Google lance en France son nouveau format d'actualités « Google News Showcase »

Une nouvelle fonctionnalité baptisée « Google News Showcase » fait son apparition ce jeudi en France sur les portails du géant de la publicité digitale. En réalité, il s'agit d'enterrer définitivement la hache de guerre avec les sites d'information en leur proposant « une liberté totale ». L'américain promet en outre d’offrir une plus grande visibilité aux articles de 130 publications françaises, après avoir réussi à embarquer 1.800 sites d'actualités dans le monde. Il n’en reste pas moins le maître du jeu algorithmique, tout en intensifiant sa collaboration avec les médias. Explications.
Jeanne Dussueil
Google revendique « 1.800 sites d'actualités dans le monde et 130 à date en France » signataires d'accords de licence pour son onglet « Google News Showcase ».
Google revendique « 1.800 sites d'actualités dans le monde et 130 à date en France » signataires d'accords de licence pour son onglet « Google News Showcase ». (Crédits : Google dr)

Annoncé depuis deux ans en France, le nouveau kiosque numérique d'actualités baptisé « Google News Showcase » - littéralement « la vitrine des informations » - débarque finalement ce jeudi 20 octobre 2022 dans l'Hexagone. Concrètement, ce « nouveau format d'affichage » va apparaître sur les portails du géant de la publicité en ligne (« Google Actualités » et « Discover »). Déjà lancé dans « une vingtaine de pays » tels l'Espagne, le Portugal, l'Autriche, l'Irlande, le Canada, la Colombie, mais aussi la Slovaquie et la Roumanie, ce lancement plus tardif en France est à l'image des relations que l'américain a entretenu avec les éditeurs de presse tricolores : complexes, quand elles ne furent pas orageuses.

Présenté aux journalistes comme étant une simple nouvelle interface d'agrégation d'actualités, le « Google News Showcase » est surtout l'outil qui doit définitivement enterrer la hache de guerre entre le géant et les sites d'informations partout dans le monde.

Depuis des années, ces derniers reprochaient en effet à l'ogre des contenus d'aspirer leurs articles sur ses portails de recherche, sans jamais être rétribués. Pour y remédier, l'Union européenne a d'ailleurs voté un texte clé pour contraindre à la rémunération systématique, au travers d'une nouvelle législation sur les « droits voisins », datant de 2019. Avant elle, les grands sites d'information français se montraient plutôt frileux à signer de quelconque accords avec la firme de Mountain View. Mais Google a su se plier aux exigences de l'UE et, surtout, de celles des éditeurs regroupés en associations. De « 200 » à « 450 sites informations » signataires, puis « 700 » à l'été 2021 du Google News Showcase, ils sont aujourd'hui « 1.800 sites d'actualités dans le monde et 130 publications en France », se félicite aujourd'hui Google.

Google paye une licence à ses « partenaires » éditeurs

En quête de contenus de qualité pour valoriser ces espaces, Google a ainsi signé avec les principaux sites d'informations tels 20 minutes, L'Equipe, Le Figaro, Le Monde, les publications du Groupe EBRA, Le Parisien, entre autres. En tant que membre de l'Alliance de la Presse d'Information Générale (APIG), La Tribune est également signataire des nouveaux accords créés par Showcase.

Concrètement, ce nouveau kiosque, un simple onglet pour l'internaute, est censé redonner la main aux sites éditeurs pour choisir « les textes, les images, les listes à puces », « mettre en valeur des contenus », selon le géant, et hiérarchiser une sélection d'articles. « On laisse une liberté totale aux éditeurs pour personnaliser leurs panneaux (...) Car ce n'est pas uniquement une unité article (telle celle s'affichant sur les portails Google actualités NDLR) mais un panneau », décrit Arnaud Monnier, le directeur en charge des partenariats pour Google France. Le géant revendique d'ailleurs « plus de 4,5 millions de panneaux d'actualité News Showcase créés par nos partenaires ».

Ainsi, en échange d'afficher l'intégralité d'un article payant, la firme s'acquitte auprès de chaque éditeur de frais de licence pour accorder la gratuité en passant par le Google News Showcase. Le détail financier de ces accords, fixés au cas par cas entre Google et un média, selon sa notoriété et son trafic, restent toutefois à la discrétion de la firme. Un rapport parlementaire daté de janvier 2022 a d'ailleurs dénoncé l'opacité de ces accords de licence, proposant même de les rendre publics.

Google préfère souligner les avantages pour les sites d'information, en proie depuis plusieurs années à l'éclatement de leur lectorat sollicité par de nouvelles plateformes sociales, et à l'érosion du modèle de l'abonnement. « Pour le site éditeur, cela lui permet de générer et de construire une base de prospects. Google donne à découvrir des contenus publiés sur les sites des éditeurs. Et cela permet à l'utilisateur de 'suivre', via un bouton, un éditeur en particulier au sein de Discover, améliorant notre connaissance de ces préférences », avance Arnaud Monnier. Officiellement, l'objectif est aussi de promettre aux médias de la « génération de trafic » vers leur site d'origine.

L'accès à cette sélection quotidienne d'articles - sur laquelle les éditeurs vont devoir dédier une main-d'œuvre marketing et data spécifique - est donc gratuit pour les lecteurs.

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Google garde la main sur l'algorithme

Reste que, malgré ses nouvelles forces dédiées par les « partenaires médias », Google garde entièrement la main sur la science algorithmique. Autrement dit, sa technique de référencement, protégée telle une recette secrète, reste inchangée par rapport à celle du portail classique Actualités. Il était d'abord question d'opérer un changement algorithmique « made in Google » pour montrer plus d'actualités locales et ainsi être « plus proche géographiquement de l'internaute ». Mais sur ce volet finalement, « rien ne change », confirme Google France qui profite toutefois de cette nouvelle interface pour « faire des tests », notamment en matière de personnalisation de la navigation sur Internet, le nerf de la guerre de l'engagement des lecteurs. A l'heure des réseaux sociaux qui ont renforcé la volatilité des internautes, l'économie de l'attention fait du temps passé au sein d'un même écosystème un vrai cheval de bataille.

Cette nouvelle donne publicitaire, le géant de la donnée la maîtrise, contrairement aux éditeurs qui peinent encore à augmenter leur arsenal d'analyses et de revenus publicitaires, pour doper entre autres leurs abonnements et la rétention de leur lectorat.

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Jeanne Dussueil

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Commentaire 1
à écrit le 20/10/2022 à 13:20
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Une source de manipulation, de lavage de cerveau supplémentaire. Le temps de cerveau disponible doit augmenter pour accueillir toujours plus de publicité...complotisme et surveillance généralisée en bonus.

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