La fin de semaine s'annonce difficile pour Alcatel-Lucent. Alors que l'équipementier en télécommunications doit publier ses résultats annuels vendredi, le marché attend avec impatience les éclaircissements du groupe sur ses "très mauvais" résultats du quatrième trimestre, ainsi que sur les rumeurs de 15.000 à 20.000 suppressions d'emplois qui ont filtré dans la presse aujourd'hui. Près de 20% de l'effectif mondial du groupe seraient menacés.

"Nous attendons des explications sur l'importante perte de revenus du quatrième trimestre, traditionnellement le plus important en termes de chiffres d'affaires pour Alcatel", fait remarquer un analyste d'une grande banque française interrogé par l'agence AFP, avant d'ajouter que ce chiffre "est vraiment très mauvais".

Le 23 janvier dernier, le groupe franco-américain nouvellement fusionné avait lancé un sévère avertissement sur ses résultats, anticipant un quatrième trimestre "difficile". Alcatel-Lucent avait alors nettement ajusté ses prévisions sur la période, avec un chiffre d'affaires ajusté pro forma à 4,42 milliards d'euros, en baisse de plus de 15%, et un résultat d'exploitation "à peu près à l'équilibre" contre 570 millions un an plus tôt. A l'époque, ce profit warning avait pris les investisseurs par surprise, entraînant une chute de 11% du titre.

Pour justifier cette mauvaise surprise, Patricia Russo, la nouvelle patronne du groupe, avait alors fait valoir "l'incertitude" qu'a suscitée la fusion parmi les clients, un "report des investissements" des principaux clients en Amérique du Nord et enfin une concurrence "exacerbée" sur le marché du mobile. En conséquence, les prévisions révisées d'Alcatel-Lucent tablent sur un chiffre d'affaires 2006 stable à 18,3 milliards d'euros, mais plus alarmant, sur une forte baisse de son bénéfice d'exploitation à 1,04 milliard, en recul de 26,2%.

En outre, plusieurs analystes soulignent la difficulté d'examiner les comptes du groupe, compte tenu des nombreux mouvements qui l'ont affecté en 2006, dont la fusion, le transfert d'actifs d'Alcatel à Thales et l'acquisition des activités radio UMTS de Nortel. "Nous attendons des chiffres pro forma sur 2005 et 2006 afin d'être en mesure de faire des modèles", souligne à l'AFP un analyste ayant requis l'anonymat, "car pour l'instant nous sommes dans le flou le plus total".

Un flou entretenu ce matin par des informations publiées par le site Internet de L'Expansion faisant état de la possible suppression de 15.000 à 20.000 emplois, un chiffre bien supérieur aux 9.000 postes annoncés initialement par le groupe lors de la fusion. La direction du groupe s'est refusé à tout commentaire sur ces informations, renvoyant à la publication de ses résultats vendredi. Elle a aussi confirmé la tenue la semaine prochaine des comités centraux des filiales françaises d'Alcatel et du comité Groupe France au cours desquels les représentants des salariés seront informés des "plans de sauvegarde de l'emploi". En clair, des plans sociaux.