IA générative : pour les entreprises, le vrai risque est de laisser passer la « révolution »

Le 5 mars, à l’hôtel des Arts et Métiers, à Paris, Publicis Sapient conviait des entreprises pour évoquer le pouvoir de transformation de l’IA générative. Si la vague est là, les contraintes à lever restent nombreuses.
« Les entreprises que nous accompagnons ne cherchent pas à diminuer leurs investissements mais à faire plus ou plus vite avec les mêmes équipes » affirme Lise Malbernard, Directrice Générale de Publicis Sapient France
« Les entreprises que nous accompagnons ne cherchent pas à diminuer leurs investissements mais à faire plus ou plus vite avec les mêmes équipes » affirme Lise Malbernard, Directrice Générale de Publicis Sapient France (Crédits : DR)

L'année 2023 a été celle de la montée en puissance de l'IA générative au sein des entreprises et ChatGPT n'est que l'arbre qui cache la forêt. Le marché mondial de la « GenAI » devrait passer de 111 millions de dollars en 2019 à 4,5 milliards de dollars d'ici un an. Après la cloudification, une nouvelle révolution a débuté, dans laquelle les entreprises sont en première ligne. « Dans les années à venir, la puissance de ces outils ne fera qu'augmenter, nous sommes dans un mouvement exponentiel qui voit une démocratisation des usages », observe Lise Malbernard, Directrice Générale de Publicis Sapient France.

L'IA générative représente un « tournant historique » pour les entreprises, selon le cabinet de conseil en transformation digitale. Ses modèles probabilistes fondés sur le LLM (grand modèle de langage en français) couvrent aujourd'hui diverses dimensions : la génération de contenus, la génération d'informations, le développement de logiciels (en anglais Software Development) ou encore les interfaces machine-machine, soit les échanges de données entre ces dernières. Leurs applications ouvrent principalement la voie à l'automatisation à court terme - 70% des cas d'usage selon Publicis Sapient - et à « l'augmentation » des salariés, grâce aux divers copilotes. Enfin, elle permet de développer des services impossibles à faire auparavant.

Quels gains de productivité ?

Si les médias et les métiers du marketing ont déjà bien intégré l'IA générative, tous les secteurs ou presque sont ou seront concernés, en particulier sur la partie Software Development, éclaire Lise Malbernard. « Les entreprises que nous accompagnons ne cherchent pas à diminuer leurs investissements mais à faire plus ou plus vite avec les mêmes équipes ». Publicis Sapient a développé ses propres outils. Le premier facilite la création des couches d'infrastructure, l'ensemble des composants matériels et logiciels nécessaires à la création puis à l'entraînement des modèles d'IA. L'autre, PS Copilot, aide les développeurs sur le code et le test. « C'est sur ce dernier point que les gains de productivité sont les plus élevés, compris entre 20 et 40 % au fil du temps, avance Lise Malbernard. Ce qui accélère fortement la mise sur le marché ».

Bien ciblée et utilisée, l'IA générative a un impact notable. Au Royaume-Uni, l'entreprise Octopus Energy a vu le taux de satisfaction de son service clients passer de 65 % à 80 % grâce à son adoption. Mais malgré ces premiers succès, les freins comme le manque de fiabilité des résultats sont courants, avertit la Directrice générale de Publicis Sapient. Pour Lise Malbernard, la première question à se poser est celle de la valeur ajoutée. « Il faut veiller également à disposer dès le départ de l'outillage, d'une gouvernance, d'un code d'éthique, des compétences, de l'accès à une donnée en quantité, qualité suffisante et bien structurée et enfin d'une stratégie claire avec les partenaires, dont les Cloud providers et les fournisseurs de modèles. Sans cette base, cela peut devenir très coûteux ». Ensuite, l'approche « test and learn » est à privilégier. « Notre parti pris consiste à tester vite, corriger et si besoin stopper. Savoir arrêter, c'est important ».

Les sujets de gouvernance des risques et d'éthique forment sans surprise l'autre grand frein à lever. « Chaque client s'interroge sur la manière dont il veut utiliser l'IA générative, éclaire Lise Malbernard. Certains, en particulier dans le secteur du luxe, tiennent ainsi à rester propriétaires de leur contenu, ce qui n'est pas toujours compatible avec l'IA générative. Dans certains cas, elle n'est donc pas adaptée au business ».

Une gouvernance à modifier

D'autres réticences concernent le coût social ou encore environnemental potentiel du recours à l'IA. Quant à la gouvernance, la clarification du cadre s'impose. « Il n'est pas possible de réutiliser des gouvernances précédentes. Le contexte de l'IA générative est plus complexe et touche plus de strates de l'organisation », rappelle Lise Malbernard. Car, quand les métiers peuvent si facilement s'approprier certains outils d'IA générative, qui surveille et harmonise ? Il est certain que la montée en puissance de l'IA va de pair avec celle des risques. L'arrivée récente de Sora, le générateur de vidéos d'OpenAI, ou le générateur vidéo/voix d'ElevenLab en sont des exemples. Jamais le risque de dérive autour des deepfakes, ces vidéos fausses mais ultra-réalistes, n'aura été aussi élevé. « La création d'un poste de Chief AI Officer constitue une réponse et surtout d'un réseau de référents», estime Lise Malbernard.

Quels que soient les freins et les craintes, l'IA générative conserve un véritable pouvoir de transformation positive. Mais il est certain que les compétences et le rapport au travail vont changer, et dans certains cas de façon radicale. « C'est une révolution qui créera aussi des emplois. Nous devons cependant tous veiller à ce que certaines personnes ne soient pas laissées de côté, notamment les femmes, aujourd'hui moins nombreuses dans ces métiers de la data et de la tech », conclut Lise Malbernard.

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Commentaires 2
à écrit le 04/04/2024 à 23:32
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Le développement et la commercialisation à grande échelle de l'intelligence artificielle sont aujourd'hui dominés par les géants technologiques principalement basés aux États-Unis et en Chine, créant un écart d'investissement abyssal entre ces mastod...

à écrit le 14/03/2024 à 11:22
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Oui mais regardez comme toutes nos données sensibles déversées sur internet, car nous y avons été contraints, aucun libre arbitre là dessus, nous avons été obligés de les y mettre et pire ce n'est même pas nous qui les y avons mises ces données sensi...

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