Notre déficit commercial n'est pas un drame... voila pourquoi

La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, notre déficit commercial n'est pas un drame...

La France connaît une dégradation continue de ses comptes extérieurs depuis plus de 15 ans. Le déficit de sa balance des paiements oscille depuis 2007 autour de 1% du PIB, quand l'excédent voisinait, voire dépassait 3% du PIB à la fin des années 1990.

En dépit des cris d'alarme, la dégradation est plutôt contenue. C'est plutôt le point de référence des années 90 qui fait figure d'exception sur une longue période. Il n'en reste pas moins qu'un pays qui accumule des déficits à l'égard de l'étranger est a priori un pays qui se met en état de dépendance financière à l'égard du reste du monde.

La France est-elle dans la zone rouge ?

Ce passif est porté par les agents résidents : l'Etat, les entreprises, les ménages et les banques. A la longue, la dégradation de la position financière vis-à-vis du reste du monde peut fragiliser l'économie. Elle l'expose à un risque de liquidité, doublé d'un risque de change. La France se rapproche-t-elle aujourd'hui de la zone rouge en s'installant dans un déficit structurel ?

Première remarque, la France est un pays déficitaire dans une zone-euro globalement super-excédentaire. Cela ne la protège pas de tous les risques, on l'a vu avec la crise des spread européens. Mais il faut pour cela qu'un signal de risque fort soit identifié, sur les banques, sur l'Etat, les entreprises ou les ménages. Et la France est encore loin de cette situation. Aucun de ces agents ne se caractérise par un niveau d'endettement atypique au regard de la moyenne des pays développés. Et la position extérieure nette de la France, c'est-à-dire la différence entre ses actifs sur le reste du monde et ses passifs, demeure dans une zone considérée comme non risquée par les organismes internationaux.

Une situation comparable à celle des économies anglo-saxonnes

Seconde remarque : la France n'est pas seule dans cette situation de déficit structurel.  Comparons le déficit des transactions courantes moyen sur la décennie 2007-2016. Qui trouve-t-on dans les 15 plus lourds déficits ? D'abord des économies qui ont fait l'objet d'une forte attractivité des capitaux étrangers, donc sur-financées par le reste du monde. Les économies du Sud de l'Europe, qui ont explosé en vol, et celles de l'Est qui attirent pour leurs faibles coûts et leur basse fiscalité. Mais l'on trouve aussi des économies anglo-saxonnes : le Canada, les Etats-Unis, la Nouvelle-Zélande, l'Australie, le Royaume-Uni. Leur présence dans les tréfonds du classement, bien en deçà de la France, est riche d'enseignements.

  • 1/ Il n'y a pas de lien immédiat et automatique entre le système fiscal ou règlementaire et la performance extérieure. Les pays cités sont des modèles de flexibilité et de modération fiscale.
  • 2/ Il n'y a pas davantage de corrélation entre leur positionnement technologique et leur leadership en matière d'innovation, et leur performance. En témoigne le cas américain, qui héberge les nouveaux maîtres du monde que sont les GAFA.
  • 3/ Il n'y a pas nécessairement de corrélation entre ces déficits parfois lourds et leur position extérieure nette. Les pays dépensent plus qu'ils ne produisent, mais la qualité et la valorisation des actifs qu'ils acquièrent sur le reste du monde fait plus que compenser la montée de leur endettement. Ces pays bénéficient en quelque sorte de l'effet de levier. Leur endettement à taux faible leur permet d'acquérir des actifs à haut rendement et à fortes plus-values. En témoignent les cas du Canada et du Royaume-Uni notamment.
  • 4/ Ces économies ont pour point commun d'être beaucoup plus tertiarisées que les autres. Désindustrialisées, dirons d'autres. Avec moins de 12% de valeur ajoutée manufacturière, elles pointent en bas du classement des pays de l'OCDE. Ce sont des économies de réseau-monde, dans lesquelles les flux-intragroupes, dématérialisés, souvent mal repérés et mal facturés, jouent un rôle clé dans leur déploiement à l'international.

Pour ces économies, une seule chose est claire : le déficit que l'on repère sur le périmètre des agents opérant depuis le territoire, ne dit pas grand-chose de leur compétitivité réelle.

>> Plus de vidéos sur le site Xerfi Canal, le médiateur du monde économique

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Commentaire 1
à écrit le 07/11/2017 à 11:52
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pour le UK, je suis sceptique. malgré leurs investissements à l'étranger, leur solde des transactions courantes était déficitaire à hauteur de 5,9% PIB en 2016 (0,9% en France ; 2,6% aux US ; 2,7% en NZ et Australie ; 3,3% au Canada). et d'après les...

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