Les salariés du Monde votent une grève historique

Réunis en assemblée générale ce mardi, quelques 300 salariés de la Société éditrice du Monde ont voté "une grève de 24 heures lundi 14 avril, avec non parution de l'édition du mardi". Un mouvement décidé en contestation du plan de redressement prévoyant 130 suppressions d'emploi. C'est la troisième menace de grève depuis la création du titre en 1944.

Le quotidien "Le Monde" sera absent des kiosques lundi prochain (édition du mardi). C'est le mot d'ordre voté ce mardi par les salariés du Monde à l'issue d'une assemblée générale pour protester contre le plan de redressement que la direction leur a dévoilé vendredi dernier et qui prévoit 130 suppressions d'emploi.

Des sources syndicales ont indiqué que les quelque 300 salariés de la Société éditrice du Monde (l'une des entités du groupe Le Monde chapeautant le quotidien) avaient voté très majoritairement "une grève de 24 heures lundi 14 avril, avec non parution de l'édition du mardi".

Depuis la création du titre en 1944, cette grève ou plus exactement cette menace de grève, serait, d'après l'historien et spécialiste du quotidien Patrick Eveno, la troisième de son histoire. Mais les deux précédents mouvements, en 1951 et 1984, avaient été finalement suspendus.

Michel Delbergue (syndicat CFDT) a expliqué à l'Agence France Presse (AFP) que cette grève, qui ne concerne pas les autres entités du groupe, permettra aux salariés de "débattre" des documents sur le plan de redressement que la direction doit remettre aux syndicats lors d'un premier comité d'entreprise extraordinaire de la Société éditrice du Monde prévu vendredi.

Le plan qui doit "restaurer l'équilibre du quotidien et de ses suppléments à échéance 2010" a été présenté lors d'un conseil de surveillance par Eric Fottorino, président du directoire du Monde depuis janvier, et son vice-président David Guiraud. Il table sur "une économie structurelle minimum de 15 millions d'euros sur deux ans".

La suppression de 130 emplois au quotidien Le Monde et dans ses suppléments, dont les deux tiers au sein de la rédaction, se fera par l'intermédiaire d'"un plan de départ volontaire et d'un plan de départ contraint", selon le communiqué publié à l'issue du conseil.

Les entités "déficitaires ou non stratégiques" que le groupe entend céder sont Fleurus Presse (groupe d'édition jeunesse), les Editions de l'Etoile (société éditrice des Cahiers du Cinéma), le mensuel Danser et le réseau de librairies spécialisées en littérature religieuse La Procure.

Dès cette annonce, l'intersyndicale CGT-CFDT-SNJ du groupe a "fermement condamné ces mesures d'une sévérité sans précédent au Monde". "Plus d'un salarié sur cinq est donc menacé de licenciement. Cette hémorragie annoncée est le résultat d'une gestion irresponsable de l'entreprise par les précédents directoires et d'une vigilance inexistante de la part du conseil de surveillance", a estimé l'intersyndicale dans un texte.

Pour Romain Altmann, délégué de Infocom'CGT du groupe, ce plan "est la remise en cause du modèle social du Monde". "Autant on peut discuter d'un plan de départs volontaires, autant on ne discutera pas d'un plan de licenciements", a-t-il affirmé à l'AFP.

"Nous sommes atterrés, nous ne nous attendions pas à un plan aussi drastique", a renchéri Nicole Morelli de la CFDT. "Nous allons tout faire pour que tous les salariés du groupe soient traités de la même façon, car le plan de départs volontaires ne s'adresse qu'aux sociétés de la SEM (société éditrice du Monde)", a-t-elle ajouté.

Les sociétés de personnels du Monde estiment de leur côté dans un communiqué commun que ce plan est la conséquence d'une "stratégie de fuite en avant" des directions précédentes. Elles annoncent qu'elles "veilleront à ce que le plan d'économies se double rapidement de projets de développement".

Pour sa part, le président du directoire Eric Fottorino, joint par l'AFP, a estimé que "c'est un plan à la fois indispensable, du fait de la situation économique, et qui doit être fait dans l'efficacité et l'équité". "La situation économique de la presse écrite en général et du Monde en particulier justifie une action vigoureuse", s'est-il défendu ajoutant : "C'est à ce stade un projet de plan qui doit être adopté par les partenaires sociaux".

Un troisième volet du plan annoncé lors du conseil, vise à "moderniser les systèmes (rédaction, gestion, abonnements), afin de mutualiser les coûts et simplifier les structures". Un dernier volet consiste à "revisiter les implantations immobilières" du groupe.

Enfin, ce plan intègre "une nouvelle approche de l'offre éditoriale du quotidien et de ses suppléments qui devrait voir le jour à l'automne".

En 2007, le groupe de presse, dont l'endettement s'élève à 150 millions d'euros, a accusé une perte de 20 millions d'euros. En 2006, il avait enregistré une perte nette de 14,3 millions d'euros.

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.