Julien Groues (AWS) : « Pour être souveraines, les entreprises doivent être compétitives et sécurisées »

Une meilleure sécurité, une innovation facilitée, un moindre impact carbone, des économies sur les infrastructures : selon le directeur général d’Amazon Web Services France, le cloud présente de nombreuses vertus pour les sociétés françaises de toute taille, de la start-up au grand groupe. De quoi leur permettre d’accélérer leur croissance comme leur essor à l’international. Entretien.
« AWS s'est notamment fixé comme but de se fournir à 100 % en énergies renouvelables d'ici 2025. » Julien Groues, directeur général d’Amazon Web Services France
« AWS s'est notamment fixé comme but de se fournir à 100 % en énergies renouvelables d'ici 2025. » Julien Groues, directeur général d’Amazon Web Services France (Crédits : DR)

Vous dites qu'Amazon Web Services (AWS) contribue au développement des entreprises françaises. De quelle manière ?

Julien Groues : La priorité des entreprises aujourd'hui est d'être plus compétitives tout en étant plus sécurisées et plus durables. Jusqu'ici, elles devaient souvent choisir entre innover avec moins de sécurité ou innover mais en émettant plus de carbone. Pour la première fois, grâce à l'informatique qui se transforme et au cloud AWS, il est possible de répondre en même temps à l'ensemble de ces enjeux. Tout d'abord, le cloud AWS permet aux entreprises de renforcer leur compétitivité. D'une part, en réalisant des économies sur leurs infrastructures et en libérant ainsi les marges de manœuvre pour se développer. Nous constatons en général que ces économies se situent entre 30 et 80 % comme en témoignent nos clients comme Veolia et Engie. D'autre part, en augmentant leur chiffre d'affaires grâce à l'innovation. Le cloud, en effet, réduit le coût de l'échec, donne la possibilité de tester davantage, nécessite des investissements moins élevés et permet d'avancer très rapidement.

Autrement dit, en créant un environnement dans le cloud pour quelques euros seulement, il est possible de tester une idée en quelques heures au lieu d'attendre des semaines et de longues validations avec une infrastructure sur site. C'est également un atout pour se développer à l'étranger puisqu'une idée peut être développée en France puis déployée partout dans le monde en quelques clics seulement. C'est entre autres pour cette raison qu'un grand nombre de start-up tricolores utilisent nos technologies. D'ailleurs, une étude pour laquelle nous avons mandaté le cabinet de conseil Public First, en collaboration avec l'économiste Christian Saint-Etienne, concluait l'année dernière que les entreprises qui utilisent le cloud croissent plus vite que les autres.

Vous citez également votre technologie en tant que levier de développement durable. Qu'en est-il de l'impact environnemental du cloud ?

J. G. : Notre maison mère, le groupe Amazon, s'est engagée à parvenir d'ici à 2040 à atteindre la neutralité carbone. Des centaines de nos partenaires français nous ont rejoints sur ces objectifs. AWS s'est notamment fixé comme but de se fournir à 100 % en énergies renouvelables d'ici 2025. Par ailleurs, nous constatons que le cloud AWS est environ cinq fois plus efficace comparé à d'autres data centers en France et permet de réduire les émissions de CO2 de nos clients de 80 % en moyenne. Les raisons ? D'abord, une part croissante des énergies renouvelables dans notre mix énergétique. Ensuite, l'efficacité, grâce à la R&D que nous mettons en œuvre dans l'architecture de nos data centers, mais aussi en raison du partage des ressources, puisque nos serveurs sont beaucoup plus mutualisés que ceux des data centers privés. En outre, nous aidons nos clients à développer leurs applications de manière durable. Je constate d'ailleurs en Europe, un intérêt particulier des entreprises françaises pour les approches de réduction de CO2.

Les entreprises françaises sont-elles en retard sur le cloud comparé à d'autres pays ?

J. G. : L'adoption est inégale sur le territoire . Les entreprises de la région parisienne adoptent le cloud plus rapidement que celles des autres régions. Mais de manière générale, nous voyons un véritable engouement pour ces technologies avec une accélération de leur adoption dans les entreprises de toute taille. Nous avons des dizaines de milliers de clients en France : les trois quarts du Next40 et 80 % du CAC40 utilisent d'ailleurs les services d'AWS. Des start-ups, dont la majorité des licornes, aux grands groupes, et ce dans tous les secteurs - la banque en ligne Quonto, la pépite Soitec qui produit du silicium pour puces hautes performances, les médias comme TF1, les acteurs du jeu vidéo tel qu'Ubisoft, Société Générale... tous viennent chercher la compétitivité, mais aussi la sécurité puisqu'aujourd'hui, à l'heure où les cyberattaques ne cessent de se multiplier, ils comprennent qu'ils sont mieux protégés grâce à AWS.

Pour autant, il y a encore des marges pour améliorer l'adoption du cloud en France. L'étude Public First a mesuré que, grâce à AWS, les entreprises françaises ont pu générer 1,6 milliard d'euros de valeur. C'est considérable, mais si elles affichaient les mêmes taux d'adoption du cloud que les entreprises en Angleterre, elles pourraient en générer dix fois plus. Les entreprises anglaises ont en effet commencé à utiliser le cloud plus tôt et se trouvent donc en avance en termes d'années d'expérience. Néanmoins, en France nous sommes sur une bonne trajectoire, les entreprises ont bien compris les enjeux et ont rattrapé leur retard.

Qu'apportez-vous de plus par rapport à vos concurrents sur le marché français ?

J. G. : Nous avons démarré en France en 2006. En tant que pionniers, nous avons donc une grande expérience et une culture dans l'accompagnement de nos clients qui se concentre sur la satisfaction ainsi que sur l'innovation pour les aider à être toujours plus efficaces et plus compétitifs. Nous allons continuer à leur fournir la plateforme la plus complète et la plus robuste du marché car pour nombre d'entreprises, quelle que soit leur taille, il est critique qu'elles puissent s'assurer que leur site internet et leur « supply chain » fonctionnent sans interruption.

Nous sommes ainsi très à cheval sur l'excellence opérationnelle pour que nos services soient toujours disponibles afin que nos entreprises clientes puissent fournir à leurs propres clients une expérience sans faille. Surtout, le cloud AWS leur apporte la sécurité, qui est notre première priorité.

Comment vous insérez-vous dans le tissu économique français et européen et que dites-vous aux entreprises qui s'inquiètent des questions de souveraineté ?

J. G. : Nous avons ouvert nos bureaux en France en 2011 puis l'ensemble de nos data centers en France en 2017 pour que nos clients français et étrangers qui souhaitent héberger leurs données et leurs applications en France puissent le faire. Et nous avons des règles très précises sur les données qui restent la propriété de nos clients. Eux seuls y ont accès et s'ils décident de quitter AWS ils peuvent le faire rapidement en reprenant leurs données quand ils le souhaitent.

Je suis convaincu que pour être souveraines, les entreprises doivent être compétitives et sécurisées et c'est ce que nous leur permettons. Avoir le meilleur de la technologie leur permettra de se développer.

Le Cloud Act (Clarifying Lawful Overseas Use of Data Act) permet aux juges américains de demander des données. Etes-vous en mesure de refuser cela ?

J. G. : Il y a beaucoup de mythes autour du Cloud Act. Cette législation ne permet pas aux forces de l'ordre américaines d'avoir un accès illimité aux données. Cela doit passer l'émission d'un mandat délivré par un juge indépendant dans le cadre d'une enquête criminelle. En outre, cela ne modifie pas du tout la manière dont nous protégeons les données de nos clients. Nos clients gardent le contrôle de leurs données et nous fournissons un certain nombre de services de chiffrement avancé. Nos clients peuvent en plus choisir de chiffrer leurs données dans le cloud avec leurs clés - nous n'y avons pas accès.

Même en cas de demande, le contenu chiffré est inutile sans les clés de déchiffrement applicables. En somme, aujourd'hui en France, les données chiffrées de nos clients sont extrêmement bien protégées.

Dans quelques semaines s'ouvre à La Défense le Campus Cyber, une plateforme qui vise à fédérer les acteurs de la cybersécurité. AWS y sera présent. Quel rôle entendez-vous jouer au sein de cet écosystème ?

J. G. : Nous sommes très attachés aux questions de la sécurité. Face au fléau des cyberattaques contre les entreprises et les organisations, nous nous efforçons d'aider nos clients, d'investir dans la formation des talents français pour combattre cette cybercriminalité qui avance très rapidement et de continuer d'innover pour permettre aux entreprises de se protéger.

AWS a une approche de la sécurité partagée : nous sommes responsables de la sécurisation de nos infrastructures, tandis que nos clients sécurisent leurs applications eux-mêmes avec nos outils et avec notre aide lorsqu'ils en font la demande, ou avec un de nos partenaires spécialisés. La formation et la compréhension des bonnes pratiques sont clés, c'est pour cela que nous sommes ravis de voir la naissance du Campus Cyber.

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