Coupures d’électricité cet hiver : le spectre d'un «black-out» plane sur les réseaux télécoms

Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free redoutent que les réseaux Internet fixe et mobiles soient interrompus si les gestionnaires du réseau électrique devaient procéder à des « délestages ». Les opérateurs n'ont, à ce jour, aucune garantie de pouvoir préserver leurs infrastructures.
Pierre Manière
Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free craignent de voir leurs réseaux essuyer des « black-out » si des coupures volontaires, localisées et ponctuelles, devaient survenir cet hiver en cas de pénurie d'électricité.
Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free craignent de voir leurs réseaux essuyer des « black-out » si des coupures volontaires, localisées et ponctuelles, devaient survenir cet hiver en cas de pénurie d'électricité. (Crédits : Reuters)

C'est un des sujets majeurs de préoccupation des télécoms françaises. Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free craignent de voir leurs réseaux essuyer des « black-out » si des coupures volontaires, localisées et ponctuelles, devaient survenir cet hiver en cas de pénurie d'électricité. Cela fait des semaines que les opérateurs cherchent la solution pour éviter, ou minimiser, les conséquences de ces « délestages », comme on les appelle. Les effets pourraient être dévastateurs. Sans réseaux mobiles, il serait impossible, par exemple, d'utiliser son smartphone pour joindre les services d'urgence.

Chez les opérateurs, personne n'a oublié les conséquences dramatiques de la panne massive survenue il y a un peu plus d'un an chez Orange. Celle-ci a provoqué la mort de plusieurs personnes qui n'ont pas pu prévenir les secours. Pour protéger les réseaux des délestages, la Fédération française des télécoms (FFT), le lobby du secteur, multiplie depuis des semaines les réunions avec les pouvoirs publics, mais aussi avec RTE, en charge du transport d'électricité, et Enedis, qui en chapeaute la distribution. Mais les réponses qui ont été apportées s'avèrent très insuffisantes.

« Les signes ne sont pas tellement positifs »

Les opérateurs mènent plusieurs combats. Depuis la fin du mois de juillet, le secteur milite pour modifier un arrêté du 5 juillet 1990. Celui-ci permet à certains clients prioritaires d'être exemptés de délestages. Cet arrêté protège les hôpitaux, les feux tricolores, ou encore les industries et installations militaires les plus sensibles du pays. Les opérateurs veulent inclure leurs réseaux dans cette liste. Mais sur ce front, « les signes ne sont pas tellement positifs », indique à La Tribune, un expert proche du dossier. Les opérateurs ont été priés de s'adresser aux préfets, qui ont le pouvoir d'exclure leurs installations des délestages. Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free ont tous effectué des demandes en ce sens. Mais d'après notre expert, les retours ont été, jusqu'à présent, assez « disparates ».

Les opérateurs veulent sécuriser deux types d'installations. Il y a d'abord les « nœuds centraux d'importance nationale ». Ceux-ci sont essentiels au bon fonctionnement des réseaux, dans la mesure où toutes les communications du pays transitent par ces infrastructures. Même si ces nœuds sont peu nombreux, et disposent déjà tous de dispositifs de secours en cas de coupure, les opérateurs souhaiteraient garantir, au regard de leur criticité, qu'ils ne soient pas délestés.

Un besoin d'informations et d'organisation

Leur autre préoccupation concerne les antennes-relais de téléphonie mobile. Celles-ci sont, à de très rares exceptions, dépourvues de dispositifs de secours. Pour assurer leur alimentation en électricité en cas de coupure, on peut y greffer des groupes électrogènes. Mais cette solution a ses limites. Primo parce que les opérateurs n'en disposent pas en quantité suffisante pour équiper les 60.000 antennes de l'Hexagone. Secundo parce qu'en ville, par exemple, il est tout bonnement impossible d'installer un groupe électrogène de plusieurs tonnes pour alimenter une antenne sur un toit-terrasse. Pour préserver une couverture mobile minimale en cas de délestage, et tenter d'en limiter l'impact, les opérateurs affirment qu'ils ont besoin de s'organiser en amont.

Ils réclament d'abord des informations sur les territoires susceptibles de faire l'objet de coupures, afin d'identifier les antennes touchées, puis de sélectionner celles qui doivent continuer à fonctionner. Ils souhaitent, en parallèle, être prévenus aussi tôt que possible lorsqu'un délestage aura lieu, pour laisser le temps à leurs techniciens de déplacer, d'installer, puis de mettre en marche les groupes électrogènes. Mais en face, ni Enedis ni RTE n'ont répondu favorablement à leurs demandes.

Un « délai de prévenance » bien trop court

Pour le moment, Enedis n'envisage de prévenir les opérateurs qu'un délestage de deux heures interviendra à 8h que la veille au soir, à 21h30... Aux yeux d' Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free, ce « délai de prévenance » est beaucoup, beaucoup trop court. « Les opérateurs sont dans le noir, s'alarme notre expert. Aujourd'hui, il y a beaucoup trop d'inconnues dans l'équation. C'est pourtant notre responsabilité collective de voir ce qui peut être fait. S'il y avait un black-out, ce serait dramatique. » Les prochaines réunions entre les opérateurs, l'exécutif et les gestionnaires du réseau électrique seront décisives.

Pierre Manière

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Commentaires 6
à écrit le 08/10/2022 à 19:46
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Quid de la sécurité des réseaux télécoms noyautés par les équipements chinois notamment Huawei?

à écrit le 07/10/2022 à 22:20
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ce serait un bazar monstrueux... mais ça va beaucoup plus loin que ça... toute l'économie "dématérialisée" est en fait totalement dépendante des infrastructures télécoms, de leur sûreté (physique et numérique) et de leur alimentation électrique... vo...

à écrit le 07/10/2022 à 17:58
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Pas évident pour le télétravail que le gouvernement voulait privilégier cet hiver.

à écrit le 07/10/2022 à 17:08
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Il y a beaucoup plus grave que les réseaux et surtout ceux dits "sociaux". Si cet hiver on est au chaud avec de quoi boire et manger ce sera déjà pas mal. Le top en ressortant les jeux de société😇. Merci Poutine🤡

le 08/10/2022 à 10:37
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Vous ignorez donc qu'internet ne se limite pas aux réseaux sociaux et que c'est un outil de travail pour des millions de personnes dans notre pays .

à écrit le 07/10/2022 à 14:29
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On ne peut que percevoir la construction d'un effet panique à travers les médias complaisants !

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