La Turquie prévient que son intervention en Syrie va durer

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L'intervention militaire turque en syrie appelee a durer[reuters.com]
(Crédits : © Umit Bektas / Reuters)

par Nick Tattersall et Humeyra Pamuk

ISTANBUL/KARKALIS (Reuters) - La Turquie a affiché sa détermination à poursuivre aussi longtemps que nécessaire son intervention militaire en Syrie contre les djihadistes de l'Etat islamique et les insurgés kurdes après un attentat revendiqué par le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) qui a fait 11 morts, vendredi.

Cette opération suicide, qui a visé le quartier général de la police à Cizre, ville d'une province frontalière de la Syrie et de l'Irak, s'est produite deux jours après l'intervention de troupes d'élite turque, soutenues par des blindés et l'aviation alliée, en territoire syrien

Le président Recep Tayyip Erdogan a réagi en affirmant que l'attentat commis dans la province de Sirnak ne ferait que renforcer la détermination de son pays à combattre les groupes terroristes en Turquie et à l'étranger.

Il s'est d'ailleurs entretenu au téléphone de cette question avec son homologue russe Vladimir Poutine dans le cadre du rapprochement entre la Russie et la Turquie, brouillée depuis qu'un appareil russe a été abattu par l'armée turque en novembre.

L'intervention turque en Syrie vise autant à lutter contre l'EI qu'à contenir dans le nord du pays la progression des Unités de protection du peuple (YPG), la milice kurde qui appartient à une alliance de rebelles soutenue par les Etats-Unis.

"Depuis le début, nous avons défendu l'intégrité territoriale de la Turquie. Nous défendons aussi l'intégrité territoriale de la Syrie", a commenté le Premier ministre turc Binali Yildirim.

"Le but de cette organisation terroriste (le PKK) est de former un Etat dans ces pays (la Syrie et l'Irak). Ils ne réussiront jamais", a-t-il lancé lors d'une conférence de presse à Istanbul.

"Nous continuerons jusqu'à l'éradication de Daech et d'autres éléments terroristes", a-t-il ajouté.

L'opération "Bouclier de l'Euphrate", lancée aux premières heures de la journée de mercredi a été condamnée par le gouvernement syrien comme une violation de sa souveraineté.

PROGRESSION VERS L'OUEST

Cette intervention a également été condamnée vendredi par une alliance de 23 partis kurdes qui demandent, dans un communiqué, un retrait complet des troupes turques présentes en territoire syrien.

Selon eux, les autorités d'Ankara tentent d'occuper la Syrie en prenant pour prétexte la lutte contre le terrorisme.

Des journalistes de Reuters ont assisté à des va et vient de blindés entre la Turquie et la Syrie tandis que des unités de déminage étaient à l'oeuvre dans les environs du passage frontalier de Karkamis. Des engins de terrassement ont été dépêchés sur place afin de construire des voies utilisables par les blindés.

Le pouvoir turc a conçu cette intervention militaire sur la durée comme l'a confirmé Erdogan au vice-président américain Joe Biden en visite à Ankara mercredi. L'idée d'un retrait n'est pas envisageable tant que l'EI n'a pas été mis hors de combat, a-t-il indiqué en substance.

Après la prise de contrôle de la ville de Djarablous par des rebelles soutenus par Ankara, les troupes turques ont poursuivi en direction de l'ouest.

Le but est d'empêcher les Kurdes d'opérer la jonction entre les zones qu'ils contrôlent à l'est de l'Euphrate et le canton d'Afrin dans le nord-ouest de la Syrie.

A plusieurs reprises, la Turquie a réclamé l'instauration d'une "zone tampon" dans le nord de la Syrie mais sa priorité immédiate est de progresser d'environ 70 km en direction de Marea, ville rebelle qui fut longtemps située sur la ligne de front avec les djihadistes.

Chasser l'EI de ces territoires priverait l'organisation djihadiste des voies de ravitaillement par lesquelles transitent armes, matériel et combattants.

"La situation se dégrade en Syrie et en Irak", a estimé Binali Yildirim. "Nous éradiquons l'Etat islamique et d'autres éléments terroristes afin que les gens ne soient pas contraints de fuir leurs habitations", a-t-il ajouté.

(Pierre Sérisier pour le service français)