L'AIE prône un recours accru au nucléaire

Alternative à un système énergétique cher et sale, les énergies hors hydrocarbure, et particulièrement le nucléaire, sont encouragées par l'Agence internationale de l'énergie. L'AIE recommande une forte augmentation des capacités de production du nucléaire, de 368 gigawatts actuellement à 519 en 2030.

L'Agence internationale de l'énergie (AIE) rejoint les préoccupations générales actuelles sur le changement climatique, parallèlement à la 12e conférence onusienne sur le climat démarrée lundi à Nairobi et l'alarmant rapport Stern sur le coût de 5.500 milliards d'euros de cette dérive dans les dix prochaines années. Motivée également par le manque de ressource pétrolière à venir et l'envolée des prix du brut ces derniers mois, l'AIE a publié un rapport qui prône le développement des énergies alternatives, et essentiellement du nucléaire.

Dans son rapport annuel publié aujourd'hui, World Energy Outlook, l'Agence internationale de l'énergie donne sa réponse au "mandat" que lui avaient confié l'an dernier les chefs d'Etat et de gouvernement des huit pays les plus industrialisés (G8), lors de leur sommet de Gleneagles (Grande-Bretagne).

"Avec les tendances actuelles, nous allons vers un système énergétique cher et sale, qui ira de crise en crise. Cela peut signifier de nouvelles perturbations de l'approvisionnement, des désastres météorologiques ou les deux. Un tel futur énergétique est non seulement non durable, il est condamné à l'échec", a prévenu le directeur exécutif de l'AIE, Claude Mandil, lors d'une conférence de presse à Londres. "Les gouvernements peuvent, soit accepter cet avenir, soit décider de s'unir pour faire dévier son cours. Non seulement c'est possible, mais cela fait sens du point de vue économique", a-t-il poursuivi.

Comme dans ses éditions précédentes, l'AIE, agence créée après le premier choc pétrolier pour conseiller les pays riches de l'OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) a étudié plusieurs scénarios pour son rapport. Celui dit "de référence" fait le point sur les tendances à prévoir si les politiques actuelles ne sont pas infléchies, tandis que celui dit "alternatif", résume à l'inverse ce vers quoi les décideurs politiques devraient tendre pour limiter les dégâts.

Dans le premier, l'AIE table sur un bond de la demande d'énergie primaire de 53% entre 2004 et 2030, dont 70% proviendrait des pays en développement. L'agence a en outre revu en hausse le coût déjà faramineux des investissements nécessaires pour "satisfaire la voracité croissante du monde" en énergie à 20.000 milliards de dollars, contre 17.000 milliards il y a un an. Les auteurs expliquent cette différence par la forte inflation liée à l'activité du secteur.

Dans cette hypothèse, la Chine dépasserait avant 2010 les Etats-Unis en tant que premier émetteur mondial de dioxyde de carbone (CO2). Un tel scénario "démontre combien il est urgent que les pouvoirs publics agissent. Chaque année de retard pris dans la mise en oeuvre des politiques analysées aurait un effet hors de proportion sur les émissions" de CO2, prévient le rapport.

Mais rien de tout cela n'est "gravé dans le marbre", insiste l'AIE à l'intention des gouvernements. Les conclusions du scénario "alternatif" démontrent ainsi que "l'économie mondiale peut s'épanouir même en utilisant moins d'énergie". Les auteurs suggèrent pour cela un cocktail d'économies d'énergie, d'amélioration de l'efficacité énergétique et de recours accru aux ressources locales des pays importateurs comme aux énergies hors hydrocarbures. Ils soulignent ainsi que les perspectives du nucléaire "redeviennent prometteuses", et recommandent une forte augmentation des capacités de production, de 368 gigawatts actuellement à 519 GW en 2030.

Des investissements et des progrès technologiques majeurs dans la séquestration du CO2 ou les énergies renouvelables sont "urgents", a insisté M. Mandil et "la bonne nouvelle est que cette évolution est économique". Les investissements de départs seront rapidement compensés par le recul des achats de pétrole. Le charbon est aujourd'hui plus cher que le gaz pour produire de l'électricité, et le nucléaire peut être dans certains cas meilleur marché que ces deux ressources. A l'horizon 2030, la différence en termes de consommation d'énergie si le monde se pliait au scénario alternatif serait déjà gigantesque, équivalente à la consommation actuelle de la Chine, ou 10% de la consommation mondiale. Les émissions de dioxyde de carbone serait inférieure de 16%, soit la totalité des émissions actuelles conjointes des Etats-Unis et du Canada.

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