Les patrons sous ordonnance

Chaque semaine, découvrez les chroniques sur la vie au bureau réalisée par Sophie Peters. Anecdotes, conseils, expériences : pour sourire mais aussi mieux se sentir dans son job.

 

Les patrons sont dans l'?il du cyclone. Certains diront?: ils l'ont bien cherché avec leurs rémunérations mirobolantes. Tous?? En traquant les belles voitures et les Rolex, le risque est grand d'établir l'équation patron = voleur. Or, ce discrédit actuel des dirigeants sonne, à juste titre, douloureusement aux oreilles des entrepreneurs comme des salariés. Et accentue le divorce avec l'entreprise.

 

Interrogés sur les difficultés de leur fonction dans l'émission « Complément d'enquête » de France 2, nombre de patrons sont arrivés à la même conclusion?: un bon dirigeant est un individu pétri de valeurs morales. Par les temps qui courent, voilà encore une notion délicate. Alors, disons-le autrement. Parlons de la volonté, de la conscience des devoirs à accomplir sérieusement et avec ténacité. Force de caractère, indépendance, courage, intégrité, autant de mérites à ne pas sous-estimer. « Pour être un patron efficace, il faut être un patron rigoureux », admettait Roger Fauroux, le patron « moral » de Saint-Gobain en 1986. Atteindre une certaine maîtrise de soi, contrôler ses passions, modérer sa jouissance du pouvoir, voilà ce que les salariés apprécient chez un dirigeant. Et dont ils ont besoin pour soutenir leur motivation. « Comme dans toute période difficile, l'intégrité et la crédibilité des dirigeants doivent être leurs atouts principaux, car ils auront des sacrifices à demander à leurs salariés », note le consultant Roland Berger dans Challenge.

 

gare à son narcissisme !

 

Une nouvelle race de patrons, préoccupés à l'excès de leur image, a occulté le métier de dirigeant. Leur pathologie?? Le narcissisme qui s'accompagne d'une conception des relations humaines très utilitariste et d'une morale souvent approximative. Certes, l'art des affaires ne s'enseigne pas. Mais il tient moins à un savoir théorique qu'à une armature personnelle faite de capacité de réfléchir par soi-même, de vouloir, de décider et de décider seul.

 

Élaborer ses propres règles et principes, examiner ses points forts et ses points faibles est une nécessité presque technique. Pour prendre du recul, un dirigeant doit chercher à voir clair en lui. En Suisse, une clinique psychiatrique a ouvert une consultation pour les patrons au bord de la crise de nerfs. Là, on leur désapprend à faire pour leur réapprendre à être. À sortir le nez des tableaux et arrêter de se focaliser sur l'efficacité.

 

S'observer, donc. Reconnaître ainsi que son plaisir est maître. Qu'il fonde son rapport au travail. Sans s'en cacher. Ne pas l'habiller avec des motifs altruistes. Reconnaître aussi la capacité de nuisance du pouvoir sur la personnalité. Plus on s'élève, plus on a tendance à devenir injuste, dur et méprisant. Résister suppose d'être lucide. Plus que jamais, l'injonction de Socrate « connais-toi toi-même » est essentielle. Analyser ses erreurs, ses défaillances, développer une vision souple de soi et des autres, détecter ses pièges et ses rigidités.

 

Ça tombe bien. Un long week-end s'annonce. Une trêve pascale idéale pour réfléchir au bon usage de soi et des autres. Pour arrêter de calculer ses marges et sa rentabilité. Mais s'interroger. Bref, travailler sur soi plutôt que faire travailler les autres. Ça change non??

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.