
Cela ressemble, pour Free, à un camouflet. L'opérateur de Xavier Niel n'a pas été épargné dans la dernière enquête de l'Arcep sur la qualité des services mobiles dans l'Hexagone. Sur le front de la 5G, Free, qui revendique le « plus grand réseau de France », affiche de piètres performances vis-à-vis de ses rivaux Orange, SFR et Bouygues Telecom. En matière de vitesse de connexion, les débits descendants de ses clients à cette technologie - disposant d'un abonnement 5G et d'un smartphone compatible - ne s'élèvent, en moyenne, qu'à 31 Mbit/s à l'échelle nationale. L'Arcep précise que ce chiffre varie peu « entre les zones denses et les zones intermédiaires ou rurales ». A titre de comparaison, Orange affiche une moyenne sensiblement plus élevée, de 142 Mbit/s, sur toute la France. « Les utilisateurs 5G d'Orange en zone dense, où la plupart de leurs sites 5G sont déployés, disposent en moyenne de 227 Mbit/s », ajoute le régulateur des télécoms. L'opérateur historique est suivi par SFR (84 Mbit/s de moyenne), et Bouygues Telecom (71 Mbit/s).
(Crédits: Arcep)
Ces résultats apparaissent très inférieurs à ceux de nPerf publiés en août dernier. Selon ce baromètre, Free se situait toujours en queue de peloton en matière de débits descendants en 5G. Mais ceux-ci étaient très supérieurs, à hauteur de 118 Mbit/s. Le classement était alors dominé par SFR (308 Mbit/s), suivi par Orange (295 Mbit/s), et enfin Bouygues Telecom (148 Mbit/s). Grande différence avec l'enquête de l'Arcep : nPerf n'a retenu, dans ses travaux, que les tests effectués en 5G. Tandis que le régulateur des télécoms a enregistré toutes les mesures réalisées - y compris celles en 2G, 3G ou 4G - dès lors qu'elles ont été effectuées avec terminal compatible 5G couplé à un abonnement à cette technologie.
Pour Free, « il y a un sujet autour du protocole utilisé »
Chose très surprenante dans l'enquête de l'Arcep, les performances de Free apparaissent moins bonnes pour les utilisateurs 5G que celles des utilisateurs 4G! Ainsi, le débit moyen de Free dans les zones denses pour les utilisateurs 2G/3G/4G s'élève à 47 Mbit/s. C'est-à-dire bien plus que les 32 Mbit/s enregistrés pour les utilisateurs 2G/3G/4G et 5G lorsqu'ils captent ce réseau... Le constat est similaire dans les zones intermédiaires et les rurales. Free est le seul opérateur systématiquement dans ce cas. Interrogé par La Tribune, l'Arcep n'est pas en mesure de nous fournir une explication.
Egalement interrogé par La Tribune, Iliad, la maison-mère de Free, affirme, de manière générale, « qu'il y a un sujet autour du protocole utilisé, comme l'a d'ailleurs indiqué l'Arcep dans sa communication, et que ces performances sur le débit 5G ne se reflètent ni dans les retours d'expérience de nos abonnés, ni dans les mesures faites par d'autres comme le baromètre nPerf ou RNC Mobile, ni dans la dynamique commerciale sur le trimestre ».
Les piques d'Orange
Les chiffres de l'Arcep concernant la 5G de Free n'ont, quoi qu'il en soit, pas échappé aux concurrents de l'opérateur de Xavier Niel. En témoigne cette sévère pique de Laurentino Lavezzi, le directeur des affaires publiques d'Orange : « Parfois, il en est qui commercialise une 5G 'sans surcoût', mais elle est encore moins performante que leur 4G », fustige-t-il sur Twitter. « Heureusement », renchérit-il, que l'offre mobile de Free est « 'sans engagement' ». Avec de se fendre, ironiquement, d'un « Merci qui ? », en référence au slogan « Merci qui ? Merci Free » de son concurrent.
(Crédits: capture d'écran Twitter)
Ce qui est certain, c'est que Free a fait un choix différent de ses rivaux pour apporter la 5G. Outre les nouvelles fréquences 3,5 GHz dédiées à cette technologie, l'opérateur de Xavier Niel utilise massivement ses fréquences 700 MHz, qui servent également pour la 4G. Ces dernières sont des fréquences basses. Elles ont l'avantage de porter beaucoup plus loin que les fréquences 3,5 GHz. Mais en revanche, elles sont moins performantes en matière de débits.
Vives critiques concernant la stratégie 5G de Free
Ce choix de Free suscite depuis longtemps l'ire de la concurrence. Sans citer nommément leur rival, Orange et SFR ont dénoncé, depuis près d'un an, cette stratégie visant, selon eux, à sacrifier la qualité de service pour revendiquer, d'un point de vue marketing, une plus grande couverture du territoire auprès du grand public. En témoigne cette sortie de Grégory Rabuel, le PDG de SFR, dans nos colonnes en novembre 2020, soit un mois avant que Free dégaine son offre 5G :
« Certains concurrents vont probablement recourir largement aux bandes de fréquences 700 MHz, 1800 MHz et 2100 MHz pour la 5G, affirmait-il. Cela leur permettra d'afficher un logo 5G sur le smartphone, de publier des cartes de couverture très importantes, mais avec une qualité de service égale ou inférieure à celle de la 4G. Cela peut être déceptif pour les clients qui auront acheté un nouveau téléphone, souscrit à de nouvelles offres, mais ne bénéficieront au final que d'une '5G dégradée'. »
Aujourd'hui, l'enquête de l'Arcep semble, au grand dam de Free, apporter de l'eau à son moulin.
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