Le canadien D-Wave et ses calculateurs quantiques pas comme les autres

Longtemps décrié par les experts, D-Wave est un cas à part dans la course au quantique. Pourtant, l’entreprise canadienne pourrait tirer son épingle du jeu.
François Manens
La cinquième génération de l'ordinateur D-Wave compte 5. 000 qubits supraconducteurs. Mais ces milliers de qubits ne peuvent être comparés aux 72 qubits de Google ou d'IBM : ils sont très éphémères et connectés entre eux différemment. En conséquence, la puissance de calcul de D-Wave n'atteint pas celle des ordinateurs quantiques concurrents... sauf sur certaines applications.
La cinquième génération de l'ordinateur D-Wave compte 5. 000 qubits supraconducteurs. Mais ces milliers de qubits ne peuvent être comparés aux 72 qubits de Google ou d'IBM : ils sont très éphémères et connectés entre eux différemment. En conséquence, la puissance de calcul de D-Wave n'atteint pas celle des ordinateurs quantiques concurrents... sauf sur certaines applications. (Crédits : D-Wave Systems)

C'est le « mouton noir » de l'informatique quantique, dixit le consultant spécialisé Olivier Ezratty. C'est aussi le premier ordinateur quantique à avoir proposé, dès 2011, une offre commerciale. Depuis sa création en 1999, D-Wave et sa technologie baptisée « quantum annealing » divise les spécialistes. En cause : le choix de la startup pour créer son ordinateur quantique serait trop différent de ceux des autres constructeurs. Pendant plusieurs années, certains allaient jusqu'à remettre en cause l'utilisation du terme « quantique ». Un doute depuis levé.

« D-Wave fabrique une machine qui s'appuie sur des phénomènes quantiques, mais qui n'est pas universelle. Elle permet, en théorie, de faire certains calculs quantiques, mais elle ne peut pas exécuter tout ce que peut faire l'informatique quantique », détaille Simon Perdrix, chercheur au Loria (CNRS).

Un record de brevets déposés

Vern Bronwell, le CEO de l'entreprise, préfère se voir comme un pionnier. « Nous avons pris un chemin différent, comme Apple avec ses ordinateurs, et il s'en suit une controverse. Nous sommes l'Apple de l'informatique quantique. » Si le dirigeant exagère le trait, D-Wave rencontre tout de même un certain succès. L'entreprise canadienne a levé plus de 200 millions de dollars (dont la moitié ces cinq dernières années), et compte parmi ses actionnaires  le gouvernement et un puissant fonds de pension canadien. À cela s'ajoute un nombre record de brevets déposés (138 entre 2005 et 2017 d'après le Boston Consulting Group (BCG)), et de prestigieux partenaires comme Lockheed Martin ou le Quantum Artificial Lab (avec Google et la Nasa). « Notre activité double chaque année », complète le dirigeant.

Ordinateur quantique D-Wave 2000Q

[Le D-Wave 2000Q System, dernier-né des ordinateurs de la société informatique]

Des qubits très éphémères

La cinquième génération de l'ordinateur D-Wave compte 5. 000 qubits supraconducteurs. Mais ces milliers de qubits ne peuvent être comparés aux 72 qubits de Google ou d'IBM : ils sont très éphémères et connectés entre eux différemment. En conséquence, la puissance de calcul de D-Wave n'atteint pas celle des ordinateurs quantiques concurrents... sauf sur certaines applications.

« D-Wave utilise une fonction très particulière du quantique qui permet de résoudre des problèmes d'optimisation », résume Jean-François Bobier, directeur associé chez BCG.

Volkswagen utilise par exemple les ordinateurs canadiens pour développer un système de gestion du trafic. « Aujourd'hui, ce sont les ordinateurs les plus opérationnels », ajoute le consultant.

Les entreprises intéressées peuvent acheter leur propre modèle, mais il faut débourser autour de 15 millions de dollars. Depuis 2018, les clients potentiels peuvent également faire tourner leurs algorithmes sur D-Wave via le cloud (à distance), pour plusieurs milliers de dollars par heure. Dans les toutes prochaines années, D-Wave va concurrencer les ordinateurs quantiques sur leurs premières applications, tant qu'ils n'auront que peu de qubits. Au-delà, il devra prouver l'intérêt de sa spécialisation.

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François Manens

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Commentaire 1
à écrit le 14/11/2019 à 10:28
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Cela me rappelle souvent dans le texte ce qui se passe au début d'une techno, du coup j'imagine qu'après seul le constat fait le réel ! Attendons un peu, car c'est effectivement stratégiquement dangereux au niveau de la question économique, du co...

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