L'intelligence plurielle : un talent nécessaire pour faire la différence

Construire la performance exige aujourd'hui de nouveaux talents. Les responsables doivent plus que jamais savoir capter les signaux faibles, anticiper l'imprévisible et relever des défis paraissant inconciliables.

L'actualité et les études menées par les universités les plus prestigieuses nous le démontrent quotidiennement : les décideurs qui font la différence ont une compréhension plus fine, une intelligence plus aiguisée des situations. Dans un environnement difficile, ils savent faire appel à toutes leurs ressources pour décider et agir de façon pertinente.
Ils s'appuient sur une forme d'intelligence dite plurielle, un talent devenu indispensable pour réussir aujourd'hui et inventer demain tous les jours.

Qu'est-ce que l'Intelligence Plurielle ?

L'intelligence plurielle se définit comme une réponse efficace pour faire face à la complexité. C'est une forme d'intelligence mobile, évolutive, qui met en lien 6 types de potentialités : intellectuelles, sensorielles, émotionnelles, sensibles, imaginatives et oniriques, et celles liées aux connaissances et à la mémoire. Elle permet d'augmenter la porosité entre nos différents niveaux de conscience, d'être plus perméable à des visions du monde différentes de la nôtre, de sentir ce qui existe déjà mais ne se lit pas encore sans ce talent particulier, autant d'atouts qui s'avèrent précieux dans un environnement multiculturel en mouvement permanent. Elle se travaille et se développe selon une progression en 7 étapes.

Les 7 étapes du développement de l'intelligence plurielle

- Se connaître et développer une juste estime de soi
- Découvrir les 3 principales attitudes qui facilitent la mise en lien de nos différentes facultés : celle de l'explorateur (celui qui remet en cause les automatismes, cherche à découvrir d'autres angles de vue), celle du bâtisseur nomade (celui qui recherche les ponts et les analogies avec d'autres idées, sensations, situations voisines tout en agissant, sait avancer en étant à la fois être tout à fait concentré sur le but et tout à fait détendu et perméable à ce qui peut se produire d'important) et celle du sage oriental (celui qui sait prendre du recul, contempler, gérer les paradoxes, prendre les événements dans leur rythme pour mieux les faire évoluer dans le sens voulu).
- Explorer et développer les 6 types de ressources disponibles citées plus haut
- Harmoniser et mettre en lien nos talents par l'action
- Enrichir notre Intelligence Plurielle au sein d'un collectif pour lui donner du sens
- S'entraîner, se "muscler" au quotidien
- Et mettre en place des indicateurs pour "tester" l'efficacité de son Intelligence Plurielle

Quelques moyens concrets de développer son intelligence plurielle

S'entraîner quotidiennement permet de développer son intelligence plurielle.
La première étape importante est de savoir identifier d'où l'on part. Répondre à la question suivante pose un premier éclairage : A quelles ressources fais-je appel en priorité pour décider et pour agir ?

Essayez de les classer et de leur affecter un pourcentage :

Mon potentiel intellectuel (logique, rationalité, capacités conceptuelles...)
Mon potentiel sensoriel (messages et signaux corporels ou physiques ressentis pour soi-même et chez les autres, capacités à se représenter et à représenter les objets dans l'espace, habilité et sens pratique...)
Mon potentiel émotionnel : savoir reconnaître la nature des émotions éprouvées par soi-même et par les autres
Mon potentiel sensible (l'intuition, la réceptivité aux signaux faibles, les capacités d'observation et le sens de la nuance...)
Mon potentiel imaginatif ou onirique (aptitudes à inventer, imaginer d'autres perspectives, prendre du recul par rapport au réel...)
Le potentiel lié à mes connaissances et à ma mémoire (savoir relier des événements présents et passés, pouvoir mettre en lien mes différents types de mémoire, aller puiser dans les connaissances acquises celles qui sont utiles à l'action présente...)

On peut trouver ensuite des moyens concrets de faire progresser les potentialités les moins actives. L'idée n'est pas de modifier ce qui constitue la base de notre mode de fonctionnement, l'origine de nos réussites et fonde notre équilibre particulier. Mais plutôt d'augmenter la richesse des interactions qui créent la qualité de notre raisonnement.

Prenons quelques exemples, quitte à paraître un peu caricatural dans ces résumés : je suis un(e) cérébrale : je constate que je me sers essentiellement de mon potentiel intellectuel et de ma mémoire.

On peut dans ce cas commencer à travailler sur sa sensorialité, c'est-à-dire sur le repérage des signaux physiques qu'envoie notre corps dans le courant de la journée. Il s'agit au départ de noter ce qu'on ressent dans une situation précise sans essayer d'analyser ce qui se passe : j'ai froid, j'ai du mal à respirer, je me sens souple ou raide... Une fois qu'on parvient à repérer et décrire ses différentes sensations et qu'on a identifié les situations précises où elles se manifestent, continuer à faire ce travail tout en cherchant à mettre des mots sur les émotions qui y sont attachées : par exemple j'ai du mal à respirer et je suis inquiet ; je suis raide et je suis en colère ... Plus vous vous sentirez confortable avec cette démarche, plus vous pourrez chercher à mettre en lien ces nouveaux modes de perception de votre environnement avec les talents que vous développez habituellement.

Par exemple : je suis en colère dans telle situation ; quelles explications logiques puis-je trouver ? Cette colère est-elle justifiée ? Tournée vers la bonne personne ? Dans mes souvenirs y a-t-il des situations similaires qui ont déclenché ce genre de colère ? Quelles ont été les conséquences ? A quoi sert cette colère, que m'apporte-t-elle ? Me nuit-elle ? Suis-je prisonnier de ce type de réaction ou suis-je capable de prendre du recul ? Comment aurais-je pu réagir autrement ?

Reconnaître mes propres émotions, c'est aussi une nécessité pour comprendre celles des autres et parvenir ainsi à mieux échanger dans des contextes chargés émotionnellement (apprendre une mauvaise nouvelle, vivre des changements, se retrouver en position de gérer des conflits, dans des négociations difficiles...).

Je suis essentiellement dans l'émotion. Il m'arrive fréquemment de me laisser déborder par ce que j'éprouve et cela nuit à mon efficacité dans l'action. Il s'agit tout d'abord de parvenir à retrouver un semblant de calme au niveau corporel : avant de "traiter" l'émotion, on peut essayer d'agir sur ses symptômes (transpiration, rougissement, tremblements, difficultés à se concentrer...). En fonction de ses propres compétences et de ses affinités, on peut se servir de techniques de relaxation, de yoga, de méditation.

Une fois le calme partiellement retrouvé, on peut chercher dans le passé des situations similaires qui nous ont mis dans le même état. Et faire des liens entre les différents phénomènes observés. Reconnaître les thèmes récurrents, mettre à jour des systèmes de fonctionnement, c'est enlever à l'émotion sa force de nuisance potentielle. Car il est alors possible de raisonner : que m'apporte cette émotion, en quoi la situation est-elle responsable, en quoi mes propres croyances occasionnent-elles parfois des conséquences négatives ? Par exemple, je dois prendre la parole dans une réunion aujourd'hui et je me sens trembler. Je respire profondément en me concentrant sur l'air qui circule dans mon corps.

Une fois, un peu apaisé, je fais le point sur l'essentiel de ce que je dois dire. En sortant de la réunion, je cherche les situations où j'ai éprouvé la même chose. Je découvre que je réagis ainsi à chaque fois que je me trouve face à des interlocuteurs autoritaires et sûrs d'eux. Je m'interroge sur mon rapport à l'autorité. Je me rappelle qu'enfant, on me disait timide. Je m'imagine ce qui aurait pu arriver de pire dans cette réunion, ce qui aurait pu arriver de mieux, et ce qui aurait été raisonnable d'attendre de moi. Je mets en perspective ce que j'ai fait avec ces trois scénarios. Je me rends compte alors que je me suis conduit "raisonnablement" et que si ma peur m'aide à mobiliser mes forces dans ces moments stratégiques, elle me bloque quand elle est trop forte, et ce pour de mauvaises raisons.

Faire régulièrement ce genre d'exercices avec ses émotions, c'est s'engager sur la voie d'une meilleure maîtrise des instants de forte tension.

Je suis synthétique, tourné vers les résultats à court terme. Il me semble manquer de sensibilité dans l'action au quotidien.

La première décision à prendre pour développer d'autres potentialités est de s'accorder des temps morts, des moments de "vide". Ce qui est particulièrement difficile quand on a ce genre de mode de fonctionnement. J'ai tendance à "foncer", à prendre des décisions sur la base de faits incomplets, à avancer sans regarder si les autres sont capables de suivre. La plupart du temps, je suis efficace mais il m'arrive de perdre du temps à tout reprendre depuis le début parce que je suis allé trop vite et parce que mes partenaires n'arrivent plus à me comprendre.

Il me faut donc tout d'abord m'accorder des pauses dans l'action, des moments où je vais plutôt chercher à observer, contempler ce qui m'entoure, sans autre intention que de découvrir "le paysage". Travailler ma sensibilité, c'est avant tout me donner du temps pour apprendre à regarder ce qui m'entoure. Puis, me forcer à laisser mes pensées "divaguer". Faire jouer mon imagination, laisser venir et s'associer les pensées parasites. Et enfin remettre en perspective ce que j'ai appris de ces temps de non-action avec ce que j'étais entrain de faire et ajuster la mise en oeuvre.

Par exemple, j'annonce les objectifs du prochain mois à mon équipe. Je donne des axes pour les atteindre. Puis contrairement à d'habitude, je sollicite les réactions et je prends cinq minutes de plus pour regarder les expressions, noter à la fois les mots et les gestes. Je cherche à voir les nuances dans les regards, le ton des voix, les postures. Soudain, je repense à un film d'aventure que j'ai vu la semaine dernière. Un de mes collaborateurs me fait penser à l'un des membres de l'équipe impliquée dans l'épopée, celui qui démissionne et se retire en premier, sans oser dire qu'il ne se sent pas à la hauteur ou qu'il n'a pas compris. Je fais le lien entre les deux histoires qui n'en ont peut-être aucun. Je cherche à voir ce collaborateur après la réunion pour vérifier sa compréhension et son implication.

Savoir se retirer de l'action permet de se donner les moyens de faire marcher d'autres types de "capteurs", d'enrichir sa compréhension du contexte et donc paradoxalement, de gagner du temps.

En entreprise, les pédagogies adaptées au développement de l'Intelligence Plurielle sortent des sentiers classiques. On les appelle des pédagogies décalées. Elles s'appuient sur des approches variées, remettent en cause nos pensées automatiques en permettent l'enrichissement d'éclairages et de points de vue. Conduites d'une manière professionnelle (par un tandem artiste/consultant-coach), elles favorisent l'ancrage des acquis par l'émotion et par l'action.

Les leviers suivants sont fréquemment utilisés :

Le jeu,
Le voyage,
Le décalage par la pratique artistique :
Le Théâtre met l'accent sur la résonance que nous obtenons en faisant de la sincérité notre principale ressource pour jouer un rôle,
Le chant lyrique nous aide à prendre conscience des apports de notre sensorialité, à trouver la justesse et l'équilibre pour améliorer notre impact dans nos relations,
Le cinéma nous donne les moyens de construire un projet résonant au sein d'une équipe, dans un environnement teinté de fortes contraintes techniques et de nombreux aléas,
La photographie nous aide à capter le moment propice, entre prévoyance et hasard et permet d'augmenter la pertinence et la réactivité de nos décisions,
Les arts plastiques nous poussent vers un autre rapport au temps, à l'espace et à l'erreur. Ils permettent d'éprouver l'importance des lignes de force, des clair-obscur... développant notre sens des nuances et de la stratégie.

Un cas concret sur les effets du développement de l'intelligence plurielle

Une personne a demandé à être accompagnée car elle avait un poste à responsabilités qui l'amenait à prendre la parole en public sur des sujets épineux et sérieux, avec des interlocuteurs de très haut niveau, des financiers souvent 20 ans plus âgés qu'elle. Son responsable voulait qu'elle progresse sur ce point. Respectueuse de l'autorité, elle s'est donc tournée vers nous.

Après le premier entretien, permettant de cerner les objectifs du coaching, la nature du travail et les différentes étapes, il s'est avéré que le problème ne se formulait pas comme il était posé au départ. Certes, pour progresser dans son environnement, cette femme devait avoir d'avantage de prestance et de charisme face à des interlocuteurs très charismatiques. Mais elle était surtout en déséquilibre car tiraillée entre une nécessité de s'adapter à un monde presque guerrier, tout en n'ayant que peu envie de se battre de cette manière pour être la meilleure. Ce genre de jeux relationnels, assez politiques, lui paraissait très puéril et ne constituait pas un but en soi pour elle. Pour autant, elle était consciente de devoir avoir d'avantage d'impact sur son auditoire.

La première étape du travail a été de mettre en évidence ses principaux moteurs et les caractéristiques de son mode de fonctionnement comme sa formidable exigence. Le paradoxe lui est alors apparu clairement : elle voulait des choses et leur contraire. Mais la compréhension intellectuelle n'était pas suffisante. Son corps était tendu, crispé, écartelé entre ces deux pôles contradictoires. Prisonnière de cette double contrainte, elle avait du mal à respirer et ne nous proposait qu'un petit filet de voix. Très développée sur le plan cérébral, nous avons donc commencé par ouvrir ses capteurs sensoriels par le chant et le travail sur la respiration et la voix. Elle s'est détendue, a fait d'elle-même toutes les analogies entre l'état qu'elle avait trouvé avec son corps et qui lui permettait de "donner de la voix" et celui qui était nécessaire à captiver un auditoire.

Pendant l'entretien intermédiaire, elle a exprimé le fait de ne plus vouloir ressembler à quelqu'un d'autre mais de vouloir utiliser les ressources qu'elle avait en elle. Une partie du chemin était faite. Nous avons continué à la faire travailler avec la caméra : comment apprendre à aimer ce que je suis, l'image que je donne ? Comment apprivoiser ce que je suis en poussant les points forts et en gommant ce qui me fait horreur ?

Jouer avec ce qu'on est au plus profond, mettre en avant ce qu'on est sans avoir le sentiment d'être à côté de sa route, savoir accepter l'erreur, le flou, l'incertitude; tels étaient les buts de cette phase du travail.

En conclusion de ce coaching, cette femme, cadre supérieur, n'avait plus peur de s'exprimer en public en n'étant pas à la hauteur, avait une voix qui portait d'avantage, une plus grande assurance dans ses propres capacités. Et surtout, avait identifié la nature de sa propre ambition, celle qui l'aiderait à continuer à avancer sans trahir ses valeurs ou l'idée qu'elle se faisait d'elle-même.

D'autres interventions dans le cadre du développement de l'intelligence plurielle ont mis en évidence d'autres effets concrets sur la performance : augmenter sa pertinence dans la définition des axes de développement stratégique malgré un environnement incertain ; savoir trancher en utilisant à la fois sa raison, ses émotions et son intuition, comme le font la plupart des dirigeants ; trouver la meilleure voie dans des relations interpersonnelles complexes ; avoir un plus grand impact sur ses interlocuteurs en utilisant au mieux son propre style...
L'intelligence plurielle se définit désormais comme un atout essentiel pour conduire durablement sa réussite. Elle sera sans doute exigée de la plupart des cadres dirigeants dans les années à venir.

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