La France a enfin arrêté sa décision. Au terme d'un feuilleton qui a duré près de deux ans, l'exécutif a décidé de fermer, progressivement, la porte au déploiement d'équipements 5G de Huawei dans l'Hexagone. Guillaume Poupard, le directeur général de l'Agence nationale de sécurité des systèmes d'informations (Anssi), l'a annoncé ce lundi dans un entretien aux Echos. L'agence, qui dépend de Matignon, joue un rôle clé dans ce dossier. Depuis l'arrivée d'une loi sur la sécurisation des réseaux mobiles, l'an dernier, les opérateurs désireux de déployer des équipements et logiciels dédiés à la 5G doivent impérativement décrocher son feu vert. Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free ont déposé des demandes d'autorisations. Aux dires de Guillaume Poupard, les premières réponses seront bientôt envoyées.
A l'en croire, « il n'y aura pas un bannissement total » de Huawei. Pourtant, la manœuvre vise bien, à terme, à bouter le groupe chinois hors des réseaux. Ainsi, affirme le patron de l'Anssi, seules des demandes d'équipements Huawei feront l'objet de refus. Ce ne sera le cas pour aucun des deux autres grands équipementiers télécoms, à savoir le finlandais Nokia et le suédois Ericsson. Guillaume Poupard précise que SFR et Bouygues Telecom, qui utilisent déjà largement Huawei pour la 4G, ne disposeront, au mieux, que d'autorisations limitées, « dont la durée varie entre trois et huit ans ». En conséquence, ces deux opérateurs vont devoir retirer des équipements du groupe chinois de leurs réseaux. Mais le fait qu'il n'y ait pas d'interdiction totale et immédiate de Huawei doit leur permettre d'étaler ces coûteux démantèlements dans le temps.
« Prudence vis-à-vis des équipementiers non-européens »
Quant aux « opérateurs qui n'utilisent pas Huawei », c'est-à-dire Orange et Free, « nous les incitons à ne pas y aller, car c'est un peu le sens naturel des choses », poursuit Guillaume Poupard. Sachant que ces deux derniers ont de toute façon déjà choisi Ericsson et Nokia pour déployer la 5G.
Le message du gouvernement et de l'Anssi est clair : les opérateurs sont désormais priés de se tourner vers des solutions européennes, aujourd'hui celles de Nokia et d'Ericsson, pour leurs réseaux mobiles. Pas question que les infrastructures 5G, jugées vitales pour le pays et l'économie dans les années à venir, soient à la merci de Huawei et de la Chine en cas de conflit. « Il est clair que l'on est pas dans les mêmes risques quand on parle d'équipements chinois ou américains, confirme Guillaume Poupard. Nous sommes prudents vis-à-vis des équipementiers non européens. » Dans ce domaine stratégique, la France doit, à tout prix selon l'exécutif, préserver sa souveraineté. Quitte à tordre le bras aux opérateurs. « Il ne faut pas s'attendre à ce que le marché ait recours à des solutions souveraines tout seul », affirme Guillaume Poupard.
La Chine appelle la France à « respecter au respect les lois du marché »
Pékin, de son côté, a accueilli la nouvelle fraîchement. Ce lundi, un porte-parole du ministère des Affaires étrangères a appelé la France à se montrer « objective », « juste », et « respectueuse des lois du marché et de la volonté des entreprises ». Il a demandé à Paris de « prendre des mesures concrètes pour mettre en place un environnement ouvert, équitable et non discriminatoire pour les entreprises de tous les pays, y compris les entreprises chinoises ».
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