Elon Musk envisage de lancer son propre réseau social pour défendre la liberté d’expression

Dans une série de tweets, le milliardaire a laissé entendre qu’il pourrait créer sa propre plateforme, Twitter ne respectant plus suffisamment la liberté d’expression, estime le fondateur de Tesla. À l’exemple de Trust Social, la plateforme de Donald Trump lancée sans grande publicité le mois dernier, les media sociaux alternatifs peinent toutefois à décoller, la faute notamment à l’effet réseau.
« La liberté d'expression est nécessaire au bon fonctionnement de la démocratie. Pensez-vous que Twitter respecte rigoureusement ce principe ? »  s'est interrogé le milliardaire dans un tweet.
« La liberté d'expression est nécessaire au bon fonctionnement de la démocratie. Pensez-vous que Twitter respecte rigoureusement ce principe ? » s'est interrogé le milliardaire dans un tweet. (Crédits : POOL)

L'hyperactivité d'Elon Musk a encore frappé. Dans une sortie Twitter dont il a le secret, le patron de Tesla et SpaceX a évoqué la possibilité de lancer son propre réseau social pour défendre la liberté d'expression.

« La liberté d'expression est nécessaire au bon fonctionnement de la démocratie. Pensez-vous que Twitter respecte rigoureusement ce principe ? »  s'est interrogé le milliardaire dans un tweet, accompagné d'un sondage auquel ont participé plus de deux millions de ses followers, qui à plus de 70% ont répondu par la négative.

Après qu'un internaute lui a proposé de créer sa propre plateforme, avec un algorithme open source et la priorité donnée au respect de la liberté d'expression, Musk a répondu qu'il « y pensait sérieusement ».

Elon Musk, pourfendeur de la censure ?

Pour brouiller encore un peu plus la frontière entre la plaisanterie et la réalité, il a également approuvé l'idée d'un autre internaute suggérant que le dogecoin pourrait faire partie du fonctionnement de cette nouvelle plateforme. Cette cryptomonnaie ayant un chien pour emblème, créée comme une blague, est devenue très à la mode malgré les doutes des milieux financiers. Elon Musk s'est à plusieurs reprises amusé à la soutenir sur les réseaux sociaux. En mai 2021, il a ainsi fait bondir le dogecoin par un tweet sibyllin: « combien vaut le Doge dans la vitrine ? » , référence à une chanson populaire sur un chien (« dog » en anglais).

Ce n'est pas non plus la première fois que l'entrepreneur, qui confiait en 2011 être « plutôt libertarien » au New Yorker, prend publiquement position contre la censure, et notamment celle exercée par Twitter. En 2021, suite au bannissement de Donald Trump du réseau social après l'attaque du Capitole par ses partisans, le milliardaire avait questionné la légitimité de « l'élite technologique de la côte ouest » (c'est-à-dire la Silicon Valley) à se poser en arbitre de la vérité. Début mars, il annonçait (toujours sur Twitter) que sa constellation Starlink avait reçu des pressions pour bloquer certaines sources d'informations russes, et qu'il s'y refuserait à moins d'y être contraint par la force, au nom de la liberté d'expression.

En février, il déposait une plainte auprès de la justice accusant les autorités américaines de lui faire un procès politique pour avoir critiqué le gouvernement et d'enfreindre ainsi le Premier amendement, garant de la liberté d'expression aux États-Unis. Cette plainte fait suite à plusieurs enquêtes ouvertes par la SEC, le gendarme de la bourse américaine, accusant Elon Musk de manipuler les cours boursiers de Tesla à travers ses tweets, dont il est le fondateur. En novembre dernier, l'action Tesla a par exemple dévissé de 5% après que son patron a proposé à ses followers de vendre 10% de ses parts pour payer davantage d'impôts.

Un marché déjà saturé

Si Elon Musk compte vraiment concrétiser son projet et trouve du temps pour s'y consacrer entre Tesla, SpaceX, Neuralink et The Boring Company, la tâche qui l'attend s'avère difficile. Nombre de réseaux sociaux alternatifs ont été lancés aux États-Unis, pour la plupart motivés par une censure perçue comme trop importante de la part de Twitter et Facebook. C'est notamment le cas de Gab, un service basé à Austin, de Parler, Gettr (lancée par Jason Miller, un ancien porte-parole de Donald Trump) ou encore de Truth Social, plateforme lancée par l'ancien président lui-même le mois passé.

Mais la plupart peinent à décoller. Gab compterait par exemple environ 4 millions d'utilisateurs, dont 100.000 actifs, loin des 200 millions d'utilisateurs actifs quotidiens, dits monétisables, de Twitter.

Plusieurs raisons permettent d'expliquer ces difficultés. Pour décoller, de telles plateformes ont besoin d'un effet réseau, c'est-à-dire que les utilisateurs ne seront tentés de s'inscrire et de participer que si un nombre significatif de leurs proches en fait autant. Or, les plateformes comme Facebook et Twitter, malgré des fuites d'utilisateurs limitées et ponctuelles en période de scandales, occupent toute la place, ce qui laisse peu de marge aux services alternatifs pour se développer.

Par conséquent, ces plateformes, qui défendent pour la plupart la liberté d'expression, tendent à attirer des utilisateurs marginaux ou extrémistes, qui ont été bannis de Twitter ou de Facebook suite à leur comportement ou leurs idées. Une réalité qui fait fuir de nombreux utilisateurs et complique la capacité de ses plateformes à attirer les investisseurs.

Enfin, elles tendent aussi à rassembler des individus plus homogènes politiquement (Gab est par exemple très populaire auprès des républicains américains). Or, l'un des attraits de plateformes comme Twitter consiste à être exposé à des points de vue différents. Sans l'attrait des joutes verbales et autres prises de bec avec les tenants d'idées opposées, nombre de ces plateformes s'avèrent quelque peu ennuyeuses par rapport aux poids lourds des réseaux sociaux.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 4
à écrit le 30/03/2022 à 16:50
Signaler
Vendredi dernier, Twitter a suspendu instantanément les comptes Twitter de Putsch et de Nicolas Vidal, son fondateur, sans avertissement préalable et sans aucun raison. Ces deux comptes cumulaient près de 25 000 abonnés. "C’est par des emails totale...

à écrit le 30/03/2022 à 15:14
Signaler
Ce fut l’un des derniers coups de griffe distribués par Umberto Eco, peu avant sa mort. En juin 2015, l’auteur du Nom de la rose se lâchait à propos des réseaux sociaux lors d’une rencontre avec la presse, à Turin : « Les réseaux sociaux donnent la p...

à écrit le 29/03/2022 à 15:18
Signaler
La liberté d'expression selon Musk c'est exploiter sa notoriété publique reposant uniquement la valorisation délirante de Tesla pour manipuler les marchés financiers. Pas convaincu que la SEC ne s'intéressera plus à son cas désespéré sur un aut...

à écrit le 29/03/2022 à 14:48
Signaler
Liberté d'expression à l'ère post covid = dire ce que pense le propriétaire dudit réseau "libre" afin de préserver les intérêts du propriétaire dudit réseau "libre".. Encore une pensée pour Audiard !

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.