[Article publié le lundi 6 mai 2024 à 8h19, mis à jour à 16h22] En dépit des condamnations internationales, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a promis de lancer une offensive sur la ville de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza. Elle est, selon lui, indispensable pour détruire les derniers bataillons du mouvement islamiste dans le territoire palestinien. Et elle se prépare depuis ce lundi. Face au risque d'importantes pertes humaines, la Maison Blanche a annoncé que le président Joe Biden va s'entretenir ce lundi avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu pour tenter de le convaincre de ne pas lancer l'assaut.
Reste qu'en attendant, l'armée israélienne a confirmé avoir « commencé une opération d'ampleur limitée pour évacuer temporairement les personnes résidant dans l'est de Rafah », estimant à « environ 100.000 » le nombre de personnes concernées, alors que cette ville est le dernier refuge pour près d'un million et demi de Palestiniens. Elles ont été invitées à se rendre « immédiatement vers la zone humanitaire élargie d'al-Mawasi », à une dizaine de kilomètres de Rafah, selon des tracts distribués.
L'armée affirme que « des hôpitaux de campagne, des tentes et un volume croissant de nourriture, d'eau, de médicaments et autres » sont installés dans cette zone. Mais des habitants et des organisations humanitaires décrivent des secteurs déjà surpeuplés ou détruits après sept mois de guerre. Un responsable de l'ONG Action contre la faim, Jean-Raphaël Poitou, a décrit un lieu où « tout est abîmé ». « Les infrastructures, dans toutes les zones qui seraient rouvertes, tout a été aplati. Les gens vont devoir aller sur des débris ou dans des petites zones », dans le désert ou sur la plage, a-t-il affirmé.
« Les habitants évacuent dans la terreur et la panique », a déclaré à l'AFP Ossama al-Kahlout, un responsable du Croissant-Rouge palestinien dans l'est de Rafah, précisant que les zones désignées abritaient environ 250.000 personnes.
Des habitants ont raconté à l'AFP avoir appris la nouvelle à leur réveil, après une nuit d'angoisse rythmée par une dizaine de frappes israéliennes. Certains préparaient leurs affaires, dans leurs tentes inondées par une pluie abondante, ou les entassaient dans des remorques.
Les États-Unis appelés à l'aide
Dans ce contexte, la présidence de l'Autorité palestinienne a appelé les États-Unis à empêcher l'invasion de Rafah par l'armée israélienne. « Nous appelons l'administration américaine à intervenir pour empêcher ce massacre, dont nous avertissons qu'il aura des répercussions dangereuses », indique-t-elle, citée par l'agence de presse officielle palestinienne Wafa, précisant multiplier les discussions « intensives » avec ses partenaires internationaux à ce sujet.
« Nous ne pouvons pas nous exprimer sur les opérations de l'armée israélienne », mais « nous avons fait clairement part au gouvernement israélien de notre point de vue sur une invasion terrestre majeure de Rafah », a indiqué à l'AFP un porte-parole du Conseil national de sécurité, ce lundi. « Nous continuons de croire qu'un accord de libération d'otages constitue le meilleur moyen de préserver les vies des otages et d'éviter une invasion de Rafah », a-t-il poursuivi, ajoutant que « ces négociations sont en cours ».
De nouveaux pourparlers samedi et dimanche au Caire se sont heurtés à l'intransigeance des deux camps. Le Hamas continue à réclamer un cessez-le-feu définitif tandis qu'Israël promet de détruire le mouvement islamiste au pouvoir à Gaza. Des discussions de trêve devaient en principe se poursuivre ce lundi au Qatar, le principal pays médiateur, où est attendu le directeur de la CIA, William Burns.
Outre les États-Unis, les capitales et organisations internationales s'opposent à l'opération annoncée d'Israël. Cet ordre d'évacuation « laisse présager le pire : davantage de guerre et de famine. C'est inacceptable. Israël doit renoncer à une offensive terrestre » à Rafah, a lancé lundi le chef de la diplomatie de l'Union européenne, Josep Borrell.
Benjamin Netanyahu campe sur ses positions
Le Premier ministre israélien campe en tout cas fermement sur sa position quant à la suite à donner au conflit à Gaza. « Je dis aux dirigeants du monde entier qu'aucune pression, aucune décision d'une instance internationale n'empêchera Israël de se défendre », a-t-il lancé dimanche, lors d'une cérémonie de commémoration de l'Holocauste au mémorial de Yad Vashem à Jérusalem.
« Si Israël doit rester seul, Israël restera seul », a insisté le Premier ministre israélien.
Il a aussi dénoncé « ce terrible volcan de l'antisémitisme » qui déferle à travers le monde entier contre Israël à propos de sa guerre à Gaza. Benjamin Netanyahu a comparé les manifestations observées dans les universités à travers le monde, notamment aux États-Unis, à la discrimination dont les Juifs ont été victimes dans les universités allemandes pendant la Seconde Guerre mondiale. « Quelle distorsion de la justice et de l'histoire », a-t-il déclaré. Les critiques, a-t-il dit, ne sont pas « dues à nos actions, mais parce que nous existons... parce que nous sommes juifs ». « Aujourd'hui, nous affrontons à nouveau des ennemis déterminés à notre destruction », a déclaré Netanyahu à la grande foule rassemblée pour la cérémonie.
Le Forum des familles d'otages a une nouvelle fois appelé Benjamin Netanyahu à accepter un accord qui permettrait une libération des otages. « M. Netanyahu, l'Histoire ne vous pardonnera pas si vous ratez cette occasion », affirme ce texte.
(Avec AFP)