Informatique quantique : Atos investit 60 millions d'euros, la filière angevine revit

Le leader de la sécurité numérique Atos vient d’annoncer un investissement de 60 millions d’euros à Angers pour (re)construire un site industriel destiné à devenir le symbole européen de la marque. Objectif de cette usine spécialisée dans la conception et la fabrication de serveurs et de supercalculateurs : des gains de productivité de 30% et une empreinte carbone « zéro émission nette».
Devenue plus discrète depuis un an, la Division Big Data et Cybersécurité, qui représente 10% de l'activité d'Atos, réalisait en 2020 un chiffre d'affaires de 1,2 milliard d'euros, en croissance (organique) de 15,8%. Ce nouveau site devrait booster l'activité.
Devenue plus discrète depuis un an, la Division Big Data et Cybersécurité, qui représente 10% de l'activité d'Atos, réalisait en 2020 un chiffre d'affaires de 1,2 milliard d'euros, en croissance (organique) de 15,8%. Ce nouveau site devrait booster l'activité. (Crédits : Atos)

L'électronique angevine retrouve des couleurs. La tête de pont de la division Big Data & Cybersécurité du groupe Atos, numéro un européen du cloud, de la cybersécurité et des supercalculateurs vient de confirmer sa décision de construire un nouveau site industriel au lieu et place de l'usine actuelle, spécialisée dans la conception et la fabrication de supercalculateurs, de serveurs haut de gamme et d'outils liées à la cybersécurité, la cryptologie, et la simulation quantique.

Des technologies utilisées dans le monde entier par le CEA, Météo France, l'agence française nationale du calcul intensif GENCI ou encore des universités de recherches européennes pour effectuer des prévisions météo, modéliser des crash tests automobiles ou la médecine personnalisée.

« Nous avons étudié plusieurs solutions possibles en Europe pour doubler les capacités de l'usine. L'attractivité de la région, la présence de grands donneurs d'ordres européens, d'un écosystème spécialisé dans l'électronique, d'un pôle universitaire garantissant un soutien à l'emploi, le savoir-faire du site et les ambitions fortes de décarbonation du site partagées par les collectivités locales ont fait pencher la balance pour le territoire angevin », explique Vincent Sarracanie, directeur du site angevin d'Atos et vice-président de la supply chain et du manufacturing, d'Atos.

 Développer des ordinateurs verts

L'investissement de 60 millions d'euros voulu pour faire émerger une usine du futur, connectée, sécurisée et éco-responsable sera construite en deux tranches. La première de 15.000 m² concernera l'outil de production qui doublera ses capacités, la seconde de 8.000 m², menée à suivre, portera sur le stockage, la logistique et les bureaux. La surface de l'ensemble de près de 27.000 m² sera équivalente au site actuel.

Avec l'introduction de robots, de véhicules autonomes et d'une nouvelle organisation entièrement repensée avec le concours des experts du centre technique de l'électronique angevin We Network, l'entreprise estime pouvoir accroitre ses gains de productivité de 30%.

Avec une unité conçue selon les normes de la certification Breeam (Building Research Establishment Environmental Assessment Method relative à l'évaluation environnementale des bâtiments), l'entreprise entend aller beaucoup plus loin que ce qu'elle a déjà fait pour réduire son empreinte carbone. Elle compte travailler sur l'énergie (hydrogène, solaire...), les transports de marchandises et le déplacement des salariés.

« Avoir des ordinateurs verts est devenu très important pour nos clients », souligne le dirigeant du groupe Atos qui revendique d'être pionnier dans la décarbonation des services et des produits numériques. « On mesure déjà, on compense, mais l'ambition est d'aller vers un « zéro émission nette » pour ne plus avoir d'empreinte carbone et ne plus avoir à avoir à compenser... », dit-il.

La chaleur dégagée par les équipements sera réinjectée dans le réseau de chaleur de la métropole angevine. Soit l'équivalent de 6 GW qui contribueront aux chauffages de bâtiments publics et des universités.

Un investissement possible en Inde

 « Le projet s'inscrit dans le doublement de notre activité au cours des trois prochaines années. Nous voulons être en capacité de répondre à des croissances à deux chiffres », dit-il. Devenue plus discrète depuis un an, la Division Big Data et Cybersécurité, qui représente 10% de l'activité d'Atos, réalisait en 2020 un chiffre d'affaires de 1,2 milliard d'euros, en croissance (organique) de 15,8%.

A ce jour, la production s'appuie essentiellement sur le site d'Angers, destiné à devenir le flagship européen de la division Big Data & Cybersécurité. Selon la nature des projets et les problématiques règlementaires, des partenariats sont engagées au Brésil et en Inde, où selon Vincent Sarracanie, il est possible que ça bouge. « Mais, de toutes façons, la conception, la mise au point et l'industrialisation des produits, c'est Angers ! », assure-t-il.

 L'Anjou accompagne un investissement sans précédent depuis 30 ans

Ces perspectives de développement n'ont pas échappé aux yeux et aux oreilles des élus angevins et régionaux, qui après avoir vu s'effondrer l'électronique sur leur territoire ont, depuis des mois, mis les petits plats dans les grands pour accompagner le maintien de ce géant de l'électronique en terre angevine.

« C'est l'investissement industriel le plus important depuis 30 ans sur notre territoire », se félicite Christophe Béchu, maire d'Angers et président de la communauté d'agglomération Angers Loire Métropole qui a fait valoir l'attractivité, les ressources humaines, l'écosystème et la côte de popularité d'une cité qui cartonne dans les classements médiatiques. « Surtout, on leur a proposé des outils pour les libérer d'une opération de restructuration et de construction du site », explique-t-il.

Plus qu'une simple construction d'usine, c'est la démolition et la reconstruction de l'ex-site de Bull étendu sur 20 hectares, avec au passage le doublement du foncier de 4 à 8 hectares pour Atos.

A la manœuvre, c'est Alter (Anjou Loire Territoire), une société publique locale d'aménagement née en 2016 de la volonté de Christophe Béchu. Il souhaitait réunir en dans une même structure les agences d'aménagement de l'agglomération (Sodemel) et du département (Sara), qui a pris les choses en main. C'est elle, via Alter Cité, l'une de ses six structures qui, en accord avec Atos, va s'occuper de l'acquisition des terrains, des préfinancements, de la restructuration, de la construction de l'usine, du pilotage et des montages des opérations. Jusqu'à la revente du bien clés en main à Atos, qui en deviendra alors propriétaire à la livraison. « C'est à mon avis un élément assez structurel dans la décision d'Atos », estime Christophe Béchu.

A l'issue de l'acquisition des terrains menées par Alter Cité, le permis de construire de la première tranche devrait être déposé à la fin du premier semestre 2022 pour un démarrage des travaux début 2023 et une livraison du bâtiment de production en 2025. La plateforme logistique et les bureaux seront eux opérationnels l'année suivante.

Une centaine d'embauches hautement qualifiées

 Atos souffrait de la vétusté et des contraintes d'un bâtiment construit dans les années soixante. En 2019, il a investi 10 millions d'euros dans la construction d'un centre mondial d'essais de ses supercalculateurs. « Ce qui permet à nos clients de tester leur supercalculateur en conditions réelles, avant la livraison, afin de s'assurer de leur stricte conformité », précise Vincent Sarracanie, dont le renouvellement de la gamme, les stocks, la conception de ses propres produits en interne et la proximité des services de R&D ont permis de minimiser l'impact de la pénurie de composants en redesignant, par exemple, à la hâte des produits.

Cette agilité aurait permis à l'entreprise de gagner un an face à des délais d'approvisionnement à rallonge. En cinq ans, effectif et chiffre d'affaires ont doublé à Angers, où Atos emploie aujourd'hui 250 personnes et prévoit l'embauche d'une centaine de personnes hautement qualifiés pour accompagner le projet d'usine 4.0.

L'électronique accélère dans les Pays de la Loire

« On voit une relocalisation d'activité appuyé sur de la R&D, des emplois... et une stratégie qui ne repose pas sur les bas coûts », se réjouit Christophe Béchu. Ce sont ces perspectives de croissance verte, d'éco-responsabilité dans un secteur du numérique souvent montré du doigt qui ont incité les élus de la région des Pays de la Loire à voter une subvention de 1,5 million d'euros pour accélérer la réindustrialisation et la digitalisation de la filière Electronique qui emploie directement et indirectement 40.000 personnes.

« On parle souvent de la souveraineté de l'informatique quantique, si l'on ne veut pas rater les trains dans le monde de demain, il faut savoir anticiper, écouter, ne pas attendre les appels à projets et mettre en œuvre les conditions pour permettre aux d'entrepreneurs d'accélérer sur le territoire du Grand Ouest qui concentre 70% de l'électronique européen », justifie Eric Grelier, vice-président de la région des Pays de la Loire, en charge du développement économique. 

C'est dans cette région également que le groupe d'électronique Lacroix s'apprête à inaugurer sa nouvelle usine du futur à Beaupréau, dans le Maine-et-Loire. Un investissement de 25 millions d'euros qui veut lui aussi contribuer à la relocalisation d'activités sur le territoire ligérien.

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