Un ".eu" pour concurrencer le ".com"

Pour parachever la construction de l'Union Européenne, il lui fallait une identité sur Internet. Voilà qui sera bientôt fait. Après deux ans de tergiversations, la Commission européenne a enfin annoncé en fin de semaine dernière qu'il serait possible d'acheter un nom de domaine en ".eu" d'ici la fin de l'année. Ce n'est qu'au bout d'âpres négociations que la Commission a décidé de confier à Eurid, un consortium basé à Bruxelles, dont les trois membres fondateurs gèrent déjà les noms de domaines en ".be" (Belgique), ".it" (Italie) et ".se" (Suède), la gestion du ".eu".Avant de pouvoir insérer le nouveau suffixe dans l'adressage mondial, la Commission Européenne doit encore adopter un certain nombre de conventions. Elle doit notamment empêcher les achats spéculatifs, établir des règles de propriété intellectuelle, résoudre les difficultés liées à la langue et définir des concepts géographiques.Le ".eu" sera alors accessible à "toute personne dans l'Union européenne, toute entreprise ayant son siège statutaire, son administration centrale ou son lieu d'établissement principal dans l'Union, et toute organisation établie dans l'UE aura le droit d'enregistrer des noms de domaine '.eu'", a précisé la Commission européenne.Reste à savoir si cette nouvelle extension d'adresse Internet saura séduire. Car, pour l'instant, le ".com" continue de dominer largement la Toile et les tentatives de diversification entreprises par l'ICANN, le régulateur des noms de domaine sur Internet, sonnent comme des semi-échecs. En novembre 2000, l'ICANN décide d'attribuer sept nouvelles adresses génériques : ".info", ".name" (particuliers), ".pro" (sites professionnels), ".museum", ".aero" (industrie aérienne), ".biz" (entreprises) et ".coop" (coopératives). Bilan deux ans après : force est de constater que le ".com" reste très dominant avec plus 23 millions de noms de domaines enregistrés à ce jour, contre 3,8 millions pour le ".net", 2,5 millions pour le ".org". Et en fin de peloton, bien loin derrière, arrivent le ".info" avec 1,1 million d'adresses et le ".biz" avec 930.000 sites Internet.Pour beaucoup de professionnels, c'est clair: les nouvelles adresses, notamment le ".biz" ou le ".info", sont des échecs. C'est l'avis de Patrick Chassany, directeur associé d'Amen.fr, une société française d'hébergement de sites Internet. "L'attribution des adresses était bien trop compliquée, et aujourd'hui on constate que l'achat des ".info" ou ".biz" est une mesure conservatoire", explique-t-il. Traduisez : les sites Internet acquièrent ces extensions en plus de leur adresses en .com ou en .fr, afin de protéger leur marque pour qu'elle ne tombe pas entre des mains peu scrupuleuses. On est donc bien loin de l'objectif de départ. Dans la base de 130.000 noms de domaines hébergés par Amen, 80% des noms terminent en ".com". "Le ".name" on ne le propose même pas, car cela créerait trop de confusion auprès de nos clients", explique Patrick Chassany, qui pense que le ".eu" ne sera qu'un pétard mouillé supplémentaire sur la Toile. Chez Amen.fr, les clients commandent environ 10 ".com", pour un ".fr". Il est vrai que l'achat d'un ".fr" est plus réglementé et plus coûteux que celui d'un ".com".La création du ".eu" ne serait-elle qu'une énième coquetterie des représentants du Web? A l'ICANN, pourtant, on martèle la nécessité de multiplier les possibilités d'adressage. "Je ne considère pas que les nouvelles adresses soient des échecs. Au contraire, je pense que les ".info" et les ".biz" vont bientôt être pris d'assaut", affirme Olivier Itenau, qui représente l'Europe au sein de l'ICANN. "Des études montrent qu'un scénario de rattrapage des ".biz" et ".info" au niveau des ".net" ou ".org" est plausible pour 2003", assure-t-il. Et de se baser sur la pénurie du nombre d'adresses disponibles actuelles. "Aujourd'hui, toutes les combinaisons entre un et 5 signes sont prises", rappelle encore Olivier Itenau.Pour l'avocat, la diffusion des nouvelles adresses n'est qu'une question de temps. "Les sites communiquent sur des ".net" et ".org" depuis 7 ans. "Au début, le ".fr" était difficile à obtenir administrativement. Ce qui ne l'a pas empêcher de se développer à partir du moment où l'on a décidé de l'employer", conclut-il.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.