Deux courts-métrages bardés d'une vingtaine de prix glanés dans une multitude de festivals. Carine Tardieu pourrait en récolter tout autant avec "La tête de maman", son premier long. Car elle réussit ici un film remarquablement maîtrisé, drôle et émouvant, dont l'intensité grandit au fil des scènes.

Tout tourne autour de Karine Viard, mère absente, handicapée du sentiment, incapable de s'occuper de son enfant ou de porter un quelconque intérêt à son mari (excellent Pascal Elbé). Au point où Lulu (Chloé Coulloud), sa fille de 15 ans, n'en peut plus d'avoir à supporter sa fatigue permanente, sa dépression chronique ou encore ses problèmes intestinaux étalés devant tout le monde. Elle rêve d'autre chose Lulu, d'une mère aimante, blagueuse comme celle de sa meilleure amie. Ou, pourquoi pas, d'un clone de son idole Jane Birkin.

La découverte d'un vieux film en super 8 change la donne. La gamine y aperçoit alors sa mère sous un autre jour. Celui d'une jeune femme de 18 ans, heureuse, croquant la vie à pleines dents, amoureuse de son premier amant. Il n'en faut pas plus à Lulu pour partir en quête de ce dernier, persuadé qu'il rendra son sourire perdu à sa mère. Et qu'importe si ce gardien de zoo n'est pas vraiment le premier prix de beauté fantasmé.

Carine Tardieu signe ici un formidable portrait d'adolescente. Se faisant, elle révèle une actrice exceptionnelle. Chloé Coulloud incarne à merveille ce garçon manqué frondeur et rebelle, prêt à en découdre à la moindre occasion, si malheureuse qu'elle en devient odieuse avec tout le monde. Son côté bulldozer colle d'ailleurs au ton du film, brut mais sensible, sauvé par des rasades d'humour, une fantaisie assumée et un refus de sombrer dans le pathos. La réalisatrice ne laisse rien au hasard, composant certaines scènes comme un tableau. A commencer par celles réalisées au zoo. Une excellente surprise à découvrir en famille.