Apple, la stratégie du dos rond en attendant le rebond

Après un nouveau trimestre décevant et malgré des prévisions optimistes pour la fin de l’année, Apple peine à rassurer ses investisseurs, qui s’interrogent sur la stratégie et la vision de Tim Cook.
Sylvain Rolland
Il est désormais admis qu'Apple ne dispose plus d'une confortable avance, ni sur le plan technologique, ni sur celui de la vision stratégique.

Une scène intéressante et révélatrice s'est déroulée mardi soir, lors de la présentation des résultats du troisième trimestre d'Apple. Juste après leur publication, le Pdg, Tim Cook, et le directeur financier, Luca Maestri, se sont livrés à la traditionnelle séance de questions/réponses avec des analystes. Mais cette fois, le successeur de Steve Jobs n'a pas aimé certaines questions, et a même eu du mal à masquer son irritation. "Apple a-t-il une grande stratégie pour le long terme ? Je sais que vous ne la révélerez pas, mais en avez-vous au moins une ?" demande un impertinent analyste. Face à la réponse, très évasive ("nous sommes confiants et focalisés sur l'innovation"), d'autres enchaînent : "Etes-vous dans la maîtrise ou vous contentez-vous de réagir au marché ?"

L'aura d'Apple s'affadit

Impensables il y a quelques années, ces questions gênantes révèlent l'inquiétude grandissante autour de la capacité d'Apple à innover, et traduisent la perte d'aura de la marque à la Pomme. Que des spécialistes en arrivent à demander ouvertement si la firme des révolutions technologiques que furent l'iPod, l'iPhone et l'iPad dispose d'une stratégie pour les dix prochaines années, est un revers symbolique. "Désormais, plus personne ne prend que ce dit Apple pour argent comptant", écrit même Bloomberg.

Les résultats financiers du troisième trimestre, décevants, n'ont pas surpris les marchés, qui les avaient anticipés. Mais le constat reste sans appel: pour la première fois depuis 2001, Apple présente un chiffre d'affaires, une marge brute et un revenu par action en chute sur un an, de respectivement -8,9%, -4,8% et -14,8%. Ce déclin s'explique par la baisse des ventes de tous ses produits phares (-5,3% pour l'iPhone sur un an, -6,8% sur l'iPad et -15,8% pour le Mac).

Mais l'impact vient surtout de l'iPhone, qui à lui seul représente presque les deux tiers du chiffre d'affaires du groupe. En proie à des difficultés sur le marché asiatique très concurrentiel (les ventes ont reculé de 30% en un an), et à des nouveaux modèles perçus comme pas assez innovants, Apple subit aussi la stagnation du marché mondial du smartphone. Ce qui soulève, une nouvelle fois, la question de sa dépendance à son produit phare. Et donc, par ricochet, l'absence de plus en plus criante d'un nouveau produit aussi révolutionnaire capable de prendre le relais, comme le montre ce graphique de BI Intelligence:

Apple

Donner le change avec un bon quatrième trimestre

Comme prévu, les marchés n'ont pas apprécié, mais sans s'affoler non plus. Le titre n'a perdu que 2% dans les échanges post-clôture, en partie parce que Tim Cook a annoncé des prévisions qui devraient permettre à Apple de retrouver le chemin de la croissance au quatrième trimestre. Grace à l'effet "fêtes de fin d'année" et au déploiement de l'iPhone 7, sorti en septembre, Apple espère réaliser entre 76 et 78 milliards de dollars de chiffre d'affaires, alors que les analystes visaient en moyenne 75 milliards. Si la firme de Cupertino ne se trompe pas, elle pourrait même battre le record du quatrième trimestre 2015 (75,9 milliards).

Apple a donc de quoi donner le change, et pour un petit moment. D'autant plus que sa situation, certes problématique sur le long terme, reste très favorable. Avec 9 milliards de dollars de bénéfices, un chiffre d'affaires global de 46,9 milliards de dollars au seul troisième trimestre, et des ventes d'iPhones toujours astronomiques bien que décevantes (-5% sur un an, mais tout de même 45,5 millions de produits écoulés en trois mois!), Apple reste, de loin, l'une des entreprises les plus profitables au monde.

De plus, la firme ne compte pas laisser ses principales sources de revenus se tarir. Apple va relancer ses MacBook Pro en révélant dès jeudi soir un nouveau modèle, dont les caractéristiques ont déjà fuité. Surtout, l'iPhone 8, prévu pour l'automne prochain pour fêter les 10 ans du produit, s'annonce enfin véritablement innovant (écran OLED incurvé, étanchéité totale, compatibilité avec la réalité virtuelle et la réalité augmentée, coque en céramique...).

Des difficultés en Asie, même avec le crash de Samsung

Mais il est désormais admis qu'Apple ne dispose plus d'une confortable avance, ni sur le plan technologique, ni sur celui de la vision stratégique. L'Asie illustre bien les difficultés actuelles du géant de Cupertino. Il y a un an, la Chine tirait la croissance du groupe vers le haut, avec un chiffre d'affaires de 12 milliards de dollars (contre 21 milliards aux Etats-Unis et 10 en Europe). Mais au dernier trimestre, les ventes d'iPhones ont baissé de 30% sur un an dans l'ex-Empire du milieu. Rattrapé technologiquement, Apple y subit la concurrence de plus en plus acharnée d'acteurs locaux comme Huawei, Xiaomi et Oppo, qui montent en gamme. Sur les cendres encore chaudes du Galaxy Note 7 de Samsung, Xiaomi vient d'ailleurs de révéler un nouveau smartphone destiné à concurrencer frontalement l'iPhone. Mauvaise nouvelle pour Apple : le design futuriste et les performances de son Mi Mix ont d'ores et déjà bluffé les critiques.

Il semblerait aussi que le crash en plein vol de Samsung, qui était jusqu'à présent le concurrent le plus sérieux à l'iPhone, ne profite pas tant que ça à Apple. D'abord parce que les concurrents asiatiques ne laisseront pas passer l'occasion de grappiller eux-aussi quelques parts de marché. Ensuite parce qu'Apple ne pourra pas répondre à la demande, d'ici à la fin de l'année, sur son modèle iPhone 7 Plus, l'équivalent du Galaxy Note 7. Selon Luca Maestri, le directeur financier de la marque, la complexité de la production de ce modèle premium ne permettra pas d'en faire le "plan B" des utilisateurs déçus de Samsung.

Sylvain Rolland

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Commentaires 7
à écrit le 27/10/2016 à 15:38
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Sous Steve Job, Apple se fixait comme objectif de produire des appareils d'une ergonomie, d'une fonctionnalité, d'un design et d'une fiabilité parfaite. L'entreprise considérait que sa vision du produit idéal primait sur tout le reste : Les actionna...

à écrit le 27/10/2016 à 13:36
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J'ai un iPhone 7 et on voit que steve Job est parti Les ingénieurs reprennent le dessus Le bouton home Le glisser pour ouvrir qui a disparue c'est très penible il s allume dans la poche Idem sur plein de détails Apple va doucement devenir comme ...

à écrit le 27/10/2016 à 11:33
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Bonjour, En Français, on parle d'entreprises "rentables"et non "profitables". Stop au franglais!

à écrit le 27/10/2016 à 10:13
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Les téléphones chinois, 8 fois moins chers que les apple et 4 fois moins chers que les samsung sont en train de tout emporter. Vu que les ménages connaissent une baisse de pouvoir d'achat constante c'est logique.

le 27/10/2016 à 14:32
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Tu parles des wiko ? Pour l'instant la qualité est moyenne, sans parler du SAV etc...

le 27/10/2016 à 15:45
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Non je parle DES téléphones chinois, c'est écrit dans mon commentaire pourtant.

à écrit le 27/10/2016 à 9:28
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Les prochaines innovations serons dans les domaines du spatial, de la robotique, de la médecine assistée par ordinateur ou opérée par robot interposé, mais également les IA d'aide à la décision pour traiter des masses d'informations issues du Big Dat...

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