LA TRIBUNE - L'agglomération de Strasbourg a jeté les bases d'un réseau transfrontalier de chaleur. De quoi s'agit-il ?
ROBERT HERRMANN - Badische Stahlwerke exploite à Kehl l'une des plus grosses aciéries allemandes. Ils ne savent que faire de cette chaleur résiduelle. L'usine se trouve à quelques centaines de mètres des quartiers densément habités du nord de l'agglomération de Strasbourg. L'idée consiste à récupérer la chaleur et à aménager un caloduc [dispositif de transmission de la chaleur, Ndlr] qui passerait sous le Rhin. Nous pouvons alimenter jusqu'à 30.000 foyers avec cette énergie. Soit 45 gigawatts qui, sinon, continueront d'être perdus.
Mais le projet n'avance pas. Où sont les blocages ?
L'idée a été lancée il y a cinq ans. Nous avons signé cette année un accord de principe avec l'entreprise allemande. Il ne reste plus qu'à établir une société d'économie mixte pour permettre l'investissement. Mais pour être compétitive, cette énergie aura besoin d'un coup de pouce fiscal. Nous voulons être certains d'avoir droit à un taux de TVA réduit. Le gouvernement n'est ni pour ni contre, il ne nous répond pas ! Notre projet est pourtant conforme aux principes défendus par le traité d'Aix-la-Chapelle, signé au début de cette année entre la France et l'Allemagne. Le ministère de l'Action et des Comptes publics doit nous donner son feu vert.
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Quel peut être le rôle de votre collectivité dans la transition énergétique ?
Avec Kehl, nous visons la neutralité carbone à l'échelle transfrontalière en 2050. La transition énergétique ne pourra réussir que si l'on change les comportements individuels et si on laisse agir les collectivités. À Strasbourg, nous essayons d'être créatifs. Nous avons déjà créé une installation pour fabriquer du gaz biométhane à partir des boues de notre station d'épuration.
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Nous défendons un projet de géothermie profonde qui nous placerait à l'abri de toute dépendance à l'égard de nos approvisionnements en énergie. Là aussi, j'apprends que les aides à cette technologie émergente vont être coupées. Cette filière représente pourtant un potentiel évident, y compris pour la production de lithium. J'ai le sentiment que le gouvernement est beaucoup trop tatillon.
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Propos recueillis par Olivier Mirguet.
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