L’Allemagne songe à exclure les chinois Huawei et ZTE des réseaux 5G

Le gouvernement allemand a décidé de passer en revue tous les composants chinois présents dans les réseaux 5G. La possibilité d’une interdiction pour des raisons de sécurité n’est, aux yeux de l’exécutif, plus un tabou. Cette réflexion intervient alors que l’Allemagne souhaite réduire sa dépendance économique vis-à-vis de la Chine.
Pierre Manière
« Huawei jouit d'une plus grande part de marché à Berlin qu'à Pékin, où il partage le marché avec ZTE et d'autres fournisseurs », affirme le cabinet danois Strand Consult, spécialiste des télécoms.
« Huawei jouit d'une plus grande part de marché à Berlin qu'à Pékin, où il partage le marché avec ZTE et d'autres fournisseurs », affirme le cabinet danois Strand Consult, spécialiste des télécoms. (Crédits : DADO RUVIC)

Les opérateurs allemands vont-ils devoir démonter tous les équipements chinois de leurs réseaux mobiles ? Berlin réfléchit sérieusement à cette possibilité. Nancy Faeser, la ministre allemande de l'Intérieur, a affirmé au journal Bild que les composants chinois présents dans les réseaux télécoms faisaient l'objet d'un examen approfondi. Elle a ajouté que l'objectif était d'identifier les risques, de prévenir les dangers, et d'éviter les dépendances. La ministre a justifié ces travaux au regard de la sensibilité des infrastructures de réseau mobile, qualifiées de « critiques ».

Nancy Faeser n'a cité aucun groupe en particulier. Mais ce sont bien les équipements des chinois Huawei et ZTE, présents dans une grande partie des réseaux mobiles 4G et 5G d'Allemagne, qui sont visés. Le mois dernier, une source gouvernementale avait d'ailleurs déclaré à l'agence Reuters que l'Allemagne envisageait d'interdire certains de leurs produits. L'exécutif redoute que leurs infrastructures servent à des fins d'espionnage, ou de sabotage, pour le compte de Pékin.

Huawei très présent dans les réseaux allemands

Il y a deux ans, l'Allemagne avait pourtant adopté une loi sur la sécurité informatique. Celle-ci prévoyait que tous les équipements et logiciels dédiés 5G soit vérifiés et certifiés par différents services. Les opérateurs avaient, alors, écarté les équipements chinois de leurs infrastructures de « cœurs de réseaux », où transitent toutes les communications. Mais ils ont continué à se fournir auprès de Huawei ou de ZTE pour moderniser leurs antennes 4G et les passer en 5G.

D'après Strand Consult, un cabinet danois spécialisé dans les télécoms, 59% d'entre elles proviendraient de fournisseurs chinois. « Huawei jouit d'une plus grande part de marché à Berlin qu'à Pékin, où il partage le marché avec ZTE et d'autres fournisseurs », précise même Strand Consult. Si Deutsch Telekom, Vodafone ou Telefonica devaient remplacer leurs équipements chinois, la note sera forcément très salée... Le déploiement de la 5G, jugée essentielle pour numériser et moderniser les entreprises, devrait aussi en pâtir. Pour Huawei, un bannissement de l'Allemagne, un de ses premiers marchés en Europe, constituerait aussi un coup dur, à l'heure où le groupe, qui pâtit de violentes sanctions américaines, cherche à se relancer.

Une décision sous couvert de tensions géopolitiques

Ces débats sur l'avenir de Huawei et de ZTE interviennent alors que l'Allemagne souhaite moins dépendre de la Chine pour ses échanges commerciaux, dans un contexte de fortes tensions géopolitiques depuis le début de la guerre en Ukraine. Au début du mois, Christian Lindner, le ministre allemand des Finances, s'est inquiété de la « forte dépendance » économique de l'Allemagne à la Chine, appelant à « diversifier » les partenaires commerciaux du pays.

Berlin est depuis six ans le principal partenaire économique de l'Empire du milieu. Beaucoup d'industriels allemands ont délocalisé une partie de leur production en Chine. Ils importent donc massivement des éléments indispensables à leur activité depuis ce pays. La Chine est, par ailleurs, l'un des principaux clients de l'énorme secteur automobile allemand.

Berlin risque des mesures de rétorsion

Dans ce contexte, chasser Huawei et ZTE constituerait, forcément, une décision difficile pour Berlin. L'Allemagne pourrait craindre des mesures de rétorsion de Pékin. L'équipementier suédois Ericsson a, par exemple, vu ses parts de marché s'effondrer en Chine après que Stockholm a décidé d'exclure Huawei du pays.

Pierre Manière

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Commentaires 5
à écrit le 18/04/2023 à 11:11
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Ne manquez pas de lire "Oxymore" de Jean Tuan chez C.L.C. Éditions. L'auteur observateur attentif de la Chine, le pays de son père, nous dévoile les desseins secrets de la Chine avec l'installation de la 5G en France. Vous découvrirez un très "croust...

à écrit le 18/04/2023 à 4:31
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C'était il y a bien longtemps que nous aurions dû être protectionniste et ne pas laisser les Américains détruire nos entreprises maintenant, le choix et américain et... américain ! Pour Nokia, Ericsson, ces entreprises seront absorbées dans moins de...

à écrit le 17/04/2023 à 20:09
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L'Allemagne n'a pas besoin de Huawei pour avoir des réseaux 5G d'excellente qualité. Il y a en Europe deux grandes entreprises que sont Ericsson et Nokia qui peuvent fournir des produits qualitifs et qui ne sont pas susceptibles d'être soumis aux dik...

le 17/04/2023 à 22:10
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Les allemands et les chinois se sont entendus. La Chine a autorisée Allemagne à placer ses entreprises automobiles et vendre ses voitures haut de gamme par million en échange les chinois pouvaient vendre leur produit bas de gamme à toute l Europe.

à écrit le 17/04/2023 à 19:03
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l'alternative c'est de demander a la chine de creer des coentreprises en europes, ou elle detiendrait 49% et y ferait les transferts de technolkogie.......il ne faut jouer qu'avec une seule regle

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