Pour un Choose France orienté vers les entreprises françaises

OPINION. En 2023, Choose France a célébré 28 projets étrangers créant 8 000 emplois et représentant 13 milliards d'euros d'investissements. Face à eux, des entreprises françaises comme Orano et Carbon ont également réalisé d'importants investissements locaux sans que de grandes célébrations collectives ne soient faites aux yeux du grand public et des territoires. Malgré un besoin évident d'encourager l'investissement national pour réduire le déficit commercial et soutenir la réindustrialisation. Par Virginie Saks, Cofondatrice et Associée de Compagnum
(Crédits : DR)

En 2023, Choose France célébrait 28 projets finalisés qui représentaient un total de 8.000 emplois et 13 milliards d'euros d'investissements étrangers. Alors que la France se prépare à accueillir de nouveau les grands patrons de multinationales internationales pour l'édition 2024 du sommet, le 13 mai prochain à Versailles, les dirigeants français y assisteront de loin en lisant les journaux.

Pourtant, les entreprises françaises ne sont pas en reste. En 2023, Orano (ex-Areva, détenu par l'État français) réalise l'un des plus importants investissements en France pour 1,7 milliard d'euros, suivi de près par Carbon, pour 1,5 milliard d'euros. Au cours des 5 dernières années, L'Oréal a investi près de 500 millions d'euros dans ses usines françaises. Une bagatelle.

Alors pourquoi ne pas les inciter à amplifier leurs investissements en France eux aussi ? Pourquoi aller draguer uniquement ailleurs ?

Convaincre les investisseurs français d'investir en France

Certes, les investisseurs et grandes entreprises françaises sont déjà valorisés dans divers événements : BIG, Global Industrie, l'Exposition du fabriqué en France à l'Élysée... Mais ils ne bénéficient pas de sommets de prestige du niveau de Choose France.

Il n'est cependant pas inutile de les convaincre des atouts de la France ; Patrick Pouyanné rappelait lors d'une récente audition au Sénat son choix de ne pas réinvestir dans la production de panneaux solaires en France. Les délocalisations continuent, affectant les Français directement par la fermeture de sites ou indirectement par la mise en difficulté de l'écosystème de sous-traitance par exemple dans l'automobile.

De même, pour élever l'industrie à 12% du PIB, nous ne pourrons pas nous satisfaire des investissements étrangers. En effet, en 2023, les IDE ne représentaient "que" 59 000 maintiens ou créations d'emplois à horizon 3 ans ; or, il nous en faudra 600 000 à horizon 10 ans pour répondre aux besoins de la réindustrialisation. Un différentiel qui compte sur les investissements français en France.

Accélération de grands projets

Car Choose France n'est pas une simple invitation dans les ors de la République. La préparation menée par Business France à l'approche de la date est intense : la Direction intensifie ses relations avec les entreprises et investisseurs étrangers pour préparer leurs annonces. Les investissements en France se feront-ils cette année ? Pour quelles créations d'emplois annoncées ? Cette préparation appuyée permet d'anticiper, de débloquer, voire d'accélérer la réalisation de grands projets, et de valoriser ceux qui investissent au bénéfice des Français. Ceux qui choisissent la France.

Quid de nos grands groupes français ? Accusés d'avoir contribué à la désindustrialisation, ils sont mal-aimés ; mais sont-ils valorisés quand ils investissent dans un projet d'implantation ou d'extension en France ? Quid des entreprises qui ne sont jamais parties, telles que le Groupe Intuis, ETI française qui produit des pompes à chaleur « Made in France » et qui a investi sur son site de Feuquière en Vimeu ? Ou des scales-up industrielles qui investissent massivement sur leurs nouveaux sites, tels que Néolithe qui dédie 50 millions d'euros à son premier site de fossilisation de déchets en Anjou ?

Car à l'heure où nous cherchons un nouvel imaginaire sociétal entre souveraineté et environnement, les Français ont besoin de figures rassurantes en qui mettre leur confiance. Le réinvestissement des entreprises françaises en France nous rappelle à une fierté : celle d'une France qui gagne et retient ses talents. Oui, les entreprises étrangères choisissent la France ; et non, les entreprises françaises ne s'en détournent pas.

Une fenêtre d'opportunité pour un Choose France à la française

En mars dernier à Global Industrie, le ministre de l'Industrie Roland Lescure a annoncé le nouveau baromètre industriel de l'État, maintenu par la Direction générale des entreprises à Bercy. Il s'agit du premier indicateur public officiel sur les ouvertures nettes d'usines, affichant les investissements réalisés et non annoncés comme peut le faire Business France. Un réel effort de réalité envers les Français, qui montre un dynamisme industriel avec 201 ouvertures nettes d'usines en 2023 - investissements étrangers et français confondus. Y aurait-il meilleure opportunité pour célébrer les succès des investisseurs français en France ?

Car à l'heure où la majorité présidentielle est en difficulté politique, un simple baromètre ne suffira pas à mobiliser les Français autour des succès industriels du gouvernement. Il faudra lui adjoindre un événement médiatique, un Choose France français, qui célèbre les investissements majeurs qu'ils proviennent de grands groupes, d'ETI ou de start-up / PME. Et en particulier les investissements français.

À quoi ressemblerait un Choose France à la française ? Imaginons : un événement annuel qui met à l'honneur les résultats plus que les annonces et valorise la responsabilité territoriale de notre industrie. Un mur circulaire qui accueille les photos de ces nouveaux sites pour célébrer leur qualité architecturale, au cœur des ors de la République. Un sommet qui incite encore davantage les services de l'État et collectivités locales à accélérer les délais d'implantation, pour ne pas manquer une opportunité de visibilité toujours bienvenue pour leur territoire. Une mutualisation des efforts avec, par exemple, l'exposition du Fabriqué en France à l'Élysée désormais chaque année en juillet. Une célébration bienvenue qui nous rappellerait que nous aurons la France que nous choisissons.

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(*) Ancienne industrielle, Virginie Saks est depuis 2020 associée une société de conseil sur la collaboration entre industrie et territoire. Elle intervient auprès des entreprises et des collectivités sur l'implantation de nouvelles usines et la valorisation de l'impact territorial de l'industrie.

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