SNCM : Quel avenir au delà des échéances municipales ?

Le ministre des Transports Frédéric Cuvillier a reçu mercredi 8 janvier à Paris les syndicats de la SNCM et de la CMN pour une réunion qui n’était pas programmée mais qui aura été finalement dépêchée à la demande insistante d’élus marseillais. Les choses vont très probablement se décanter à l’issue de l’assemblée générale des organisations syndicales de ce jeudi 9 janvier à 13H30 avec reprise du travail mais les questions demeurent : quel avenir pour la SNCM au-delà des échéances électorales ?
Selon Christian Garin, l’ancien directeur du Port autonome de Marseille, la SNCM est une entreprise est viable si elle dispose d’un “outil naval adapté”.

"Conditions réunies pour une reprise de l'activité", a estimé le Ministre des Transports. "Rencontre constructive", ont affirmé les syndicats représentant les marins de la SNCM et de La Méridionale à l'issue de leur rencontre mercredi 8 janvier avec le Ministre délégué aux transports. Les choses semblent se décanter et le trafic pourrait bien reprendre aujourd'hui à l'issue de l'assemblée générale ce jeudi 9 décembre à 13h30. Depuis le 1er janvier, l'ensemble des organisations syndicales de la SNCM (à l'exception du STC, syndicat autonomiste corse représentant 10 % du personnel de la SNCM) et, fait plus rare, de la Méridionale (partenaire de la SNCM pour l'exécution de la DSP de la desserte maritime de la Corse à partir du port de Marseille, où les jours de grève sont quasi nuls et qui, fidèle aux termes du contrat qui la lie "conjointement mais de manière non solidaire" à la SNCM, ne s'est jamais sentie concernée par ses problèmes) sont en grève pour réclamer la mise en œuvre du plan de restructuration qu'ils ont validé récemment et indissociable pour eux de l'entrée d'un nouvel actionnariat qualifié "d'intérêt général" pour remplacer Veolia-Transdev (Transdev, la filiale transports de Veolia, détient 66 % du capital de la compagnie, aux côtés de l'État avec 25 % et des salariés avec 9 %). Depuis la validation du plan "Dufour" (*) par l'ensemble des actionnaires, auquel était subordonnée la mise en place d'un nouveau pacte social approuvé à la majorité (59 %) par le personnel, la "compagnie maritime est bloquée à chaque fois qu'elle cherche à l'appliquer", tranche un cadre de la société.

Nœud gordien

Considéré comme un fardeau économique et social depuis des années par les gouvernements successifs, le dossier de la SNCM s'apparente aujourd'hui à un véritable nœud gordien sur fond de tensions à la fois entre l'État français et l'Europe (qui réclame 440 M€ à l'opérateur de transport), entre l'État et Veolia, qui tous deux, pas pour les mêmes raisons ni avec la même temporalité, auraient un intérêt à voir disparaître cette entreprise au passif encombrant. Le premier est soupçonné de jouer l'attentiste pour gagner du temps pour des raisons purement électoralistes compte tenu des enjeux sociaux et collatéraux (2 000 salariés, avenir de la DSP). Le second, qui cherche à se désendetter par tous les moyens, ne verrait pas d'un bon œil tout investissement qui pourrait impacter son œuvre d'assainissement. On reproche au seul actionnaire privé sur le sujet SNCM, qui ne s'exprime plus sur le sujet, de gager sur un dénouement opportuniste de la situation : "Il attend que le fruit tombe après pourrissement. Rendez-vous en octobre prochain à l'échéance d'une nouvelle année comptable", assure-t-on du côté de ceux qui suivent le dossier au fil de l'eau.

Vente à la casse des dépouilles ?

L'État ne semble pas non plus très pressé de faire entrer un nouvel actionnaire, ce qui pourrait lui permettre pourtant de sortir. Et les 30 M€, offerts en guise d'étrennes le 31 décembre dernier par le Premier ministre Ayrault qui permettent de tenir jusqu'à l'ouverture de la saison, ne font qu'alimenter encore davantage les soupçons des uns et des autres à propos d'un engagement en faveur de solutions pérennes. Le cabinet du Ministère des transports, où officie Emmanuel Kesler en tant que directeur du cabinet, le même qui a géré le dossier Seafrance, fait craindre aussi un dénouement comparable.

Changement d'équation vital

Or, le changement d'équation économique est vital pour l'entreprise, placée depuis octobre en procédure de conciliation auprès du Tribunal de commerce de Marseille pour éviter une cessation de paiement. On ne pourra pas cette fois, comme il est de bon ton ici, de reprocher aux syndicats de creuser leur tombe dans la mesure où, véritable révolution sur le port, les organisations syndicales demandent précisément que l'on "n'arrête de perfuser" à coups d'injections à perte mais que l'on donne les moyens à l'entreprise d'appliquer son changement de schéma économique.

Réelles avancées ?

À l'issue de la rencontre, Frédéric Cuvillier a indiqué que "le moment est venu pour que chacun prenne ses responsabilités". Il s'est engagé à réunir les collectivités "pour préciser sous quelle forme elles souhaitent intervenir." Selon lui, la Banque publique d'investissement et la Caisse des dépôts (actionnaire de la SNCM via Transdev), seront mobilisées en vue d'"analyser les solutions financières pour l'achat de quatre nouveaux navires." Une phrase lourde de sens tant ces derniers jours, les parties prenantes ne semblaient pas parler du même plan ! (les services de l'État évoquaient l'acquisition d'un seul navire).

Le concurrent Corsica Ferries dans le viseur

Le représentant de la CGT-Marins de la SNCM, Frédéric Alpozzo, attend désormais des "actes matérialisés par écrit". Ainsi que, sur un autre plan, des engagements sur les conditions d'armement applicables au cabotage national. Un décret anti-dumping social, l'une des principales revendications des salariés de la SNCM, est en cours de rédaction dans le cadre de la loi Cuvillier de mai 2013. Ils demandent à cet égard de rendre obligatoire pour toutes les compagnies ayant des activités en France l'inscription sous pavillon français "premier registre". Avec dans le viseur, le concurrent Corsica Ferries (par ailleurs à l'origine des démêlées judiciaires de la SNCM avec l'Europe), entreprise française basée à Bastia mais naviguant sous pavillon italien, source, selon eux, de distorsion de concurrence. Une réunion est prévue à ce propos ce jeudi 9 janvier au ministère des Transports avec les syndicats nationaux de marins et Armateurs de France.

Et l'on reparle de repreneurs potentiels

Dans un entretien accordé au journal spécialisé Le Marin, Christian Garin, l'ancien directeur du Port autonome de Marseille, dont le JDD avait révélé dans son édition de dimanche dernier son intérêt pour la reprise de la SNCM avec le groupe norvégien Siem Industries, confirme (après avoir démenti) suivre le dossier. Et son intérêt se porte sur une compagnie avec "quatre navires neufs comprenant un apport de fonds propres de notre part avec un montage financier à condition que le plan social soit financé par les actionnaires sortants, que les pertes de 2013 des deux années suivantes (soit un total estimé par ses soins à 140 M€ NDLR), c'est-à-dire avant l'introduction des nouveaux navires, soient couvertes" et que les différends avec l'Europe soient réglés. Christian Garin affirme que Veolia n'a pas accepté cette offre.

Entreprise viable, si...

Quoi qu'il en soit, tout comme d'autres opérateurs, l'ancien directeur du port de Marseille, confirme que l'entreprise est viable si elle dispose d'un "outil naval adapté". Ce qu'un professionnel, tenu par le devoir de réserve, confirme. "Le problème de la SNCM, c'est sa flotte. Les cars-ferries sont d'irrémédiables pôles de pertes", lequel jugerait également pertinent l'extension au Maghreb. "Quelle entreprise ne pourrait pas être viable avec 65 % de son chiffre d'affaires assuré pendant 10 ans ?".

Financement

L'actuel patron de la SNCM et ancien président de la compagnie aérienne défunte Air Littoral Marc Dufour disait, pour le financement des 4 navires, vouloir s'inspirer des montages déconsolidants, classiques dans l'aérien et particulièrement adaptés pour les investissements lourds qui font fuir les banquiers au regard de la durée d'amortissement des navires. Les techniques de déconsolidation ont été développées pour "sortir du bilan" une partie de l'endettement des entreprises. Les actifs sont sortis ou apportés à une société ad hoc avec l'endettement corrélatif.

 

(*) changement du schéma d'exploitation avec une flotte composée de navires mixtes de types Ropax, nécessitant l'acquisition de 4 nouveaux navires et prévoyant la suppression sur plusieurs années de 519 postes

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Commentaires 7
à écrit le 14/02/2014 à 12:51
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virer tous la chienlit et louerla concession au prive ,et ca sera 2 fois gagnant !!

à écrit le 17/01/2014 à 13:22
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Bravo, enfin un article qui sort des clichés ordinaires. Oui la SNCM est viable si l’État fait enfin son travail. Non les syndicats ne sont pas « les fossoyeurs de la compagnie ». Oui la Corsica Ferries a bénéficié d’une distorsion de concurrence. ...

à écrit le 16/01/2014 à 19:42
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Bravo, enfin un article qui sort des clichés ordinaires. Oui la SNCM est viable si l’État fait enfin son travail. Non les syndicats ne sont pas « les fossoyeurs de la compagnie ». Oui la Corsica Ferries a bénéficié d’une distorsion de concurrence. ...

à écrit le 16/01/2014 à 13:24
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Bravo, enfin un article qui sort des clichés ordinaires. Oui la SNCM est viable si l’État fait enfin son travail. Non les syndicats ne sont pas « les fossoyeurs de la compagnie ». Oui la Corsica Ferries a bénéficié d’une distorsion de concurrence. ...

à écrit le 15/01/2014 à 14:40
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Bravo, enfin un article qui sort des clichés ordinaires. Oui la SNCM est viable si l’État fait enfin son travail. Non les syndicats ne sont pas « les fossoyeurs de la compagnie ». Oui la Corsica Ferries a bénéficié d’une distorsion de concurrence. ...

à écrit le 14/01/2014 à 19:12
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Bravo, enfin un article qui sort des clichés ordinaires. Oui la SNCM est viable si l’État fait enfin son travail. Non les syndicats ne sont pas « les fossoyeurs de la compagnie ». Oui la Corsica Ferries a bénéficié d’une distorsion de concurrence. ...

à écrit le 12/01/2014 à 10:36
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Souvenez vous de sea france, celà se terminera inévitablement de la même façon!

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