il ne peut pas assurer un rechargement fluide sur les itinéraires planifiés.

Cet accord est donc une très bonne nouvelle. Mais quel sera son impact concret pour aller vers une logistique plus verte ?

0,6% des émissions carbone mondiales

D'après le rapport 2021 de l'Agence européenne pour l'environnement (AEE), le transport est responsable du quart des émissions de gaz à effet de serre (GES) de l'UE. Si l'on décortique les statistiques, on voit que les camions, bus et poids lourds sont responsables d'environ 7% du total des GES émis par l'Union européenne. À l'échelle mondiale, ce poids retombe à 0,6%.

L'impact de la transition énergétique des camions et poids lourds en Europe (que ce soit par l'électrique, le GNL ou l'hydrogène) sera donc, à lui seul, relativement faible face à l'urgence climatique.

Cela veut-il dire que ça ne sert à rien ? Non, évidemment. Cela veut simplement dire que la décarbonation du transport logistique européen, étant donné son impact très limité, ne doit pas être vue comme une solution unique. Elle n'a de sens que si elle est un élément combiné à d'autres, au sein d'une dynamique beaucoup plus large dont nous devons tous être les acteurs.

Comment réellement peser à l'échelle climatique ?

Quels sont les autres leviers sur lesquels il faut agir pour rendre les supply chains plus durables ? Il faut sans doute commencer par dire que la logistique n'est que la résultante des modes de production et de consommation. Ce qui signifie que le monde du retail peut agir sur différents points à fort impact, en amont.

À l'heure où l'IA arrive directement entre nos mains via des outils comme ChatGPT, nous devrions la mettre prioritairement au service d'achat plus intelligent et optimisé. Et ce avec pour objectif, notamment, de résoudre l'une des grandes problématiques inhérentes au déplacement de marchandises : le transport du vide.

Comment ? En s'appuyant sur des systèmes intelligents de gestion des stocks, des commandes et du transport qui se parlent entre eux, les marques pourraient différer la livraison de certains achats en ligne afin de les grouper dans une livraison unique (et/ou dans un carton rempli à 100%). Des systèmes omnicanaux plus intelligents pourraient également donner aux clients la possibilité de modifier une livraison jusqu'au moment où la commande quitte l'entrepôt ; ou de choisir une méthode de livraison en fonction de critères environnementaux, plutôt qu'en fonction de sa rapidité.

Cette coopération entre les consommateurs et les marques, rendue possible par la technologie, permettrait des gains réellement impactant.

L'On estime en effet qu'un cinquième des camions roulent à vide sur les routes européennes. Virtuellement, on pourrait donc réduire de 20% le nombre de camions sur la route en optimisant les opérations de livraison - et, par là même, réduire de 20% le coût du transport pour les retailers.

L'optimisation des supply chains (et donc la réduction de l'impact environnemental) se joue aussi à l'échelle des entrepôts. Pour transporter plus intelligemment et réduire les mouvements de marchandises, le maillage des territoires - depuis les entrepôts XXL jusqu'aux plus petits entrepôts de proximité urbains ou péri-urbains - et une meilleure gestion des flux entre les entrepôts sont essentiels.

Que veut-on dire ici ? Non pas que l'on se trompe de combat avec la fin des énergies fossiles dans le transport de marchandises. Mais qu'il ne faut pas en faire la priorité des priorités.

Concernant la logistique, ce n'est pas seulement l'énergie utilisée pour le transport de marchandises qui est au cœur des enjeux climatiques. C'est tout autant, si ce n'est davantage, la manière dont le transport et les mouvements de marchandises sont organisés et pilotés. Nous disposons certes de la technologie pour éliminer les émissions carbone du transport. Mais elle doit aller de pair avec la technologie qui permet l'optimisation permanente et dynamique des mouvements de marchandise.

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Commentaire 1
à écrit le 21/04/2023 à 9:36
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On nous façonne un futur que l'on veut absolument nous vendre, alors que c'est dans le passé que l'on obtiendra la résilience nécessaire avec les connaissances d'aujourd'hui ! ;-)

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