Enquête approfondie sur la fusion Deutsche Börse/LSE

Bruxelles s'inquiète des effets négatifs de la fusion du London Stock Exchange et de la bourse allemande, en particulier dans le domaine de la compensation et des dérivés. Le futur rival géant d'Euronext devra proposer des concessions.
Delphine Cuny
Margrethe Vestager, la commissaire européenne à la concurrence, a encore frappé.

Après le Brexit, voici un nouvel obstacle de taille à la fusion à 25,8 milliards d'euros entre le London Stock Exchange et la Deutsche Börse. La Commission européenne a annoncé ce mercredi l'ouverture d'une enquête approfondie sur cette opération qui, "en réunissant les bourses allemande, britannique et italienne, ainsi que plusieurs des plus grandes chambres de compensation européennes, conduirait à la création de l'opérateur boursier européen de loin le plus important".

La commissaire européenne à la concurrence, Margrethe Vestager, justifie ce passage en "phase II" :

« Les marchés financiers jouent un rôle essentiel dans l'économie européenne. Nous devons veiller à ce que les acteurs du marché continuent d'avoir accès aux infrastructures des marchés financiers à des conditions concurrentielles. Aussi avons-nous ouvert une enquête approfondie afin d'examiner la concentration envisagée ».

Inquiétudes sur la compensation et les dérivés

Bruxelles s'inquiète sur plusieurs fronts. D'abord celui de la compensation et des chambres de contreparties, rouages clés de la finance, où la fusion reviendrait à supprimer la concurrence, sur les marchés des obligations, des produits dérivés et des mises en pension, avec le rapprochement de Clearstream (Deutsche Börse) et de LCH.Clearnet contrôlé par le LSE.

"L'entité issue de la concentration formerait la plus grande réserve de marge au monde, représentant un montant de 150 milliards d'euros".

Ensuite dans les produits dérivés, ces instruments financiers complexes dont la valeur résulte du développement d'actifs sous-jacents, avec d'un côté Eurex, "le numéro un mondial du marché des dérivés de taux d'intérêt négociés en bourse", qui appartient à Deutsche Börse, et de l'autre SwapClear, "le plus grand acteur du marché de la compensation des échanges hors bourse de produits dérivés de taux d'intérêt, au moyen d'opérations de gré à gré («OTC»)", filiale de LCH.Clearnet. C'est précisément en raison du potentiel à 600.000 milliards de dollars du marché des dérivés OTC que les deux opérateurs veulent se marier.

La Commission craint que les deux entités ne mettent fin à leurs offres concurrentes; elle redoute aussi "la création d'un quasi-monopole" sur le marché des options et contrats à terme sur actions individuelles reposant sur des instruments sous-jacents italiens.

Concessions à venir

Autres domaines où une diminution de la concurrence risque de poser problème : les accords de mises en pension, des instruments qui ont gagné en importance depuis la crise financière pour le refinancement à court terme des acteurs de marché, ou les plateformes de négociations des actions allemandes. Plus largement, c'est sur l'ensemble des produits négociés en bourse, "notamment des fonds cotés", que la fusion du géant allemand et de son homologue britannique laisse craindre des effets négatifs. En particulier au détriment d'Euronext, issu de la fusion des bourses de Paris, de Bruxelles et Amsterdam, et un temps marié à la Bourse de New York (NYSE).

La Commission a jusqu'au 13 février 2017 pour arrêter sa décision. Le LSE et la Deutsche Börse, qui ont déjà échoué par deux fois à se marier par le passé, en 2000 et 2005, peuvent d'ici là proposer une série de concessions pour obtenir le feu vert. D'ailleurs, dans l'heure qui a suivi l'annonce de la Commission, le London Stock Exchange a publié un communiqué confirmant son attitude "proactive" et son intention d'étudier "la vente potentielle de LCH SA", filiale française de LCH Group.

Delphine Cuny

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Commentaire 1
à écrit le 28/09/2016 à 17:15
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La finance se replie, elle se recroqueville sur elle même comme la bête apeurée qu'elle est et qu'elle a toujours été.

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