Loiretech, porte-drapeau européen dans les matériaux composites

Grâce au pôle de compétitivité EMC2, la société nantaise, autrefois spécialisée dans les tableaux de bord pour automobiles, a pu se diversifier et percer dans les matériaux composites. Au point d’avoir fédéré d’autres PME européennes pour mettre au point un procédé permettant de fabriquer des pièces de grandes dimensions pour l'aéronautique.
Marc Moret, PDG de Loiretech, investit beaucoup dans la R&D afin de développer un logiciel capable d'usiner les grandes pièces en matériaux composites aussi finement que des matériaux traditionnels. / Dr

Dix ans après avoir pris une orientation stratégique vers les matériaux composites, la société Loiretech vient de pésenter, en première mondiale à l'occasion du salon des composites JEC Europe 2014, un procédé de chauffage inédit pour fabriquer des pièces en composites à partir de flux micro-ondes.

Deux fois plus rapide et deux fois moins gourmande en énergie qu'une chauffe traditionnelle en autoclave, cette technologie va permettre de réduire les cycles de fabrication.

Accélérer les cadences de production

Un des freins actuel au développement du composite dans l'aéronautique.

"L'idée du micro-ondes émise par le Dr Lambert Feher en Allemagne était en sommeil. Le laboratoire britannique TWI recherchait des partenaires pour développer cette technologie. C'est une veille du pôle de compétitivité EMC2 qui nous a alertés", explique Marc Moret, président de Loiretech, PME installée à Mauves-sur-Loire dans la région nantaise.

Lancé il y a trois ans, le projet associe des pme allemande (Neocid), britannique (Microcab), turque (Sampas Nanotechnology) et deux centres de recherche de Cambridge (TWI) et Göteborg (Swerea IVF) au sein du consortium européen "Mµ Tools", piloté par Loiretech, qui participe à hauteur de 563.000 d'euros sur un budget global de 1,16 millions d'euros.

Chacun disposant ensuite d'une licence d'exploitation, négociée au prorata de son intervention. Au stade préindustriel, le procédé devra encore bénéficier d'un programme de R&D de 3 ans avant d'être véritablement industrialisé.

"Le temps de fabrication d'une pièce en composite prendra une minute quand un système traditionnel nécessite 3 à 6 minutes", assure Marc Moret. Pour Loiretech aussi, le temps s'est accéléré.

Ex-DG d'un groupe de 500 personnes et désireux de devenir actionnaire, Marc Moret reprend Loire Modelage en 2003, une PME, spécialisée dans la fabrication de planches de bord et pare-chocs en thermoplastique pour l'automobile. Un marché en perte de vitesse. L'entreprise s'oriente résolument vers les fibres composites. Loire Modelage devient alors Loiretech. Elle produit l'outillage et les moules nécessaires à la fabrication de pièces de grandes dimensions pouvant aller jusqu'à 20 mètres. Et trouve dans la région des Pays de la Loire les soutiens adéquats.

"La création du pôle de compétitivité EMC2 en 2006 nous a permis d'entrer dans de nombreux programmes de recherche avec Airbus, l'équipementier Daher... Quand l'IRT Jules Vernes s'est créé dans le cadre des investissements d'avenir, on s'est dit, faut qu'on en soit...ça nous permet d'aller vers des sujets plus techniques", raconte le patron de Loiretech.

Marc Moret a pris la direction du GIE Albatros, membre de l'IRT Jules Verne, qui réunit 14 PME, actives dans les composites. Toutes peuvent s'impliquer dans des projets de recherche. Six à huit projets sont lancés dont deux d'entre eux associent de grands groupes et trois PME. A l'instar du programme "Robofin" destiné à améliorer la finition des pièces en composites, où se rencontrent le chantier Naval STX, Daher, Multiplast, Europe Technologies, Coriolis composites, l'Université de Nantes et Loiretech.

"Que ce soit pour de l'assemblage, de la découpe, des finitions, les robots sont très rapides mais peu précis", explique Marc Moret.

Un frein à l'industrialisation du composite

Les recherches se concentrent donc sur la conception d'un logiciel qui permettra à l'usinage de rivaliser avec la précision obtenue sur un matériau traditionnel.

"Avec un coût d'exploitation inférieur", précise-t-il.

Depuis son orientation vers les composites, Loiretech investit de 4% à 10% de son chiffre d'affaires en R&D chaque année, et est partie prenante dans deux autres programmes européens (Walid et Corac) liées aux nouvelles technologies dans l'éolien et l'aéronautique.

"Il faut toujours avoir un cran d'avance sur la technologie de l'outillage", répète Marc Moret.

En dix ans, l'effectif est passé de 19 à 55 salariés dont 4 affectés à la R&D. Tourné à 80% vers les composites et 20% vers le thermoplastique, le CA a doublé pour atteindre 6 M€ en 2013, dont 50% sont réalisés à l'export (Europe, Russie, Israël, Canada, etc.). Car, si le marché français est intéressant en termes de stratégie de réindustrialisation, il est indispensable d'aller voir ailleurs.

"Etre à l'international nous donne une visibilité plus large des attentes de la clientèle. Or, le marché européen est mature et offre peu de perspective d'évolution. Là, encore, la CCI nous a parfaitement accompagnés en facilitant les rapprochements", souligne le dirigeant qui préfère cibler les marchés émergents de l'Inde, la Chine, le Brésil ou le continent américain.

En ce sens, et pour se rapprocher de son client canadien Bombardier, Loiretech a investi dans une filiale de production au Québec fin 2013, en partenariat avec l'entreprise locale Composites VCI. Basée à Mirabelle, près de Montréal, Loiretech Canada emploie aujourd'hui 15 personnes. Une nouvelle dimension pour la PME nantaise qui n'exclut pas, non plus, de s'ouvrir à d'autres types d'outillages.

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Un guichet unique pour le composite

C'est un label, ou plutôt une marque commune et une étape importante pour changer d'échelle : annoncée lors du JEC Europe 2014, la création d'une "Jules Verne Manufacturing Valley" doit favoriser un partage des compétences et faire la promotion du collectif ligérien. Une sorte de guichet unique du "composite".

"Qui se traduira par la mise en service d'une plateforme Internet. Objectif : être opérationnel en octobre prochain", explique Stéphane Cassereau, DG de l'Institut Régional de Technologie (IRT) Jules Verne, qui accueillera les 20 et 21 octobre prochain à Nantes, le forum national des IRT.

"On essaie de dire aux PME : prenez votre destin en main et ayez les cartouches pour aller voir d'autres clients dans le monde", explique Patrick Cheppe, président du pôle de compétitivité EMC2, à l'origine du développement de la filière composite en Pays de la Loire.

Au fil des années, celle-ci s'est enrichie des Technocampus EMC2 et Océan, de l'IRT Jules Vernes, centre de recherche mutualisé autour des technologies avancées de production, pour les structures composites, métalliques et hybrides.

La filière rassemble 90 entreprises (11.500 salariés), 22 laboratoires et 12 centres techniques. Signe de la pertinence de cette filière, l'IRT Jules Verne vient de signer un accord de collaboration internationale avec les instituts allemands de la Fraunhofer Gesellschaft, réputés pour être une référence en la matière.

De 2014 à 2018, le déploiement de ce projet ira jusqu'à l'implantation d'une première filiale française à Nantes comprenant 15 chercheurs. De son côté, le pôle EMC2 vient de signer un accord de coopération avec les japonais du National Composites Center Nagoya University, l'Ishikawa Composites Center et le Composite Materials Center Gifu University, identifiés comme le fleuron de la R&D sur le marché international des composites.

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