Porto Rico, la "Grèce des Caraïbes", évite de justesse un défaut de paiement

L'île des Caraïbes a honoré, d'extrême justesse, une dette de 354 millions de dollars mardi 1er décembre. Mais le pire est peut-être à venir : le 1er janvier, une nouvelle échéance de 357 millions de dollars arrive à son terme. Proche de l'asphyxie, Porto Rico demande au Congrès américain la possibilité de faire faillite, et de restructurer sa dette pour éviter une situation "catastrophique".
Rico, qui compte 3,5 millions d'habitants, a cumulé une dette de quelque 72 milliards de dollars après plusieurs années de récession. Sur la photo, une manifestation à Porto Rico le 5 novembre pour améliorer la protection sociale.

Porto Rico a évité à la dernière minute un défaut de paiement en remboursant mardi 1er décembre une échéance de 354 millions de dollars sur les 72 milliards que représente sa dette au total.

La Banque Gouvernementale de Développement (GDB), qui fait office pour l'île de banque centrale, a confirmé mardi dans un communiqué qu'elle avait "payé tout le principal et les intérêts sur certaines obligations émises par la GDB".

"Les remboursements effectués aujourd'hui (mardi) reflètent notre engagement à honorer nos obligations, en dépit des défis budgétaires auxquels nous faisons face, et montrent notre volonté d'aboutir à un processus de restructuration volontaire avec nos créanciers", a ajouté le président de la GDB, Melba Acosta Febo, cité dans le communiqué.

"Mais, ne vous y trompez pas, la situation de Porto Rico en terme de liquidités est très difficile en dépit des mesures extraordinaires prises par le gouvernement pour y faire face", a-t-il averti.

M. Febo a ainsi prévenu que certains des moyens financiers qui étaient initialement destinés à rembourser la dette d'entreprises publiques pourraient désormais être utilisés pour rembourser plutôt la dette publique.

Le défaut pour éviter une situation "catastrophique"

Territoire rattaché aux Etats-Unis depuis la fin du XIXe siècle, Porto Rico, qui compte 3,5 millions d'habitants, a cumulé une dette de quelque 72 milliards de dollars après plusieurs années de récession.

L'île ne dispose toutefois pas de la possibilité de restructurer sa dette en se plaçant sous un régime de faillite, à l'inverse des municipalités américaines. La crise économique a provoqué un véritable exil des entreprises installées sur l'île ainsi que de ses habitants dont 300.000 ont émigré sur la dernière décennie.

Le Gouverneur de l'île a demandé mardi lors d'une audition devant le Congrès américain que Porto Rico dispose de la possibilité de faire faillite et restructurer sa dette pour éviter une situation "catastrophique".

L'île a jusqu'à maintenant évité de se retrouver en défaut mais "il n'y a plus d'argent", a affirmé le gouverneur, Alejandro García Padilla mardi.

"La possibilité d'un défaut est très forte, si l'alternative est de ne plus pouvoir assurer les services essentiels afin de  payer nos créanciers", a-t-il averti.

L'ONG "Jubilee 2000" qui s'occupe des questions d'endettement pour les pays pauvres, a indiqué mardi qu'elle était "surprise" que Porto Rico soit parvenue à honorer ses paiements mardi. "Mais le prochain chapitre va vite s'ouvrir", a souligné son directeur Eric LeCompte en rappelant que l'île doit effectuer le 1er janvier un paiement de 357 millions de dollars.

Un Porto-Ricain sur deux vit sous le seuil de pauvreté

L'ONG rapporte que plus de la moitié de la population vit désormais sous le seuil de pauvreté et que 80% des enfants vivent dans des zones de forte paupérisation.

"Cette crise affecte des citoyens américains et nous avons absolument besoin d'une solution qui rende cette dette soutenable et évite l'austérité", a ajouté M. LeCompte.

Si les citoyens porto-ricains sont des ressortissants américains, l'archipel n'est pourtant pas considéré comme un des 50 Etats du pays.

L'agence de notation Standard and Poor's a de son côté laissé mardi inchangée la note CC avec perspective négative de la GDB,  en indiquant qu'elle estimait que "les chances qu'elle puisse satisfaire aux paiements à l'avenir ne sont pas bonnes".

Elle souligne que, au 30 juin 2015, la banque avait 4,1 milliards de dollars de dette en circulation dont elle doit rembourser 400 millions en principal et intérêts d'ici à juin 2016 alors que ses liquidités, après les paiements effectués mardi, sont de l'ordre de 500 millions de dollars. En conséquence, un défaut de l'institution portoricaine est "virtuellement certain", estime S&P.

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>Lire aussi: Porto Rico : une Grèce des Caraïbes ? (par Romaric Godin, 2015.08.05)

(Avec AFP)

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