"Cinq ans de croissance zéro si les banques ne sont pas massivement recapitalisées"

L'économiste Jacques Delpla ne croit pas à un éclatement de la zone euro. Mais la sortie définitive de la crise suppose un peu de croissance, et donc un coup d'arrêt au "credit crunch" qui se dessine. Pour ce faire, il faut contraindre les banques à se recapitaliser massivement, dit-il. Et les des eurobonds seront nécessaires
Jacques Delpla, membre du Conseil d'analyse économique

La crise dans la zone euro va-elle reprendre ?
Je ne suis pas pessimiste, outre mesure, s'agissant de la zone euro. L'action de Mario Draghi m'apparaît très positive, comme on le voit avec la baisse des taux d'intérêt à long terme en Espagne et Italie. Toutefois, le rythme de diminution des déficits imposé aux pays du sud est à l'évidence intenable. On demande à l'Espagne de baisser son déficit de plus de six points de PIB en trois ans, ce n'est pas possible. C'est donc le premier ajustement à réaliser, si l'on veut obtenir une véritable sortie de crise : celui d'un étalement du calendrier de baisse des déficits. Y compris pour la France : s'il s'avère que l'échéance des 3% de déficit en 2013 n'est pas tenable, il ne faut pas s'y accrocher coûte que coûte. L'important est que les marchés aient compris l'existence d'une véritable volonté de diminuer les déficits, sur le long terme. Et cette volonté existe vraiment. La gauche augmente les impôts aujourd'hui, demain, la droite diminuera les dépenses. En tout état de cause, le déficit sera maîtrisé.

Vous ne partagez pas le pessimisme d'un Nouriel Roubini, qui suggère d'en finir avec l'euro, aujourd'hui, en tentant de maîtriser le processus, plutôt que d'attendre que tout explose...
Roubini aurait parfaitement raison si personne ne faisait rien en Europe. Mais ce ne sera pas le cas. Cette crise est grave, mais surmontable. Une fin de l'euro aurait des conséquences politiques et sociales redoutables, bien au-delà de ce qu'on peut imaginer.

Retrouver un peu de croissance aiderait à surmonter la crise?
Assurément. De ce point de vue, il existe un véritable blocage, qui est trop souligné c'est celui des banques. Elles ne prêtent plus, ou presque. On se dirige vers un véritable « credit crunch », qui va miner durablement l'activité économique. Si la situation actuelle perdure, on peut s'attendre à cinq années de croissance zéro, notamment en France.

Comment leur faire changer d'attitude ?
Il faut les contraindre à se recapitaliser, massivement. Elles évitent de prêter, notamment pour respecter les fameux ratios de solvabilité. Il faut changer de logique. Remonter fortement les ratios de solvabilité, et imposer une hausse en valeur - et non pas seulement en proportion des crédits - de leurs fonds propres. Les autorités françaises sont en mesure de prendre de telles décisions. De ce point de vue, François Hollande commet une lourde erreur, en faisant ami-ami avec les banquiers, après avoir fait du monde de la finance son « ennemi » pendant la campagne électorale. Evidemment, cette recapitalisation supposerait une perte pour les actionnaires. Mais il faut en passer par là.
Mario Draghi montre l'exemple, quand il évoque la nécessité pour les créanciers des banques espagnoles d'assumer des pertes, avant que le contribuable passe à la caisse. Quant à la perspective d'union bancaire, elle est évidemment favorable.

A plus long terme, quelles sont les directions à prendre pour assurer la viabilité de la zone euro ?
Du point de vue de la maîtrise de finances publiques, une réforme des retraites, généralisée à la zone euro, serait nécessaire. Les retraites à payer sont synonymes d'engagement hors bilan, de dépenses à venir, parfois difficilement maîtrisables. La solution, ce serait d'adopter un système de retraites par points à la suédoise, qui est, par construction, équilibré : chaque année, les dépenses sont ajustées aux ressources.
En outre, il faut que les Européens adoptent bien sûr les « eurobonds ». Sans cette mutualisation des dettes publiques, à laquelle Nicolas Sarkozy n'était pas favorable, il est illusoire de sortir définitivement de la crise. François Hollande se montre suffisamment fédéraliste pour aller dans cette direction. Les Allemands l'accepteront seulement contre un contrôle strict des finances publiques des Etats de la zone euro. Un contrôle synonyme d'abandon de souveraineté. Mais il faut savoir ce que l'on veut.

Commentaires 7
à écrit le 31/08/2012 à 1:21
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Ces économistes disent tous la meme chose, du vent du vent encore du vent. En même temps, faut bien défendre le système qui les nourrit ces pros libéraux

à écrit le 31/08/2012 à 1:12
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"Et les des eurobonds seront nécessaires" , "va-elle", ça fait mal aux yeux dès les premières lignes

à écrit le 30/08/2012 à 20:30
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s'ils font ca qu'on attende plsu de moi que je rende service à une quelconque personne dans la rue. Ne serait ce que pour lui donner l'heure.

à écrit le 30/08/2012 à 20:24
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À choisir, je prend plutôt les 5 années de croissance nulle. Il est hors de question que le contribuable ré capitalise les banques ! Elles nous ont amenés au fond du trou et il faudrait en plus payer pour elles ? Non ! Non et non !

à écrit le 30/08/2012 à 19:55
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Du bon sens !

à écrit le 30/08/2012 à 19:39
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"Une fin de l'euro aurait des conséquences politiques et sociales redoutables, bien au-delà de ce qu'on peut imaginer". Il convient de ne pas s'arrêter en route mais de dire lesquelles précisement et non de rester dans le flou pour effrayer et défend...

à écrit le 30/08/2012 à 17:04
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Le voilà le Delpla des beaux salons et des antichambres, après avoir dit n'importe quoi pour il dit n'importe quoi contre... est-il encore crédible ?

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